IMPASSE - Au Royaume-Uni, la sortie de crise semble loin, alors que les députés ont voté un amendement leur permettant d’influer sur le processus du Brexit, ce à quoi s’opposait le gouvernement. Ce dernier dans le même temps perd trois de ses membres, qui ont décidé de démissionner.
Loin de s’arranger, la situation se corse sérieusement pour le Royaume-Uni et Theresa May. La Première ministre vient d’essuyer un énième revers dans la soirée du lundi 25 mars, alors que les députés ont voté un amendement qui leur permet d’influer sur le processus du Brexit.
Cet amendement, adopté par 329 voix contre 302, leur permet d'organiser mercredi une série de votes indicatifs sur la forme que doit prendre le Brexit. Parmi les options sur lesquelles les députés pourraient donner leur avis : maintien dans le marché unique, nouveau référendum, voire annulation de la sortie de l'UE.
Rajoutant à l'ambiance dramatique et surréaliste qui règne depuis quelques semaines outre-Manche, trois secrétaires d'Etat ont annoncé leur démission dans la soirée : Richard Harrington (Industrie) sur Twitter, ainsi qu'Alistair Burt (Affaires étrangères) et Steve Brine (Santé), a indiqué à l'AFP une source gouvernementale.
Richard Harrington a reproché au gouvernement dans sa lettre de démission de jouer "à la roulette" avec "les vies et les moyens de subsistance de la grande majorité de notre peuple" du fait de son "échec à garantir un accord" de sortie.
This evening I wrote to the PM to offer her my resignation pic.twitter.com/Z0QU5lbeJ1 — Richard Harrington (@Richard4Watford) 25 mars 2019
"Cet amendement renverse l'équilibre entre nos institutions démocratiques et crée un dangereux et imprévisible précédent pour le futur", a réagi un porte-parole du ministère chargé du Brexit. Avant d'appeler le Parlement à "définir les prochaines étapes" avec "réalisme : toute option envisagée doit être réalisable dans le cadre de négociations avec l'UE", a-t-il souligné.
Ce vote et ces démissions accentuent la crise politique que traverse le pays, avec une Première ministre qui a perdu toute autorité et le contrôle du Brexit, et semble plus que jamais proche de la sortie. Theresa May cherche en effet toujours des soutiens pour passer son accord de divorce négocié avec Bruxelles, déjà massivement rejeté par deux fois par les députés mais dont dépend une sortie ordonnée de l'Union européenne le 22 mai.
Pas de "soutien suffisant" pour un nouveau vote
Le Royaume-Uni aurait théoriquement dû quitter l'UE vendredi 29 mars à 23H00 GMT, un peu moins de trois ans après le référendum de juin 2016. Mais faute d'avoir pu rallier les députés derrière son accord de divorce péniblement négocié avec Bruxelles, Theresa May a été contrainte de demander aux dirigeants de l'UE un report de cette échéance historique, fixée désormais au 12 avril au plus tôt.
Lundi avant le vote de la soirée, elle a dû reconnaître que l'accord de Brexit n'avait toujours "pas le soutien suffisant" au Parlement pour être soumis une troisième fois au vote des députés comme elle compte encore le faire. "En l'état actuel, il n'y a pas de soutien suffisant au Parlement pour soumettre à nouveau l'accord à un troisième vote", a-t-elle dit. "Je continue à discuter avec des collègues de la Chambre pour trouver des soutiens de façon à ce que nous puissions organiser un vote cette semaine."
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Les Britanniques ne savent donc toujours pas quand et sous quelles conditions ils quitteront l'UE. La Commission européenne a elle jugé lundi qu'un divorce sans accord le 12 avril et sans période de transition était "de plus en plus vraisemblable". "Cela créera évidemment des perturbations significatives pour les citoyens et les milieux d'affaires", a-t-elle mis en garde dans un communiqué, tout en annonçant qu'elle avait terminé ses préparatifs pour un tel scénario.
"Il faut se préparer au pire", a renchéri la secrétaire d'Etat française à l'Economie Agnès Pannier-Runacher, soulignant: "on n'a plus que quinze jours pour le faire".
"Time's up"
Lundi matin, Theresa May a discuté du Brexit avec ses ministres. "Il y a une réelle détermination à trouver un moyen permettant au Royaume-Uni de partir avec un accord et de respecter le résultat du référendum dans les meilleurs délais", s'est contenté de déclarer son porte-parole après la réunion.
Le tabloïd The Sun, quotidien le plus lu du pays, claironnait en une lundi: "Il est temps, Theresa" ("Time’s up"), estimant qu'elle devait démissionner pour donner à son accord une chance d'être approuvé.
The PM has shown courage. But to seal her deal and deliver Brexit, she needs to resign Tomorrow's @TheSun front page editorial The Sun Says: Time's Up, Theresa pic.twitter.com/mLszhysLtl — Andy Silvester (@silvesterldn) 24 mars 2019
Anticipant un possible rejet du traité de retrait, les dirigeants de l'UE ont donné à Theresa May le choix : soit l'accord est voté et le Royaume-uni effectue une sortie ordonnée de l'UE, avec un court report fixé au 22 mai. Soit l'accord est rejeté et Londres aura jusqu'au 12 avril pour présenter une alternative et demander un nouveau report qui impliquerait la tenue d'élections européennes fin mai dans le pays. Sinon, ce serait une sortie sans accord.