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Guerre en Ukraine : non, cette vidéo ne montre pas l’explosion du barrage de Kakhovka

Publié le 6 juin 2023 à 12h58, mis à jour le 6 juin 2023 à 14h56

Source : JT 13h Semaine

Une séquence, très relayée sur les réseaux sociaux, est présentée comme le moment où le barrage hydroélectrique de Kakhovka, près de Kherson, a été détruit.
S’il s’agit bien de l'infrastructure, cette attaque remonte à novembre 2022, lorsque la région était encore sous occupation russe.

Dans la nuit du 5 au 6 juin, l’un des plus grands barrages d’Ukraine, près de Kherson, a été détruit en partie. Au petit matin, Ukrainiens et Russes se sont renvoyés la responsabilité de cette détonation, qui a touché une infrastructure cruciale aux yeux de chacun. Parmi les images aussitôt partagées en ligne, certaines sont à prendre avec vigilance. C’est le cas d’une vidéo en noir et blanc, très relayée sur Twitter et présentée comme le moment de l’explosion du barrage de la centrale hydroélectrique Kakhovka, aménagé sur la rive du Dniepr. 

Une vidéo venant d'un média russe

S’il s’agit d’une vraie vidéo d’une frappe sur le barrage, la séquence ne renvoie pas à celle ayant eu lieu cette nuit mais à sept mois plus tôt, dans un tout autre contexte. Sa première diffusion en ligne remonte au 12 novembre 2022, à l'initiative d'un média russe. Ce jour-là, le journal Izvestia publie la vidéo sur Telegram et indique qu’il s’agit des "images de l'explosion d'un pont routier à la centrale hydroélectrique de Kakhovskaya". 

Cette vidéo impressionnante se retrouve rapidement sur Twitter, reprise par des observateurs du conflit, comme OSINTtechnical qui mentionne directement le barrage de Kakhovka. Des comptes spécialisés en données ouvertes sont formels, l’explosion est survenue le 11 novembre, à l’endroit évoqué par les Russes. D’après le compte Geoconfirmed, trois explosions sont alors visibles : une sur le pont situé au-dessus du barrage et deux "plus au nord". 

À l’époque, la région de Kherson était occupée par les forces russes. Ces dernières voyaient notamment dans le barrage un intérêt stratégique en venant alimenter en eau les habitants de la péninsule illégalement annexée de Crimée. Fin octobre, la menace de frappes pesait lourdement sur l’infrastructure, chaque camp alertant sur une attaque imminente. Selon l’Institute for the Study of War (ISW), les Russes mettaient ici en place "les conditions d'information nécessaires pour mener une attaque sous faux drapeau contre la centrale hydroélectrique de Kakhovka". Et envisageaient probablement de détruire le barrage pour couvrir "leur retraite de la rive droite de la rivière Dnipro et empêcher ou retarder les avancées ukrainiennes sur la rivière". Les forces russes ont finalement annoncé leur départ de Kherson le 11 novembre, le jour des explosions au-dessus du barrage.

Difficile maintenant d’évaluer les responsables de ces explosions, les deux camps s'étant accusés mutuellement, et les dégâts causés par celles-ci. Des images satellites de la société américaine Maxar ont suggéré qu’ils étaient loin d’être superficiels. La partie supérieure du pont semblait détruite, déclenchant alors un écoulement d'eau. D’autres images ont été publiées côté russe, le 13 novembre, deux jours après l’attaque, puis le 1er décembre. Toutes montraient que le pont avait été endommagé mais que les structures métalliques tenaient encore. Selon un site ukrainien, la route restait praticable à ce moment-là.

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Caroline QUEVRAIN

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