Des dizaines de cas, aucune arrestation... les zones d'ombre de l'affaire des piqûres en discothèques

F.R
Publié le 6 mai 2022 à 18h12, mis à jour le 6 mai 2022 à 18h19
Les cas se comptent en dizaines, et la psychose commence à gagner la jeunesse. Depuis le début avril, une soixantaine de plaintes ont été enregistrés un peu partout en France. Une équipe de "7 à 8" a recueilli les témoignages de plusieurs de victimes.
Les cas se comptent en dizaines, et la psychose commence à gagner la jeunesse. Depuis le début avril, une soixantaine de plaintes ont été enregistrés un peu partout en France. Une équipe de "7 à 8" a recueilli les témoignages de plusieurs de victimes.

Depuis plusieurs mois, des dizaines de personnes affirment avoir subi une mystérieuse agression à la piqûre, alors qu'elles étaient en boîtes de nuit.
Les agressions ont lieu partout en France, sans que les expertises identifient le produit administré.
Pour le moment, aucune interpellation n'a eu lieu.

Depuis les premiers signalements en février, le phénomène des piqûres en boîtes de nuit ne fait que prendre de l'ampleur. Des dizaines de cas ont été signalés, partout en France. Sueurs froides, douleur, nausées, frissons, vertiges... Les symptômes rapportés par les victimes sont divers. 

Alors que les agressions se multiplient, des interrogations demeurent sur ce phénomène, qui inquiète les autorités. On fait le point trois mois après les premiers cas. 

Un phénomène qui touche toute la France

Depuis décembre, soixante-neuf cas de piqûres ont été recensés dans des discothèques en Bretagne "administrative" et en Loire-Atlantique, d'après un communiqué du parquet général ce vendredi 6 mai, soit les derniers chiffres en date communiqués par les autorités. Quinze cas de piqûres ont été signalés à Rennes, 43 à Nantes, quatre à Vannes, un à Lorient, quatre à Saint-Malo, un à Saint-Nazaire et un à Brest.

Selon l'AFP, depuis début avril, c'est une soixantaine de faits qui a été enregistrée en France, selon la police. De son côté, la gendarmerie ne souhaite pas communiquer de chiffres nationaux, expliquant qu'à son niveau le phénomène n'était pas encore suffisamment étayé. 

Les agressions surprennent par leur étendue : plusieurs régions sont concernées.  Des enquêtes ont été ouvertes dans l'Hérault, en Isère, en Haute-Garonne, dans la Loire, en Dordogne, en Loire-Atlantique, en Île-de-France. Reste à savoir si toutes ces affaires sont liées.

Aucune substance détectée pour le moment

Pour le moment, sur les dizaines de cas signalés, les analyses toxicologiques ne donnent rien. Comme le signale le parquet général, dans les cas des 69 piqûres qui relève de la cour d'appel de Rennes, "des investigations, notamment d'analyse et d'expertise, ont été diligentées. Les résultats de ces analyses biologiques sont tous négatifs, tant au GHB (la drogue dite du violeur, ndlr) qu'à d'autres substances toxiques".

À noter qu'il est parfois difficile de prouver la présence d'une substance : le GHB est en effet indécelable dans le sang quelques heures seulement après son absorption. À Nantes, où 45 faits ont été portés à la connaissance des forces de l'ordre depuis la mi-février, selon le parquet, "aucun dépistage n'a mis en évidence la présence de GHB ou autres substances toxiques", comme l'indique le procureur Renaud Gaudeul à l'AFP, précisant qu'aucun suspect n'avait été interpellé.

Même chose à Grenoble, où une quinzaine de plaintes ont été déposées. D'après le parquet, deux enquêtes ont été ouvertes "pour administration de substances nuisibles" dans quatre discothèques différentes, mais les expertises n'ont pas permis d'identifier de substance illicite. Même si pour certains cas, la réalisation tardive des prélèvements "ne permet pas d'exclure formellement une administration toxique de GHB", précise Éric Vaillant, procureur de la République à Grenoble, dans un communiqué. 

Les victimes expliquent en effet s'être retrouvées dans un état second : Rose, qui s'est réveillée allongée sur une des banquettes de la boîte de nuit, avait "la tête qui tournait". "Je salivais énormément. Et je sentais comme des brûlures dans le bras. J’avais très envie de vomir. J’ai même craché du sang", se souvient-elle, encore sous le choc. 

"Jusqu'ici, les enquêtes judiciaires ou les services d'urgence consultés par les victimes n'ont jamais trouvé de substance, ce qui est encore plus inquiétant. Est-ce que c'est du GBH, du GBL ? On ne sait pas. Cela pourrait tout aussi bien être des benzodiazépines ou certains antihistaminiques connus pour leur caractère amnésiant. Voire rien, puisque le tableau du GHB, c'est une ivresse", résume le professeur Nicolas Franchitto, qui exerce au service d'addictologie du CHU de Purpan, interrogé par La Dépêche du Midi. Le médecin ajoute que les victimes "ont raison d'avoir peur si l'aiguille a servi à attaquer plusieurs personnes".

Des modes opératoires qui diffèrent, et pas d'arrestation

Dans cette affaire, les modes opératoires diffèrent. D'après une source policière à l'AFP, certaines de ces agressions à la piqûre pouvaient s'accompagner d'agressions sexuelles alors que d'autres non.

"Sept à Huit" a recueilli le témoignage de plusieurs victimes, dont Clara, 21 ans, violée après l'une de ces piqûres. Le 28 novembre dernier, la jeune femme rentre seule à son domicile quand elle croise un homme. "Quand je suis passée devant lui, il m'a attrapé le bras et m'a retenu brutalement avant de me piquer. Je n’ai pas eu le temps de réagir. Ensuite, j’ai vu qu’il mettait une seringue dans sa poche. J’ai commencé à avoir chaud et le regard qui devient trouble. Je n’avais plus aucune force. Il a commencé à me caresser, à me toucher la poitrine et à m’étrangler. Ensuite, c'est le trou noir complet", raconte la jeune femme, dont les analyses sanguines sont revenues sans révéler de traces de produit toxique. 

Jusqu'à présent, aucun suspect n’a été interpellé en France pour ces mystérieuses piqûres. 


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