PORTRAIT - Parfait inconnu il y a quelques semaines, le jeune leader de l'opposition à Nicolas Maduro s'est autoproclamé mercredi "président" par intérim du Venezuela. Immédiatement reconnu par Donald Trump, Juan Guaido s'est appuyé sur une grande mobilisation contre le régime.
Une ascension fulgurante. Avec son allure élancée et sa voix posée, Juan Guaido, 35 ans, vient de bousculer la vie politique du Venezuela. Le député, devenu le plus jeune président du Parlement le 5 janvier, est apparu en quelques semaines comme le visage de l'opposition au chef de l'Etat Nicolas Maduro en réussissant à remobiliser les adversaires du dirigeant socialiste.
Alors qu'il avait le profil du parfait inconnu Juan Guaido, jusqu'ici peu habitué aux discours, est rapidement passé de l'ombre à la lumière en prenant le costume de chef de file de l'opposition et de l'épaisseur politique. De quoi s'attirer les foudres de Nicolas Maduro qui l'a qualifié de "gamin qui joue à la politique".
"On est en train de placer une charge importante sur les épaules de Juan (Guaido). Le changement ne dépend pas que de lui, il dépend de tout le monde" explique Juan Andrés Mejia, député de 32 ans, qui appartient comme lui au parti Volonté Populaire (VP) de Leopoldo Lopez. Selon lui, ceci s'explique notamment par le fait que le Venezuela est un "pays habitué à l'incarnation (du pouvoir)".
USA, Canada et Latino-Américains le reconnaissent président
De fait, ces dernières années, les précédentes figures montantes de l'opposition, Leopoldo Lopez, Henrique Capriles ou Freddy Guevara, ont fini par disparaître du paysage politique, emprisonné, privé de droits civiques ou en exil. Le 13 janvier, les images de l'arrestation de Juan Guaido par les services de renseignements vénézuéliens (Sebin), lors d'une opération spectaculaire au milieu de l'autoroute, alors qu'il se rendait à une réunion politique, avaient fait le tour du monde. Il sera relâché au bout d'une heure.
Mercredi, Juan Guaido été immédiatement reconnu comme "président" par intérim par le président américain Donald Trump et le secrétaire général de l'Organisation des Etats américains (OEA), l'Uruguayen Luis Almagro, lui a assuré sa "reconnaissance pour impulser le retour de la démocratie dans ce pays". Même chose pour le Brésil, mais aussi dix autres pays membres du groupe de Lima, qui dénonçait régulièrement les abus du régime de Maduro : Argentine, Canada, Chili, Colombie, Costa Rica, Guatemala, Honduras, Panama, Paraguay et Pérou.
Des débuts en politique en 2007
Pour celui qui a débuté en politique en 2007, avec la génération des étudiants qui descendent dans la rue contre l'ex-président Huga Chavez, l'opposition a Maduro est une vieille histoire. Juan Guaido multiplie les fronts contre le pouvoir chaviste (du nom de Hugo Chavez) : proposition d'un gouvernement de transition, Maduro officiellement qualifié d'"usurpateur", promesse d'"amnistie" aux militaires acceptant de rejoindre l'opposition... Et pari d'une grande mobilisation contre le régime mercredi qui a finalement réuni des dizaines de milliers d'opposants à Caracas et dans le reste du pays.
"Une de ses principales qualités, c'est de monter des équipes. Il comprend les différentes positions et fait tout ce qui est possible pour n'en faire qu'une", explique le député Juan Andrés Mejia.
Un "modéré respecté par les radicaux"
Marié, père d'une petite fille, Juan Guaido aime a rappeler qu'il est "un survivant, pas une victime", en référence à la tragédie de 1999 dans l'Etat de Vargas (nord) dont il sortira indemne. En décembre de cette année-là, des pluies diluviennes causent d'énormes éboulements dans cette zone, à 25 kilomètres au nord de Caracas, provoquant la mort de 10.000 personnes, selon la Croix Rouge. Il vit alors dans cette région côtière avec sa mère et ses cinq frères et soeurs. "Je sais ce que c'est d'avoir faim", confie-t-il.
"Guaido est un nouveau visage, vu comme un homme de consensus par les modérés et respecté aussi par les radicaux pour avoir participé activement aux manifestations", explique Diego Moya-Ocampos, analyste du cabinet IHS Markit, basé à Londres. Dans ce contexte de troubles, l'armée a rejeté dans la nuit de jeudi l'autoproclamation de Guaido, et à la suite de cette annonce des heurts ont éclaté entre forces de l'ordre et partisans de l'opposition à Caracas.
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