À Shanghai, 27 millions d'habitants sont enfermés chez eux depuis des semaines.Certains témoignent d'un quotidien devenu infernal, d'isolements très stricts et des tests à répétition.Soumis à la faim dans l'une des villes les plus riches du monde, d'autres n'hésitent plus à se révolter.
Des robots à quatre pattes dans des rues désertes, des drones survolant une mégapole fantomatique en diffusant des consignes de sécurité, des entrées d’immeubles scellées avec des habitants qui ne peuvent se promener que dans leur cour... Toutes ces scènes ne sont pas tirées d’un film d’anticipation, mais sont bien d’actualité à Shanghai, en Chine.
Depuis un mois, le Covid-19 a refait son apparition dans la capitale économique et l’isolement est absolu. Pourtant, on y recense un cas pour 8500 habitants, contre 1 pour 350 en France, et 344 décès ont été enregistrés. Tandis que le monde entier tombe le masque, la Chine continue de viser le zéro covid, quoi qu’il en coûte.
Ainsi, les 27 millions d'habitants confinés sont régulièrement testés. En cas de test positif, Shanghai isole les malades dans de gigantesques hôpitaux de campagne. Installés dans des bâtiments désaffectés, dans des gymnases, ou même, des piscines, les gens dorment parfois dans des cartons, faute de lits. Des couches peuvent être distribuées pour pallier le manque de sanitaires.
Faute de place suffisante, des logements sont même réquisitionnés pour y installer des lits d'isolement. Les policiers n'hésitent pas, alors, à expulser par la force les personnes qui y habitent. Des enfants ont été séparés de leur famille. Des animaux de compagnie sont abattus, quelques fois en pleine rue, lorsque leur maître est mis à l'isolement.
Des personnes isolées et sans informations
Guillaume n'a pas supporté ces conditions d'isolement. Traumatisé par sa propre expérience, il a fui Shanghai pour se réfugier dans une région chinoise qui n’est pas confinée. Pendant sa quarantaine, il assure avoir été maltraité. "On me met dans une chambre, on m’enferme à clé. Donc, je me retrouve séquestré dans 15 mètres carrés. Il n’y a pas d’eau, pas de serviette, pas de papier toilette, pas de savon, pas de dentifrice. Le lavabo était rouge de crasse, les infirmières rentrent à partir de 5h du matin pour faire les premiers tests. Je ne sais toujours pas pourquoi je suis là et je n'ai aucune idée de combien de temps mon enfermement va durer", se remémore Guillaume. Au bout d’une semaine, un médecin lui confiera finalement qu’il n’a jamais été testé positif.
La faim et la dictature sanitaire poussent certains à se révolter. Face à de telles consignes, des vidéos de scènes inédites de révoltes ont fleuri sur les réseaux sociaux chinois, aussitôt censurées par le parti. À la tombée de la nuit, des cris résonnent dans la ville, afin de réclamer de la nourriture. Certains habitants se rebellent contre la police, les employés municipaux et les volontaires en combinaison intégrale. "Nous sommes coopératifs, mais pas vous ! On veut juste avoir à manger", lance l’un d’entre eux sur une vidéo filmée où l'ensemble des habitants d’un immeuble sont descendus au pied de leur bâtiment.
Alors que de ces scènes de révolte se multiplient, le gouvernement a décidé d'une levée très partielle du confinement depuis quelques jours. La capitale, Pékin, elle, retient son souffle. La ville a recensé un rebond épidémique ces derniers jours, avec plus de 300 cas positifs. Si le confinement concerne pour l'heure une très petite part de la population, les habitants craignent que la situation de Shanghai se reproduise.