VIDÉO - Le président tchétchène Ramzan Kadyrov met en scène la capitulation d'un faux Zelensky

Maëlane Loaëc | Chronique LCI : Benjamin Cruard
Publié le 5 juillet 2022 à 9h06

Source : TF1 Info

Dans une vidéo publiée sur Telegram, le dirigeant tchétchène se montre en train de forcer un sosie du président ukrainien à signer un traité de reddition.
C'est en réalité un humoriste russe qui imite Volodymyr Zelensky.
Dans ses canulars menés en duo, il s'en prend aux ennemis de Vladimir Poutine.

Un sosie à la barbe noire, vêtu d'un T-Shirt kaki au col serré, dans un décor de bureau semblable à l'arrière-plan habituel du dirigeant ukrainien dans ses vidéos, un drapeau aux couleurs jaune et bleu en fond : le président tchétchène Ramzan Kadyrov a fait appel à un humoriste russe pour se grimer en Volodymyr Zelensky et jouer une prétendue capitulation le temps d'une courte vidéo. Les yeux embués de larmes, chétif, l'homme s'adresse à la caméra pour annoncer la défaite de l'Ukraine. Il lance quelques regards inquiets sur une main ferme qui agrippe son épaule, celle du dirigeant tchétchène.

La capsule, à retrouver dans la vidéo en tête d'article, a été diffusée sur le compte de la messagerie Telegram de cet allié de premier plan de Vladimir Poutine, sur lequel chaque publication atteint des centaines de milliers de vues. "Moi, actuel président de l'Ukraine, commandant en chef suprême des forces armées, j'accepte une capitulation sans condition de toutes nos forces armées, sur terre, en mer et dans les airs", lance d'une voix éraillée le faux Volodymyr Zelensky, lisant nerveusement un discours rédigé sur une feuille, sur fond de violons.

Des comiques russes s'attaquent aux opposants et ennemis du Kremlin

La caméra recule alors, et Ramzan Kadyrov apparaît en survêtement noir, surplombant le comédien dont il n'a pas relâché l'épaule. "Nous l'avons prouvé, bien sûr Akhmat Sila", articule-t-il, reprenant ce cri patriotique tchétchène, signifiant "Akhmat est la force", en hommage au père et prédécesseur du dirigeant, Akhmat Kadyrov. "Écrivons le comme ça", répond le sosie du président ukrainien, hochant la tête avec amertume. "Il était temps, tu as pris du retard", poursuit le président tchétchène d'un ton laconique, tandis que l'autre trace un "Z" pour toute signature sur un traité de reddition.

Derrière cette mise en scène à grosses ficelles, l'acteur qui campe le personnage de Volodymyr Zelensky est en fait un humoriste, comme l'était lui-même le président ukrainien avant d'accéder au pouvoir. Mais le comique est ici russe : Alexeï Stoliarov, surnommé Lexus, s'est fait connaître en Russie en duo avec un autre comique, Vladimir Kouznetsov, alias Vovan, en piégeant des célébrités par des canulars. Un tandem s'en prenant souvent aux ennemis de Vladimir Poutine, intérieurs comme étrangers, et qui s'est d'ailleurs targué, au tout début du conflit en Ukraine en mars dernier, d'avoir réussi à se faire passer pour le Premier ministre ukrainien dans un appel vidéo avec le Secrétaire d'État britannique à la Défense, Ben Wallace.

Les deux humoristes russes n'en sont pas à leur coup d'essai : en 2019, ils avaient affirmé avoir piégé Emmanuel Macron en se faisant déjà passer pour Volodymyr Zelensky, fraîchement élu à ce moment-là, ce que l'Élysée avait refusé de commenter. À leur palmarès, ils revendiquent aussi s'être joués du chanteur Elton John, du président turc Recep Tayip Erdogan, du prince Harry ou encore tout dernièrement l'autrice de la saga Harry Potter, J.K Rowling, se faisant encore passer pour Volodymyr Zelensky. 

Mais le duo d'usurpateurs se défend de toute proximité avec les services secrets russes. En 2016, Vovan expliquait à l'AFP vouloir "montrer le visage réel de certains partenaires de la Russie, leur hypocrisie". "Nous faisons uniquement les choses qui sont dans l'intérêt de notre pays", assurait de son côté Lexus. Désormais bannis de YouTube, ils sont toutefois largement diffusés sur les chaînes publiques russes. 

Les troupes tchétchènes en première ligne dans le Donbass

Quant à la Tchétchénie, elle confirme par cette vidéo son rôle de caisse de résonance de la propagande russe, les autorités multipliant les vidéos de mise en scène de ses soldats maniant les armes. Mais son rôle ne se limite pas à un relais de communication. Au début du conflit, Grozny avait annoncé envoyer 10.000 hommes en soutien des troupes de Moscou. Et dans les trois grandes prises russes à l'Est de l'Ukraine, dans le Donbass, à savoir Marioupol, Severodonetsk et Lyssytchansk, tombée dimanche pour la toute dernière, les soldats tchétchènes se situaient en avant poste et étaient les premiers à rentrer dans ces villes-clé. 

Des offensives documentées par de nombreuses vidéos, dans lesquelles les troupes de Ramzan Kadyrov brandissent fièrement leur drapeau. L'un des commandants tchétchènes, Zamid Chalaev, figure d'ailleurs sur les images de la conquête de ces trois centres urbains. Des forces envoyées donc en première ligne par le Kremlin pour faire plier des villes ukrainiennes résistantes mais stratégiques pour l'armée russe.


Maëlane Loaëc | Chronique LCI : Benjamin Cruard

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