NUCLÉAIRE - L’Iran a annoncé reprendre l’enrichissement de son uranium à 20%. Une démarche aussitôt dénoncée par Washington, qui l'a qualifié de "chantage nucléaire". Mais qu’est-ce que ça signifie ?
En annonçant lundi 4 janvier avoir repris ses activités d’enrichissement de l’uranium à hauteur de 20%, Téhéran fait fi à nouveau de ses engagements, pris dans le cadre de l’accord international de 2015. À l’été 2019 déjà, le pays avait ouvert la brèche après de nouvelles sanctions américaines en manifestant son intention d’aller au-delà du seuil de 3,67% autorisé par la communauté internationale. Selon Téhéran, l’uranium enrichi à 5% était nécessaire à l’époque pour conduire ses "activités pacifiques". Aujourd’hui, un nouveau cap est franchi avec un taux affiché de 20%. Concrètement, que cela veut-il dire ? Cela représente-t-il un danger en matière nucléaire ?
Les centrifugeuses, indispensables pour enrichir l'uranium
Déjà, il convient de rappeler que l’uranium naturel est un métal composé à plus de 99% de l’isotope 238 et à moins de 1% de l’isotope 235. C’est ce dernier qui possède un noyau fissile naturel - qui peut être fragmenté par un neutron et qui peut produire une réaction de fission nucléaire. Il peut donc être utilisé pour produire de l’électricité, voire pour fabriquer une bombe atomique. Mais l’uranium 235 étant très rare, on l’a vu, il faut l’enrichir dans des centrifugeuses pour avoir un nombre plus conséquent de noyaux fissiles et l’utiliser dans un réacteur nucléaire. Dans le cadre de l’accord de Vienne, l’Iran s’était d’ailleurs engagé à limiter son nombre de centrifugeuses jusqu’en 2026, passant ainsi de 19 000 à 5.060 sur son territoire. Mais depuis, le régime a installé des centrifugeuses nouvelle génération, comme a pu le constater l'Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), dans un rapport de juin dernier.
Enrichi de 3 à 5%, l’uranium 235 peut être utilisé comme combustible dans une centrale nucléaire. À partir de 90%, il peut servir à réaliser une bombe nucléaire. Si la République islamique d’Iran n’a pas atteint ce stade, franchir le seuil des 5% représente inévitablement un danger puisque cela ne relève plus d’"activités pacifiques", comme elle l’entendait il y a un an. D’autant que comme le raconte François Nicoullaud, ancien ambassadeur de France à Téhéran, au quotidien Le Monde, "enrichir de l’uranium de 20% à 90% -qui est le niveau requis pour une arme nucléaire- est beaucoup plus facile et rapide que de l’enrichir de 3 à 20%".
Lire aussi
Qui a assassiné Mohsen Fakhrizadeh, le patron du nucléaire iranien ?
Lire aussi
Nucléaire iranien : où en est-on après plusieurs mois d'escalade ?
Si encore en novembre, Téhéran n’avait visiblement pas dépassé le taux d’enrichissement de 4,5% selon un rapport de l’Agence internationale de l’énergie atomique, aujourd’hui, une loi de décembre l’autorise officiellement à monter en puissance. "Nous pouvons produire chaque mois 8 ou 9 kg d’uranium enrichi à 20% de façon à atteindre les 120 kilos (par an) que la loi nous impose", a ainsi déclaré le président de l’Organisation iranienne de l’énergie atomique (OIEA).