Affaire Narumi Kurosaki : le procès de Nicolas Zepeda

Assassinat de l'étudiante Narumi Kurosaki : pourquoi le procès qui s'ouvre mardi est hors norme

A.S avec AFP
Publié le 28 mars 2022 à 19h25, mis à jour le 29 mars 2022 à 19h16
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Source : Sept à huit life

Narumi Kurosaki, Japonaise de 21 ans, a disparu début décembre 2016 à Besançon (Doubs).
Nicolas Zepeda, son ancien petit ami, soupçonné de l'avoir tuée, a été mis en examen en 2020.
Ce Chilien de 31 ans est jugé à partir de ce mardi et jusqu'à la mi-avril devant la cour d'assises du Doubs.

Une jeune femme qui disparaît du jour au lendemain, pas de scène de crime, pas de corps, une collaboration internationale hors du commun. Tout, dans ce qui est devenu au fil du temps "l'affaire Narumi Kurosaki", présente un caractère exceptionnel. 

Qu'est-il arrivé fin 2016 à cette brillante étudiante boursière japonaise, alors âgée de 21 ans, venue en France pour suivre des cours à Besançon et qui s'est volatilisée au cours d'une soirée ? Un peu plus de cinq ans après les faits, de multiples questions demeurent sans réponse.

Alors que le procès du principal suspect, Nicolas Zepeda, un Chilien aujourd'hui âgé de 31 ans qui fut un temps le petit ami de la victime, s'ouvre ce mardi 29 mars, TF1info revient sur cette sombre histoire. 

Un dîner au restaurant

Ils avaient rompu à l'automne 2016. Pourtant, c'est bien avec lui que la jeune Japonaise aurait passé la soirée, avant sa disparition, le 4 décembre 2016. 

C'est ce qu'a dit Nicolas Zepeda, qui avait alors 26 ans. Celui-ci affirme avoir passé cette dernière nuit de décembre avec Narumi Kurosaki, retrouvée, selon lui, par hasard lors d'un passage en France. Mais cette nuit-là, plusieurs voisins de chambre de la jeune femme dans la résidence étudiante affirment avoir entendu des "hurlements de terreur" et un bruit sourd, "comme si on frappait". Malgré ces sons plus qu'étranges, personne n'appellera la police.

Dans les jours suivant cette soirée entre ex et ces bruits étranges, les proches de Narumi Kurosaki reçoivent, via les comptes de la jeune femme sur les réseaux sociaux, des messages jugés parfois incohérents. Les enquêteurs de la police judiciaire de Besançon les attribueront par la suite à celui qui allait devenir le principal suspect dans cette affaire. Ce n'est que le 13 décembre qu'un responsable de l'Université de Franche-Comté déclare la disparition de l'étudiante. À ce moment-là, Nicolas Zepeda est reparti au Chili après avoir passé plusieurs jours en Espagne, chez un cousin.

Aucune trace de la jeune femme

Après la disparition de la jeune femme et avant que les autorités ne lancent un appel à témoins, les proches de Narumi Kurosaki se mobilisent. Plusieurs clichés de l'étudiante sont affichés ou publiés sur les réseaux sociaux. Ces recherches ne donneront rien.

Idem pour les enquêteurs qui, au cours de leurs premières investigations, ne retrouveront aucune trace de sang, de violences ou de lutte dans la chambre de l'étudiante. Tous ses effets personnels sont en place, à l'exception de deux objets dont l'absence est remarquée : une valise et une couverture. Des éléments plus que troublants.

Il se présente de lui-même à la police

Dans le même temps, Nicolas Zepeda se présente spontanément à la police chilienne. Il assure avoir quitté Narumi vivante après une nuit passée ensemble. Mais ses agissements, tout comme un détour par une forêt ou l'achat d'allumettes et d'un bidon de produit inflammable, en font rapidement le principal suspect.

Le jeune Chilien conteste toute implication dans cette disparition, et encore plus dans un éventuel meurtre. Dans une interview au JDD le 20 février 2022, son père, Humberto Zepeda, dénonce "une accusation biaisée sans aucune preuve scientifique" et "une enquête menée sur la foi de suspicions et de suppositions".

Le procureur de la République de Besançon, Etienne Manteaux, qui sera avocat général au procès, a, au contraire, estimé en janvier 2021 que le dossier présentait "énormément de données techniques" (téléphonie, géolocalisation de son véhicule, achats par carte bancaire...).  L'accusation, dit-il, s'appuie aussi sur les "témoignages de proches mettant en défaut la version de M. Zepeda" d'une rencontre fortuite à Besançon et d'une dernière nuit d'amour.

Un crime sans corps

En dépit des nombreuses investigations, le corps de la victime n'a jamais été retrouvé. "Comme dans tout dossier criminel où il n'y a pas de corps, c'est un dossier délicat", observe Me Randall Schwerdorffer, avocat du nouveau petit ami que Narumi Kurosaki fréquentait au moment de sa disparition, lui aussi partie civile.

Le fait d'avoir à juger des meurtres ou assassinats sans qu'un corps n'ait été retrouvé est relativement rare. Parmi les grands dossiers qui ont maqué les esprits et dans lesquelles on retrouve un tel scénario : l'affaire Viguier, l'affaire Agnelet, l'affaire Seznec et l'affaire Fiona.

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Une collaboration d'envergure

Coordonné sur trois continents, avec autant de langues, le procès de Nicolas Zepeda sera "inédit en France en termes d'organisation, de contraintes techniques et de pays concernés", selon le procureur de Besançon. "C'est un procès tout à fait exceptionnel avec trois pays impliqués : la France, le Japon et le Chili", a relevé le magistrat auprès de l'AFP. Le ministère de la Justice l'a d'ailleurs labellisé "Grand procès".

La cour d'appel de Besançon, chargée de l'organisation, a dû relever "le défi de la traduction, le défi technique des auditions en visioconférence de 14 témoins dans trois pays étrangers, et le défi du décalage horaire pour les entendre", selon une source judiciaire.

Plus de 40 médias sont accrédités pour suivre l'audience à Besançon, dont une dizaine de médias japonais et deux médias chiliens. Nicolas Zepeda est défendu par Me Jacqueline Laffont. Le verdict est attendu le 12 avril.


A.S avec AFP

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