EN DIRECT DE KABOUL - Suite au retrait des derniers soldats américains, les talibans ont rapidement repris le contrôle de l’aéroport désormais désert. Des affaires abandonnées de civils afghans témoignent de la crise qui s'y est déroulée, raconte notre envoyée spéciale Liseron Boudoul.
C’est la première fois que les équipes de TF1 ont la possibilité de pénétrer dans l’enceinte de l’aéroport de Kaboul. Dans la nuit de lundi 30 au mardi 31 août, les dernières troupes américaines encore sur place ont quitté l’Afghanistan, laissant derrière elles le site de l’aéroport vide.
Un départ anticipé, 24 heures avant la fin de la journée du 31 août, date butoir initialement fixée par le président Joe Biden pour achever le retrait total des soldats encore présents dans le pays, et organisé au terme d'évacuations difficiles, parfois sanglantes, à la suite de l'attentat perpétré jeudi par le groupe État islamique, qui a coûté la vie à au moins 85 personnes le 26 août.
Jusqu’alors, ce sont ces forces américaines, assistées de celles d’autres puissances internationales comme la France, qui maintenaient coûte que coûte un pont aérien depuis l'aéroport pour faire évacuer les ressortissants internationaux et des civils afghans cherchant à fuir les talibans. Depuis la chute de Kaboul le 15 août dernier, les insurgés islamistes se sont imposés comme les maîtres du pays, au terme d’une conquête éclair en quelques semaines seulement.
L’aéroport est désormais retombé à leurs mains, et ils en assurent le contrôle. Les talibans "nous ont laissés passer parce que nous sommes journalistes, mais aucun Afghan, aucun civil ne peut y accéder", raconte l'envoyée spéciale de TF1 Liseron Boudoul dans le reportage en tête de cet article, à quelques mètres de l’entrée du bâtiment. Derrière elle, un parking où quelques voitures sont stationnées mais où personne ne circule, le site étant bordé de barbelés.
Certains appareils mis hors d'usage par les forces américaines
Seuls "des groupes de combattants talibans" en armes sont disséminés pour surveiller l’accès au site. "On a l’impression que c’est un peu une zone de guerre ici, qu’il y a eu une bataille, puisque l’on voit des véhicules, des 4X4 renversés", détaille la journaliste. À quelques pas d’elle, un véhicule blindé qui bloque une voie laisse voir une fenêtre arrière trouée, "apparemment visée par un tir". "Les talibans nous disent que ce sont les Américains qui ont démoli et détruit le matériel avant de partir, mais difficile de vérifier", précise notre envoyée spéciale.
Certains appareils ont en effet bien été mis hors d'usage par les forces américaines : quelque 73 aéronefs ont été "démilitarisés", a indiqué le chef du commandement central de l'armée américaine, le général Kenneth McKenzie, à l'AFP. "Ces appareils ne voleront plus jamais", a-t-il expliqué, affirmant qu'"ils ne pourront être utilisés par personne". Pour s'en assurer, les fenêtres de leurs cockpits ont notamment été brisées et leurs pneus crevés. Environ 70 véhicules blindés MRAP résistant aux mines et 27 véhicules légers Humvee ne sont également plus utilisables.
Sur le sol, derrière les barbelés, on devine aussi des vêtements et sacs étendus çà et là sur une courte étendue de pelouse : "on voit encore des affaires qui appartenaient à ces centaines, ces milliers d’Afghans, qui se sont regroupés là pendant des jours et des jours pour essayer de franchir les portes de l’aéroport pour essayer de monter dans un avion militaire", dans l’espoir de fuir le pays, décrit la journaliste. Depuis le 14 août, ce pont aérien a permis l'évacuation de quelque 123.000 personnes du pays, en grande majorité des Afghans.
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Un gouvernement taliban devrait être annoncé dans la journée
Désormais le site reste une zone militaire, mais est désormais passé aux mains des forces spéciales des talibans, "celles qui sont les mieux formées et les mieux équipées", précisait Liseron Boudoul sur LCI plus tôt ce mardi 31 août, dans la vidéo ci-dessous. "Il ne faut pas oublier qu'il y a encore des menaces d'attaques terroristes sur cette zone de l'aéroport", a-t-elle rappelé.
La journaliste a également fait le récit de l’ambiance dans laquelle baigne désormais la capitale depuis le retrait américain. La nuit passée, les insurgés ont fêté le départ des troupes américaines, célébrant "l’indépendance de l’Afghanistan après 20 ans de guerre". "Quelques minutes avant minuit, on a entendu le dernier avion de transport de troupes, un C17, décoller et survoler Kaboul - il est passé juste au-dessus de notre tête - et puis très vite, ont retenti des tirs de mitrailleuses et des coups de feu un peu partout dans la ville", raconte la journaliste.
Désormais, la composition du gouvernement taliban devrait être révélée aujourd’hui. Les habitants, eux, attendent de savoir "à quel taux de rigueur" la loi islamique sera appliquée. "Ils se disent que leur vie va commencer dans un autre règne, avec d'autres personnes qui sont à la tête du pays, et ils ne savent pas vraiment quelle va être leur vie quotidienne désormais", rapporte la reporter.