REPORTAGE - "Une fêlure dans notre tête et notre corps" : la lente convalescence des soldats ukrainiens

par M.L | Reportage TF1 : Florence de Juvigny, Guillaume Aguerre et Fabrice Amzel
Publié le 12 février 2023 à 20h43

Source : TF1 Info

Sur le front, ils étaient en première ligne face à l'horreur.
Blessés, traumatisés, les soldats ukrainiens tentent de se reconstruire et de dissiper leurs cauchemars dans des centres de rééducation et d'écoute.
Une convalescence difficile, d'autant que certains d'entre eux devront retrouver les combats dès qu'ils seront à nouveau sur pied.

La dernière image que Viktor a gardée de la guerre remonte au 2 mars : un missile lancé droit sur lui, qui a fait basculer son quotidien dans l'enfer. Pendant plusieurs mois, ce soldat ukrainien ne pouvait plus rien bouger, si ce n'est ses paupières, pour cligner des yeux. Dans un centre de rééducation, retrouve peu à peu sa mobilité, mais le chemin est long. Debout, dans sa veste aux imprimés militaires, il cramponne ses mains à deux barres parallèles, et tente tant bien que mal de contrôler ses jambes secouées de tremblements. Devant lui, une rééducatrice guide ses pieds.  

"Tous les jours, il y a une nouvelle épreuve. Au début, chaque geste est insurmontable, et puis ça devient juste terriblement difficile", confie le jeune homme une fois rassis dans son fauteuil roulant, dans le reportage du 20H de TF1 en tête d'article. Sans compter les bruits, qui le ramènent au cœur de la guerre dès qu'un claquement se fait entendre.

"J'ai tout le temps peur que quelque chose d'horrible arrive"

Se reconstruire... pour repartir au front

Parmi les dizaines de patients, un ancien danseur de Kherson qui partait en tournées dans le monde entier, envoyé sur le front deux semaines seulement, assez de temps pourtant pour voir des amis mourir sous ses yeux. Il ne dormait alors plus que deux heures par nuit. Pour tenter de chasser les cauchemars et retrouver la sérénité, un masseur s'occupe de lui, sur fond de musique classique. "Ce que j'imaginais de la guerre n'a rien à voir avec ce que j'ai vu. Là-bas, sur la ligne de front, il n'y a plus que la peur, c'est terrifiant", explique-t-il, les yeux baissés, les mains nerveuses.

Retourner au front est pour tous une hantise, mais ils n'ont pas le choix. L'objectif de la structure est assumé : remettre ces soldats sur pied pour reprendre le combat. C'est déjà le cas pour un résident sur deux, et certains s'y résignent plus facilement que d'autres. L'un des patients se dit prêt à repartir se battre encore et encore, comme "Terminator" dit-il, jusqu'à ce que sa famille puisse vivre en paix. "Mais si vous ne prenez pas le temps de guérir, vous devenez un animal apeuré", appuie l'homme au crâne rasé, un blason ukrainien suspendu au collier autour de son cou. 

"Même si avec le temps, cela va de mieux en mieux, il y aura toujours une fêlure dans notre tête et notre corps", reconnaît toutefois le soldat. Depuis le début de la guerre, il y a près d'un an, un Ukrainien sur trois aurait besoin de recourir à une aide psychologique.


M.L | Reportage TF1 : Florence de Juvigny, Guillaume Aguerre et Fabrice Amzel

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