Le président français s'est entretenu ce jeudi avec son homologue russe, pour la troisième fois depuis le début de l'invasion en Ukraine.Vladimir Poutine s'est dit déterminé à poursuivre son offensive, bien qu'Emmanuel Macron l'ait averti que son pays allait "payer cher" cette attaque.Pour le président français, la Russie semble décidée à prendre le contrôle de l'Ukraine.
Un échange "pas particulièrement tendu" sur la forme, entre deux dirigeants qui se tutoient, mais nerveux sur le fond. Emmanuel Macron a de nouveau parlé jeudi avec son homologue russe Vladimir Poutine, puis a appelé le président ukrainien Volodymyr Zelensky, a annoncé l'Élysée. La discussion avec le président russe, qui a duré 1h30 selon la présidence, est le troisième entre les deux hommes depuis le début de l'invasion de l'Ukraine par l'armée russe le 24 février et la treizième depuis le 14 décembre. Une longue conversation au cours de laquelle le chef d'État russe a continué de défendre son offensive et a annoncé vouloir la poursuivre, laissant Emmanuel Macron "pessimiste".
Cet entretien s'est tenu "à la demande du président Poutine", a précisé le Premier ministre Jean Castex, invité dans le 13H de TF1. Il avait été annoncé en direct dans la matinée par le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, lors d'une conférence de presse en ligne. "La France a une tradition assez ancienne d'être intermédiaire dans les conflits", a-t-il fait remarquer, en soulignant que Moscou serait "ravi" si la France réussissait dans cette mission.
Mais le dirigeant russe, de son côté, s'est montré très peu enclin à reculer sur ses positions, rapporte l'Élysée. Il a maintenu vouloir mener jusqu'au bout "une opération de lutte contre le nazisme" qui gangrènerait le pouvoir ukrainien selon lui, des allégations jamais prouvées. Avant de rembobiner à nouveau l'histoire de la région, critiquant un manque de respect à ses yeux des Occidentaux à l’égard de la Russie.
Le Kremlin a rapporté quant à lui que le dirigeant russe a exprimé son désaccord avec le discours tenu par le chef de l'État mercredi soir, au cours duquel ce dernier a notamment affirmé que "la Russie n'est pas agressée, elle est l'agresseur". Vladimir Poutine a aussi exprimé sa volonté de poursuivre "sans compromis" son offensive contre les "nationalistes" en Ukraine et menacé de rallonger sa liste déjà longue de demandes en vue de pourparlers. "Toute tentative de gagner du temps par les négociations ne mènera qu'à l'ajout d'exigences supplémentaires vis-à-vis de Kiev", a-t-il mis en garde.
"Il faut s’attendre à ce que le pire soit à venir"
Après avoir affirmé que "les opérations se déroulent selon le plan", bien que l'armée russe semble pourtant patiner sur le terrain, le dirigeant russe s'est toutefois dit disponible à la négociation, tandis que les pourparlers reprennent ce jeudi entre Russie et Ukraine à la frontière polono-biélorusse pour une seconde session. Une première rencontre s'était terminée lundi sans avancées concrètes. Vladimir Poutine a souhaité que cette discussion porte sur le désarmement de l’Ukraine, qu'il obtiendrait de toute façon par la voie militaire si les Ukrainiens ne se pliaient pas diplomatiquement à ses exigences, a-t-il menacé selon l'Élysée.
Une "grave erreur", lui a répondu Emmanuel Macron. "Tu te racontes des histoires, tu cherches un prétexte", a-t-il lancé à Vladimir Poutine, estimant que ses arguments n'étaient "pas conformes à la réalité" et ne pouvaient "pas justifier cette violence". "Ton pays va le payer cher, il va finir isolé", sous le joug de "sanctions très longues", a-t-il mis en garde, en affirmant à nouveau que la responsabilité du conflit incombait entièrement à son homologue russe.
"L’ambition russe est de prendre le contrôle de toute l’Ukraine", a conclu l'Élysée après l'entretien, estimant "qu’il faut s’attendre à ce que le pire soit à venir", comme le signalait déjà quelques heures plus tôt le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian. Et ce, même si "rien n'est acquis". Vladimir Poutine n'a par ailleurs pas commenté le train de sanctions internationales adoptées à son encontre depuis le début de l'invasion, sanctions qu'Emmanuel Macron souhaite durcir, rapporte le gouvernement, qui y voit toujours "un outil très puissant" et "qui fonctionne". "Poutine n’aura pas l’Ukraine à moindre coût", promet l'Élysée.
Vladimir Poutine promet une "coopération" humanitaire, mais pas d'engagement
Quant aux inquiétudes d'Emmanuel Macron sur la situation humanitaire, notamment autour de Kiev qui vit au rythme des bombardements, Vladimir Poutine a nié ces frappes, revendiquant seulement un tir ciblé contre une antenne de télévision à proximité de la ville. Prétendant plus largement ne pas cibler les civils ukrainiens, il a toutefois accepté de faciliter les opérations humanitaires et de secours, se disant prêt selon le Kremlin à "coopérer avec des partenaires étrangers afin de résoudre les problèmes humanitaires", sans pour autant prendre d'engagement particulier, note l'Élysée.
Lundi 28 février, à l'issue d'un autre échange de 1h30, le chef du Kremlin avait déjà "confirmé sa volonté de s'engager" à arrêter les frappes contre les civils et à sécuriser les axes routiers. Mais sur le terrain, les bombardements s'intensifient pourtant, tandis que l'armée russe encercle plusieurs villes.
Face à la détermination russe, Emmanuel Macron a gardé lui aussi une ligne ferme, a assuré l'Élysée, tout en maintenant un dialogue avec le chef du Kremlin. "S’il décidait de faire autrement qu’aujourd’hui, une autre voix était encore possible", a signalé Emmanuel Macron, selon l'entourage présidentiel. "Ce n'était pas une conversation aimable, mais exigeante et parler est un instrument de la diplomatie", plaide le gouvernement. Un nouvel échange entre les deux chefs d'État pourrait avoir lieu, mais il n'est pas encore planifié, a précisé l'Élysée.
Emmanuel Macron s'est ensuite entretenu avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky, qui a insisté à nouveau sur la détermination des Ukrainiens, qui "ne se rendront pas" selon lui. S'il s'est dit ouvert au dialogue avec le Kremlin, "il n'est pas possible de négocier avec un pistolet sur la tempe", a-t-il martelé, se disant très préoccupé quant au coût humain de l'attaque russe. "Une grande confiance" lie les deux dirigeants, assure l'Élysée, qui rapporte qu'Emmanuel Macron respecte le choix de son homologue ukrainien de rester à Kiev pour "se battre pour la liberté de son pays" et ne l'invite donc pas à quitter l'Ukraine.
Pour l'Élysée, Emmanuel Macron affiche "une volonté assumée de continuer à dialoguer" avec Vladimir Poutine pour "préserver les civils et obtenir des gestes humanitaires", considérant qu'il est "absolument nécessaire de rester au contact pour éviter le pire".
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