L'artiste russe Piotr Pavlenski et sa compagne Alexandra de Taddeo seront jugés en correctionnelle à Paris, ont tranché lundi les deux magistrats en charge de l'instruction du dossier.Ils sont suspectés d'avoir enregistré puis diffusé sur Internet des vidéos intime, à caractère sexuel, qui avaient entraîné la chute de Benjamin Griveaux, alors ténor de la majorité.
Un scandale politique à la barre. Piotr Pavlenski et Alexandra de Taddeo comparaîtront pour "atteinte à l'intimité de la vie privée", ont indiqué lundi les deux magistrats d'instruction, dans une ordonnance dont l'AFP a eu connaissance. L'artiste de 38 ans et sa compagne sont soupçonnés d'avoir diffusé mi-février 2020 des vidéos à caractère sexuel. Celles-ci, rapidement devenues virales, avaient suscité un scandale politique et entraîné, in fine, la chute du ténor de la majorité, Benjamin Griveaux. Le couple comparaîtra pour "atteinte à l'intimité de la vie privée".
"L'implication directe" d'Alexandra de Taddeo...
Dans leur ordonnance, les juges relèvent qu'aussi bien Piotr Pavlenski qu'Alexandra de Taddeo ont "reconnu" avoir délibérément enregistré ces images compromettantes, la seconde expliquant les conserver par mesure de précaution afin de "prouver" sa relation avec l'ex-ministre. En revanche, ils mettent en doute les affirmations de la femme de 31 ans, selon qui la diffusion des images "aurait été effectuée par son compagnon sans qu'elle soit d'accord, ni même sans qu'elle en ait été préalablement informée". Ils retiennent plutôt "son implication directe" au vu de "plusieurs éléments factuels". Parmi eux, un soutien (y compris financier), via une association qu'elle présidait, au site sur lequel la vidéo a été diffusée, et plusieurs messages qui laissent peu de place au doute.
... Juan Branco hors de cause
En revanche, les magistrats instructeurs ont définitivement mis hors de cause Me Juan Branco, un des avocats de Piotr Pavlenski, bien qu'ils estiment qu'"il a vraisemblablement joué un rôle actif dans la diffusion des vidéos litigieuses". Placé sous le statut intermédiaire de témoin assisté en 2021, "les investigations n'ont pas permis de déterminer précisément sa participation", concèdent-ils, déplorant toutefois que l'avocat se soit "réfugié derrière (son) statut" de conseil de M. Pavlenski "pour refuser de répondre aux questions".
Une vidéo synonyme de mort politique pour Griveaux
Pour rappel, le montage des vidéos en question, adressées par Benjamin Griveaux à Alexandra de Taddeo lors de leur brève relation entre mai et août 2018, avait été publié brièvement une première fois sur un blog le 1er février 2020. Il avait ensuite été repris une seconde fois, avec un fort retentissement, le 12 février sur un site "pornopolitique" créé par Piotr Pavlenski. Cette diffusion avait été "très difficile et très violente" pour sa vie professionnelle et familiale, avait déclaré Benjamin Griveaux, en janvier 2021 devant les magistrats instructeurs. Ancien secrétaire d'État, porte-parole du gouvernement et député, il a dès lors, peu à peu abandonné sa carrière politique et s'est reconverti dans l'entrepreneuriat.
De son côté, le couple de suspects avait été mis en examen le 18 février 2020, dans la foulée de son interpellation rocambolesque à Paris.
Cette décision "était absolument attendue pour moi car 'Pornopolitique' est mon œuvre d'art, et en tant qu'artiste, j'y ai apposé ma signature", a indiqué Piotr Pavlenski, sollicité par l'AFP. "Et puisque le système de valeurs de l'art contemporain est en conflit avec le système de valeurs du code pénal, alors en signant mon œuvre d'art, j'ai signé d'avance mon verdict", a-t-il ajouté. De son côté, le conseil de Benjamin Griveaux, Me Richard Malka, n'a pas souhaité réagir.