Climat, Iran, protectionnisme... devant le Congrès, Macron souligne ses différends avec Trump

par Amandine REBOURG Amandine Rebourg
Publié le 25 avril 2018 à 19h05
Climat, Iran, protectionnisme... devant le Congrès, Macron souligne ses différends avec Trump
Source : AFP

DISCOURS - Un accueil triomphal et une standing ovation. C'est ce qu'avaient réservé les représentants à Emmanuel Macron, pour son discours devant la Chambre, mercredi 25 avril. Une intervention d'une petite heure, fortement applaudie par les élus américains et qui a tout de même du chatouiller Donald Trump.

Une standing ovation avant. Une standing ovation à la fin. Et au milieu, un discours où Emmanuel Macron a exposé sa vision du monde. Avec quelques minutes de retard, le chef d'Etat français est entré dans la Chambre des représentants, sous les vivats des élus américains. Des élus qui ont d'ailleurs, parsemé le discours du président français d'applaudissements dès que les phrases prononcées par le président français collaient à leur vision personnelle. 

Alors, que faut-il retenir de ce discours prononcé devant le parterre de représentants ? Des annonces précédemment faites par les deux Présidents, des rappels à l'histoire commune des deux nations et enfin, quelques sous-entendus sous forme de piques destination la politique de Donald Trump, notamment sur le protectionnisme, l'accord de Paris et enfin, la mise en place d'un nouvel ordre mondial du 21e siècle.

Emmanuel Macron, ovationné, lors de son arrivée Source : Sujet JT LCI
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Au cours de son discours, Emmanuel Macron a soigné son auditoire et sa fibre patriotique en évoquant les nombreux soldats américains venus défendre la France, dans les différents conflits mondiaux. Il a rappelé les liens des deux pays, leurs sacrifices communs puis a rendu un hommage appuyé aux vétérans américains qui "ont lutté pour notre liberté", lors du débarquement. "Je rend hommage à votre courage et votre dévotion", a-t-il dit. Poursuivant son discours, il a évoqué ensuite Simone de Beauvoir, Chateaubriand, Abraham Lincoln, les liens culturels comme le blues et le jazz "qui ont connu une résonance si forte en France". "Notre histoire, c'est l'histoire d'un dialogue ininterrompu (...) c'est la plus belle réussite de la concrétisation de nos liens, et de nos valeurs", a-t-il déclaré, sous les applaudissements des "Congressmen". 

Tout cela pour rappeler aux Américains et à Donald Trump que les liens unissant les deux pays ne se limitent pas à cela. Il a encouragé les deux nations à aller plus loin pour "faire face aux défis mondiaux". "Nos valeurs sont attaquées et nous devons réussir sans oublier nos principes et notre histoire", a dit le président français. Une partie du discours sans doute venue chatouiller quelque peu les oreilles du président Trump.

Je ne partage pas l'illusion du nationalisme
Emmanuel Macron, devant la Chambre des Représentants

"Aujourd'hui, la communauté internationale doit construire un ordre mondial du 21e siècle". Pour lui, les Etats-Unis et la France, ensemble, doivent montrer leur volonté de "continuer à écrire l'histoire ensemble". "La seule chose que nous devons craindre, c'est la crainte elle-même", a déclaré le président français. Comme une petite pique en direction de Trump qui prône une politique protectionniste depuis le début de son mandat et qui s'est fait élire, en partie sur cette idée. "Nous pouvons choisir l'isolationnisme et le nationalisme [...] Mais cela ne fera qu'enflammer la peur et les craintes de nos concitoyens. Nous devons garder les yeux ouverts", a dit Emmanuel Macron. "Si nous n'agissons pas en tant que communauté mondiale, l'ONU ne pourra plus exercer notre influence stabilisante et cela sapera l'ordre libéral créé après la seconde guerre mondiale".

"Je ne partage pas l'illusion du nationalisme", a ensuite lancé Emmanuel Macron. Pour lui, il faut laisser "cela de côté et construisons l'avenir que nous voulons. Nous devons façonner notre réponse commune à la menace globale à laquelle nous sommes confrontés", a-t-il précisé. Il a ensuite évoqué ce qu'il a qualifié de "multilatéralisme fort qu'il faut inventer". Telle une autre pique adressée à la politique de Trump. "Il ne détruira pas nos cultures nationales mais permettra à nos identités d'être protégées et de prospérer librement ensemble", a poursuivi le président. 

