VIDÉO - Révocation du droit à l'avortement aux États-Unis : comment la résistance s'organise

Maëlane Loaëc | Reportage TF1 Axel Monnier, Adrien Ponsard et Théo Collet
Publié le 26 juin 2022 à 20h14, mis à jour le 26 juin 2022 à 23h48

Source : JT 20h WE

La riposte prend forme outre-Atlantique, après la décision de la Cour suprême de révoquer le droit à l'IVG.
Une dizaine d'États ont d'ores et déjà réussi à l'interdire.
Partis politiques, associations mais aussi entreprises réfléchissent aux moyens de contourner la mesure.

Face à face, deux Amériques qui ne se comprennent plus : devant la Cour suprême, à Washington, des manifestants excédés venus crier leur colère se sont confrontés à une famille anti-avortement, venue célébrer la décision de la Cour suprême. Dialogue impossible entre les deux camps, les invectives pleuvent et la tension monte. La police finit par intervenir et éloigner la famille, comme le montrent les images du reportage du 20H de TF1 en tête d'article. 

Depuis trois jours, des centaines de protestataires rassemblés devant le siège des juges américains fustigent une décision d'un autre temps. Vendredi, la Cour suprême a autorisé les États à interdire ou restreindre l'accès à l'avortement sur le sol, une mesure que se sont déjà empressés d'adopter huit de ces territoires dès à présent. Plusieurs autres pourraient passer le cap dans les jours ou semaines à venir, si bien que le recours à l'IVG est menacé dans la moitié des États américains, selon l'institut Guttmacher, centre de recherche spécialisé dans le suivi des avortements.

Mais quelle riposte est possible pour cette Amérique progressiste ? "Il faut qu'on manifeste, qu'on partage les infos, qu'on vote et qu'on appelle à voter. Mais surtout, que l'on fasse de la pédagogie", lance l'une des manifestantes

Cliniques, associations et entreprises mobilisées

D'un point de vue médical, le ministère de la Santé va s'assurer que la pilule abortive sera accessible sur tout le territoire. Cet avortement médicamenteux, autorisé aux États-Unis dans les dix semaines premières semaines de grossesse, sera plus difficile à contrôler dans les territoires qui interdisent l'IVG, puisqu'il est possible de le recevoir par courrier. 

Mais pour l'heure, il faut toutefois que la patiente soit vue en consultation par un médecin depuis un État qui autorise l'avortement, même si le rendez-vous se déroule par visio ou en ligne, précise le New York Times. Dans les heures qui ont suivi la décision de la Cour suprême, l'association Just the Pill, qui permet d'obtenir cette pilule dans plusieurs États, a reçu près de 100 demandes de consultations, soit quatre fois plus que d'habitude, ajoute le journal.

Dans une clinique de l'Alabama, censée fermer, les médecins assurent qu'elle restera ouverte, pour accompagner les femmes. "Cette clinique ne pourra plus pratiquer l'avortement, mais on continuera à aider les femmes et à leur dire où elles pourront aller pour être prises en charge", explique le Dr Dalton Johnson. Et même les plus grandes entreprises prennent position : Nike, Disney, WarnerBros, Adidas, Amazon, Starbucks ou encore Netflix ont annoncé qu'elles prendraient en charge les frais de déplacement de leurs employées, qui seraient contraintes d'aller avorter dans un autre État.

Une fragile contre-offensive démocrate

Sur la carte ci-dessous figurent en vert les États où l'IVG devrait rester légale. Les gouverneurs de la très progressiste Côte ouest s'allient même pour créer un "sanctuaire de l'avortement". Un vocabulaire militaire ne laissant rien au hasard, dans un pays crispé et divisé. "La Californie, l'Oregon et l'État de Washington lancent l'offensive de la Côte ouest", "nous continuerons à protéger les patients", promettent-ils dans une vidéo commune. 

Capture TF1

Le Missouri a été le premier État à interdire l'avortement vendredi matin, mais sa plus grande ville, la démocrate Saint-Louis, entend se battre, notamment pour que les femmes qui doivent se rendre dans un territoire voisin pour avorter ne soient pas criminalisées. "Transports, hébergement, repas, frais de garde, nous venons de passer un texte pour prendre en charge tous ces frais", explique Christine Ingrassa, conseillère municipale de la ville. "Et un autre pour allouer 500.000 dollars pour parer à tous les problèmes relatifs à la grossesse."

Mais à l'échelle du pays, les démocrates n'ont que peu de poids face à la décision, malgré leur majorité au Congrès, puisque la Cour suprême, la plus haute juridiction du pays, reste majoritairement aux mains des conservateurs. "Il n'y a aucun moyen de recours" auprès des juges, a affirmé vendredi sur LCI Olivier Piton, avocat français à Washington. 

Joe Biden lui-même, le président démocrate, n'a trouvé qu'une seule issue : appeler tous les mécontents à voter massivement aux élections de mi-mandat en novembre pour donner au pays une forte majorité progressiste. Le scénario permettrait alors de revenir sur cette "erreur tragique", selon les mots du dirigeant, pour voter une loi fédérale protégeant l'avortement. Malgré ce revirement historique, "cela ne veut pas dire que le combat est terminé", a-t-il assuré. Selon l'avocat Olivier Piton, les démocrates n'auraient pourtant "aucune chance de succès" pour inscrire le droit à l'IVG dans la législation américaine.


Maëlane Loaëc | Reportage TF1 Axel Monnier, Adrien Ponsard et Théo Collet

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