ENQUÊTE - "Il avait complètement une double vie" : Cédric Jubillar, une personnalité complexe

Cela fait plus de deux ans que les enquêteurs cherchent à percer son mystère. Qui se cache derrière le visage de Cédric Jubillar, mis en examen pour homicide volontaire et écroué depuis juin 2021, après la disparition de sa femme Delphine ? Un mari effondré ou un coupable ? Les psychologues qui l'ont interrogé parlent d'un homme "arrogant", "impulsif", "séducteur", marqué par des "abandons et rejets successifs". De son ancienne famille, à son collègue de travail et ses amis, le JT de TF1 a rencontré ceux qui l'ont côtoyé de près pour tenter de cerner cette personnalité complexe. 

Une jeune femme, qui a grandi dans le même village que lui, en dévoile un premier pan. Il a alors 30 ans, elle, 15 ans à peine. Elle va passer de longues nuits de fêtes chez le couple. Toutes ces soirées étaient organisées dans le dos de Delphine, à l'époque infirmière de nuit. "Il avait complètement une double vie, sa femme ne nous connaissait pas, ne savait pas qui il fréquentait. Donc, on pouvait faire des soirées chez lui jusqu'à 6h du matin, elle, en étant de nuit, elle rentrait à 6h30 du matin, donc fallait vite vite qu'on parte à 6h. De passer de 6 heures avant où on rigolait, on buvait ensemble à 6 heures après, faire comme si on n'existait pas, faut avoir quand même du sang-froid", raconte-t-elle dans le reportage à retrouver en tête de cet article.  

Pour tenter de comprendre ses zones d'ombre, il faut remonter dans l'enfance chaotique de Cédric Jubillar. Son père ne l'a pas reconnu, sa mère peine à l'élever seule ; adolescent, il est placé en famille d'accueil puis en foyer. Une de ces familles a accepté de témoigner, c'est la dernière à avoir hébergé Cédric Jubillar, de 16 à 18 ans. La mère décrit un ado impulsif. "C'est pas un personnage comme tout le monde. Quand on vit avec lui, on se dit qu'il y a des choses qu'il n'a pas réglées. C'est un homme qui veut plaire. S'il n'arrive pas à plaire aux femmes, ça le met très en colère", se souvient-elle. 

De la colère et de l'arrogance, c'est aussi ce qu'évoque un ancien collègue de travail. Yannick a été son chef d'équipe pendant six mois, c'était en 2020. Ils travaillaient dans une entreprise du bâtiment. "Ça a été un problème par rapport au travail parce qu'il ne bossait pas. Des fois, il n'avait pas trop envie, c'était un peu compliqué pour ça. Il avait beaucoup d'aplomb, c'est-à-dire si on le voyait faire une bêtise, il soutenait que c'était pas vrai. Vraiment beaucoup d'aplomb", répète-t-il. À cause de ce comportement, Cédric Jubillar n'a pas été gardé. Ce fut une grande déception pour sa femme, Delphine, à l'époque. 

Un manque de stabilité professionnelle et un divorce en perspective auraient-ils pu le fragiliser ? Pour son avocate, maître Emmanuelle Franck, ces traits de personnalité n'en font pas un meurtrier. "Il y a, je crois, cette immaturité qui va engendrer des comportements parfois de provocation, parfois des réponses qu'il peut faire qui sont des réponses absurdes, parfois de l'ironie. Et toute une série de comportements qui sont finalement incompris du grand public parce que présentés comme étant autant d'éléments à charge, alors qu'en réalité, il n'en est rien", affirme-t-elle. 

Disparue le 16 décembre 2020 de son domicile de Cagnac-les-Mines (Tarn), Delphine Jubillar n'a jamais été retrouvée. Dans l'attente de son procès, Cédric Jubillar reste présumé innocent. Fidèle à lui-même, stoïque, il continue de clamer cette innocence.