La Finlande va devenir mardi le 31e membre de l'Otan, a annoncé Jens Stoltenberg, son secrétaire général.Une intégration qui intervient 74 ans jour pour jour après la création de l'alliance militaire.Retour sur un événement qui a largement bouleversé la géopolitique mondiale.
Quelques mois après la fin de la Seconde Guerre mondiale, qui a entériné le recul de l'Europe sur la scène internationale, la tension monte entre les deux nouvelles superpuissances : l'URSS et les États-Unis. Rapidement, les dissensions se concentrent sur l'est du Vieux continent, dont une large partie a été conquise par l'Armée rouge avant l'arrêt des hostilités, et notamment sur Berlin.
Enclavée dans la zone d'occupation soviétique après la capitulation des nazis, la ville est elle-même divisée en quatre secteurs d'occupation. Dans les faits, la moitié de la capitale se trouve aux mains des Français, Britanniques et Américains. Excédé par cette situation, Staline ordonne, en juin 1948, un blocus pour affamer Berlin-ouest et s'approprier l'ensemble de la métropole.
"Destinées liées"
Alertés par ce coup de force, et la fragilité de l'Europe de l'Ouest face à l'ogre soviétique incarnée par le coup d'État de Prague (avril 1948), les États-Unis réagissent. Aux côtés du Canada et de dix autres pays européens (la Belgique, le Danemark, la France, l'Islande, l'Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Norvège, le Portugal et le Royaume-Uni), ils signent le Traité de l'Atlantique Nord, aussi connu sous le nom de traité de Washington, le 4 avril 1949.
Ce texte comprenant seulement 14 articles - une rareté en droit international - jette les bases de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (Otan), qui ne voit le jour, en tant qu'institution à part entière, que quelques mois plus tard. "Les nations ont de plus en plus la conviction que leurs destinées sont liées, que leur salut et leur bien-être ne peuvent plus se fonder sur un nationalisme égoïste et agressif mais sur la mise en œuvre progressive de la solidarité humaine", souligne à l'époque Robert Schuman, ministre français des Affaires étrangères.
Alliance militaire et politique
En créant l'Otan, les douze pays fondateurs mettent avant tout en place une alliance militaire chapeautée par les États-Unis. Cette organisation militaire répond à plusieurs principes, à commencer par le droit naturel des États indépendants à la légitime défense, individuelle ou collective, gravé dans le marbre par l'article 51 de la charte de l'Organisation des Nations unies (ONU). Un postulat consacré par le fameux article 5 du traité de Washington, par lequel les États membres s'engagent à se protéger mutuellement en cas d'agression. "Les parties conviennent qu'une attaque armée contre l'une ou plusieurs d'entre elles sera considérée comme une attaque dirigée contre toutes les parties", énonce le texte.
Le rôle de l'Otan consiste à garder les Russes à l'extérieur, les Américains à l'intérieur et les Allemands sous tutelle
Lord Ismay, premier secrétaire de l'Otan
À l'époque, cette défense collective vise d'abord à dissuader toute tentative expansionniste de l'Union soviétique. Le rôle de l'Otan consiste alors à "garder les Russes à l'extérieur, les Américains à l'intérieur et les Allemands sous tutelle", plaisante son premier secrétaire, Lord Ismay. Plus largement, l'organisme est chargé de coordonner les actions militaires de ses membres. Signe de l'importance que l'Alliance attache aux consultations, chaque décision répond à la règle du consensus et doit donc récolter l'unanimité pour être adoptée.
En parallèle, l'Otan se veut éminemment politique. Face au spectre communiste, "les Alliés adhèrent à un ensemble de valeurs et de principes (libertés individuelles, démocratie, droits de l'homme et règne du droit)", rappelle l'instance sur son site internet. Ce qui ne l'empêche pas au fil des années d'admettre ou de conserver en son sein, notamment pour des raisons géostratégiques, des pays qui s'éloignent plus ou moins de cet idéal : le Portugal de Salazar, la Grèce des colonels, la Turquie des coups d’État successifs...
Réinvention
L'Alliance a finalement survécu à la guerre froide et à la chute de l'URSS poursuit, de nos jours, sa mission de défense collective. Mais elle a également élargi son champ d'intervention, s'illustrant largement lors des crises de Bosnie (1994), au Kosovo (1999), en Macédoine (2001) ou en Afghanistan (2003), rappelle l'Institut national de l'audiovisuel (INA) : "Le champ d'action de l'Otan s'étend désormais au maintien de la paix (Darfour), au secours humanitaire (tremblement de terre au Pakistan, ouragan Katrina aux États-Unis) et à la protection contre des menaces aussi diverses que la prolifération des armes de destruction massive, les trafics transnationaux, la piraterie (Somalie), les cyberattaques, voire la sécurité énergétique."
C'est vraiment une journée historique
Jens Stolenberg, au sujet de l'admission de la Finlande dans l'Otan
De douze membres, l'Otan s'est rapidement agrandie. À partir de ce mardi, elle en compte 31 avec l'entrée officielle de la Finlande. "C'est vraiment une journée historique", a salué le secrétaire général Jens Stoltenberg. La Suède, elle, pourrait suivre dans les prochains mois. "Je suis absolument confiant dans le fait que la Suède deviendra également membre", a poursuivi le Norvégien. "C'est, pour l'Otan, pour moi, une priorité de s'assurer que cela arrivera aussi rapidement que possible."
Après quelques années de crise existentielle et de questionnements sur la pertinence de son maintien, l'Alliance a retrouvé du sens face à l'agressivité de la Russie et notamment l'invasion de l'Ukraine. À tel point qu'elle fait aujourd'hui office pour Moscou de rempart à ne pas franchir sous peine d'un conflit généralisé.
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