Attaque à la prison de Condé-sur-Sarthe : l'invraisemblable défaillance de la fouille des visiteurs

Publié le 6 mars 2019 à 20h42, mis à jour le 7 mars 2019 à 0h47

Source : JT 20h Semaine

SÉCURITÉ - L'agression de deux surveillants par un détenu radicalisé à la prison d'Alençon/Condé-sur-Sarthe a mis au jour ce que le Premier ministre Edouard Philippe a qualifié lui -même de "défaillance" dans le protocole de fouille des visiteurs dans les prisons. Un surveillant n'a en effet pas le droit de procéder à une palpation sur les visiteurs sans leur accord. Les syndicats réclament des mesures d'urgence.

Deux couteaux en céramique. Voici les armes avec lesquelles Michaël Chiolo et sa compagne, Hanane Aboulhana, ont agressé mardi deux surveillants à la prison de haute sécurité de Condé-sur-Sarthe. L'individu a été interpellé dans la soirée à l'issue d'un assaut des forces de l'ordre au cours duquel sa compagne a été tuée. Elle était venue lui rendre visite dans l'unité de vie familiale et aurait, vraisemblablement introduit les 2 couteaux dans la prison malgré les contrôles.  Pour le personnel pénitentiaire, il s'agit de l'accident de trop : un mouvement de protestation a débuté ce mercredi, plusieurs prisons étant bloquées.

"C'est un mouvement illimité. L'émotion est très forte car ça faisait longtemps qu'on disait que ça allait arriver",  a déclaré Emmanuel Guimaraes, délégué national FO, devant l'entrée de la prison de Condé. Jusqu'à 18 prisons étaient bloquées, selon l'administration pénitentiaire. Pour beaucoup de surveillants, les prisons comportent des failles. En particulier la fouille des visiteurs. En effet, l'article 57 de la loi pénitentiaire n'autorise les "fouilles intégrales que si les fouilles par palpation ou l'utilisation des moyens de détection électronique sont insuffisantes." En clair : un surveillant n'a pas le droit de procéder à une palpation sur les visiteurs sans leur accord.

"Si le portique ne sonne pas il n’y a pas lieu à proposer une fouille"

Dans les faits, les visiteurs passent par un portique, lequel détecte seulement les objets métalliques. "La céramique n'en contient pas donc ça ne sonne pas", a expliqué Yoan Karar, secrétaire général adjoint du Syndicat National Pénitentiaire Force ouvrière sur franceinfo. "On parle d’armes métalliques, mais la plupart des armes elles sont en céramique, on peut parler aussi de produits stupéfiants, d’explosifs... Et la réalité, c’est que si le portique ne sonne pas il n’y a pas lieu à proposer une fouille", a abondé un syndicaliste. 

Face aux critiques, le gouvernement a reconnu que la situation ne pouvait se prolonger. "Manifestement il y a encore des failles et je suis là pour y remédier", a déclaré la ministre Nicole Belloubet. Elle a demandé dès mardi une "inspection" pour "faire la lumière" sur l'agression, qualifiée de "lâche attaque terroriste". "Si j'ai demandé une inspection, c'est précisément pour voir à chaque moment où sont les failles de notre système et prendre les mesures qui s'imposent. Il ne me semble pas pensable que l'on puisse entrer en détention avec des objets qui ne puissent pas être détectés", a expliqué la garde des Sceaux. "On peut parfaitement exiger qu'il y ait une fouille et que si la personne s'y refuse, elle ne rentre pas en prison. Il faut expertiser ce problème-là", a-t-elle ajouté.

Du côté des syndicats, on avance d'ores et déjà des pistes. Ainsi Julien Santiago, membre de FO Pénitentiaire à la prison de Luynes à Aix-en-Provence, a réclamé "des fouilles systématiques des détenus après leur passage au parloir ou dans les unités de vie familiale", ainsi qu'une "palpation systématique des visiteurs de détenus à risque ou radicalisés".


La rédaction de TF1info

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