Un taux de vaccination supérieur à la France mais plus de morts : la stratégie italienne en question

F.S.
Publié le 9 avril 2021 à 21h24
Un taux de vaccination supérieur à la France mais plus de morts : la stratégie italienne en question
Source : ANDREAS SOLARO / AFP

PARADOXE - Si le rythme de sa campagne vaccinale est très proche de celui de la France, le nombre de morts quotidiens de l'Italie est plus élevé. Plusieurs régions ont choisi de vacciner massivement les actifs en "première ligne", ralentissant l'immunisation des personnes âgées plus vulnérables.

La France et l'Italie suivent des progressions épidémiques souvent comparables, de même que le sont les restrictions ou confinements mis en place. Leurs campagnes de vaccination sont également très proches, avec environ 13 millions de doses administrées en France, contre 12 millions en Italie, avec une plus grande part de l'autre côté des Alpes (6% contre 5%). Mais, alors que le taux de mortalité des victimes dues au Covid était quasiment le même tout au long du mois de février, les deux courbes se sont désormais nettement détachées.

Ainsi, si la France cumule 1900 décès pour la seule semaine passée, l'Italie en compte plus de 3000. Ce paradoxe attire la suspicion en Italie sur la façon dont la campagne de vaccination y est gérée, à commencer par le système de priorisation mis en place. En effet, si les populations âgées sont supposées être prioritaires, un grand nombre de personnes bénéficient également d'un accès au vaccin : personnel de santé, enseignants, employés au contact du public par exemple. 

Résultat prévisible, l'ordre de priorité est devenu confus, mais les chiffres sont sans appel : les classes d'âge des seniors sont encore loin d'être immunisées, alors qu'elles sont, comme partout ailleurs, les plus vulnérables au Covid-19.

Les septuagénaires sont les moins vaccinés

Ainsi, les septuagénaires italiens sont particulièrement exposés : 2,4% seulement d'entre eux ont été complètement vaccinés, c'est moins que toute autre classe d'âge, même les 20-29 ans étant plus de 4% à avoir reçu leurs deux doses. 

L'erreur stratégique semble remonter au tout début de la campagne, en décembre dernier : seuls les personnels soignants avaient alors droit au vaccin, qu'ils soient exposés ou non au virus. Les seniors ont alors été mis de côté, et ce retard n'est pas encore rattrapé. Les personnes de plus de 80 ans n'étaient ainsi pour la plupart pas encore vaccinées en mars. 

Avec quelle conscience sautez-vous les listes ?
Mario Draghi, président du Conseil

Depuis, si l'accent a été mis sur la protection de la population vulnérable des seniors, l'ordre de préséance reste confus d'une région à l'autre, voire d'un centre de vaccination à l'autre. Au point que le Premier ministre Mario Draghi a rappelé tout le monde à l'ordre : "Nous devons tenir compte d'un fait : le risque de décès est le plus élevé pour les plus de 75 ans, les personnes âgées doivent donc être vaccinées en priorité", a-t-il ainsi déclaré lors d'une conférence de presse le 8 avril. "Alors, je dis : arrêtez de vacciner les moins de 60 ans, les jeunes, les enfants, les psychologues de 35 ans", a encore martelé le Premier ministre. "Avec quelle conscience sautez-vous les listes ?" a-t-il encore tonné.

Le système décentralisé de l'Italie a également joué son rôle dans la confusion. Les consignes du ministère de la Santé, s'agissant de la priorité aux seniors, sont désormais claires. Mais chacun des vingt gouvernements régionaux conserve une marge de manœuvre pour établir ses propres listes de priorité. Interviewé par le Washington Post, le virologue italien Roberto Burioni s'indigne : "Dans certaines régions, ils ont vacciné des journalistes, dans d'autres les avocats. Des professeurs d'université sont vaccinés... et ils travaillent à distance !"


F.S.

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