Macron critique la tentation isolationniste de TrumpSource : Sujet JT LCI
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"Nous pouvons construire un ordre mondial du 21e siècle pour nos peuples. Les USA et l'Europe ont un rôle important à jouer à cet égard. C'est la seule façon de défendre ce en quoi nous croyons", a-t-il déclaré. Puis d'enfoncer encore un peu le clou, en écho aux mesures protectionnistes prises par Donald Trump ces derniers mois : "Nous avons besoin d'échanges commerciaux équitables et libres. Une guerre commerciale qui opposerait des alliés ne serait pas cohérente (...) cela ne ferait que détruire des emplois et la classe moyenne payerait le prix (...) Les classes moyennes sont la colonne vertébrale de nos démocraties". 

Je suis certain que les USA reviendront dans l'accord de Paris
Emmanuel Macron, devant la Chambre des Représentants

Autre moment qui a dû secouer un peu Donald Trump, l'évocation des accords de Paris. "Certains pensent qu'il est plus urgent de protéger l'emploi et les industries que l'environnement, ce que je comprends mais il faut mettre en place une économie adaptée", a déclaré le président. 

Une partie du discours chaudement applaudie par le Congrès, encore une fois. "En polluant les océans, en détruisant notre biodiversité, nous détruisons notre planète et il n'y a pas de planète B. Il faut regarder les choses en face". Et de rappeler ensuite que les deux pays sont en désaccord sur ce point. "Nous devons travailler ensemble pour que notre planète soit à nouveau une planète agréable, où il y a des emplois, des opportunités et nous la préserverons".

Macron devant le Congrès : "Il n'y a pas de planète B"Source : Sujet JT LCI
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Et de lancer, tel un ultimatum déguisé, alors qu'il s'est fixé pour mission de faire changer d'avis Donald Trump sur le sujet  : "Et je suis certain que les USA reviendront dans l'accord de Paris. Je suis certain que nous pouvons travailler ensemble pour atteindre avec vous, les objectifs ambitieux de protection de l'environnement (...) Nous devons maintenir les valeurs pérennes qui nous ont été transmises".

Sur le plan des relations avec les autres pays, Emmanuel Macron a affirmé qu'il soutiendrait les Etats-Unis dans le processus de dénucléarisation de la Corée du Nord. Sur le dossier iranien, il a également affirmé avec force que l'Iran ne devra "jamais" posséder l'arme nucléaire et a proposé un accord plus ambitieux que le texte actuel, honni par Donald Trump. Ce dernier l'avait d'ailleurs qualifié de "désastreux", lors de leur conférence de presse commune, mardi 24 avril.  "Quant à l'Iran, notre objectif est clair. L'Iran ne devra jamais posséder l'arme nucléaire. Pas maintenant. Pas dans cinq ans. Pas dans dix ans. Jamais", a déclaré le président français, après avoir annoncé la veille souhaiter "travailler" avec Donald Trump sur un nouveau texte.

Macron : "Pas d'armes nucléaires pour l'Iran"Source : Sujet JT LCI
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Concernant l'accord sur le nucléaire iranien, Emmanuel Macron a affirmé que celui-ci "ne couvre pas la totalité des préoccupations. Il ne faut pas l'abandonner si nous n'avons rien de plus solide à proposer en remplacement. La France ne se retirera pas de l'accord, car nous l'avons signé". 

"Nous pouvons travailler à un accord plus complet qui couvrirait la totalité de ce dossier", a rappelé Emmanuel Macron. Une annonce faite hier, avec Donald Trump. "Nous ne laisserons pas une situation où la règle de droit ne s'applique plus, ou nous nous retrouverions dans une situation de tensions dans la région, pour celle-ci et pour nos peuples. C'est ma position", a-t-il affirmé. 

Revenant à l'un des points forts de son discours, celui de l'évocation du "multilatéralisme", il a rappelé l'action commune entre la France, les USA et le Royaume-Uni, pour la destruction de l'arsenal chimique de Bachar el-Assad, il y a quelques semaines. Pour lui, il s'agit de l' "une des meilleures preuves de ce multilatéralisme fort". Et de conclure ce discours par un "Vive les Etats-Unis, vive notre amitié", chaudement applaudi. 


Amandine REBOURG Amandine Rebourg

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