Le procès de l'attentat de Nice

Un an après l’attentat de Nice (1/5) : toujours aucune trace de lien avec Daesh

par William MOLINIE
Publié le 14 juillet 2017 à 14h15, mis à jour le 14 juillet 2017 à 14h32
Un an après l’attentat de Nice (1/5) : toujours aucune trace de lien avec Daesh

ENQUÊTE – LCI a pu consulter l’intégralité de la procédure judiciaire sur l’attentat de Nice. Nous revenons sur les zones d’ombre entourant, toujours un an après, l’attentat qui a fait 86 morts sur la Promenade des Anglais, le 14 juillet 2016. Premier volet de cette série : l’absence de lien direct établi entre le tueur et l’Etat islamique.

Désormais, le dossier "attentat de Nice" est une pile de 80.000 pages. Mais dans cette montagne de procès-verbaux, de réquisitions judiciaires et de témoignages de victimes, pas une seule connexion avec l’Etat islamique. Le matériel informatique et les téléphones portables de l’auteur de la tuerie, Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, ont été épluchés. Selon nos informations, aucune trace de contact avec un éventuel commanditaire sur zone irako-syrienne n’a été relevée. Même pas un message écrit ou audio de revendication préenregistré. Une énigme qui interroge les juges antiterroristes et les parties civiles.

D’autant que plusieurs consultations de sites ou d’articles de presse réalisées par Lahouaiej-Bouhlel et exhumées par l’enquête prouvent son intérêt pour les thèses djihadistes. "Il y a très certainement un lien. Mais l’enquête ne l’a pas déterminé", résume une source proche de l’enquête. L’auteur de la tuerie n’était pas remonté dans les radars du renseignement français. Même en signal faible, alors que la DGSI compte un nombre important de "cibles" actives sur la ville de Nice.

Attentat de Nice : le profil complexe de Mohamed Lahouaiej-BouhlelSource : JT 13h WE
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Revendication opportuniste ?

Dans un procès-verbal que nous nous sommes procuré, la DGSI rapporte qu’aucun lien direct n’a été relevé avec l’organisation terroriste. "Pour autant, aucun document n'est venu pour l'heure matérialiser un quelconque acte d'allégeance prêté à cette organisation par Mohamed Lahouaiej-Bouhlel avant les faits. Aucun testament n'a non plus pour l'heure été découvert dans ses effets", écrivent les enquêteurs de la DGSI dès le 17 juillet.

Un an après, "rien n’a évolué de ce côté-là", précise à LCI une source proche de l’enquête. Autre interrogation laissée sans réponse, les termes employés dans le message de revendication de Daesh. "Il convient de noter que la formulation ‘de source sécuritaire’ employée au sein de la revendication de l'attaque de Nice apparaît comme inhabituelle", écrivent les enquêteurs. Qui concluent : "Ces éléments ne nous permettent donc pas de déterminer si l'intéressé a répondu par son action à une suggestion diffusée de façon générale par l'EI, ni le degré d'implication de cette organisation dans l'élaboration de cette action."

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Un acte isolé ?

Une chose est sûre, le mode opératoire du 14 juillet 2016 a largement été évoqué dans la propagande djihadiste. Al-Qaïda dans la péninsule arabique (AQPA) avait, dans le deuxième tirage de la revue Inspire, préconisé le recours à un véhicule de type 4x4 lancé à pleine vitesse dans un "endroit bondé (...) et de préférence piéton". Le recours aux armes à feu était par ailleurs conseillé. Dans une vidéo diffusée en 2014, le Syrien Mohammed al-Adnani, ancien porte-parole de Daesh, avait quant à lui appelé ses "soldats" à utiliser des véhicules béliers en Europe contre les foules. Lahouaiej-Bouhlel a, selon l'enquête, répondu à cet appel. "On est face à un individu qui a très certainement commis un acte isolé en épousant les thèses djihadistes. Ce profil est déroutant pour les magistrats spécialisés. Surtout quand ils ont 86 morts sur les bras", analyse sous couvert d’anonymat un avocat du dossier.

Se pose donc, pour les avocats de la défense, la question des complicités. Actuellement, neuf individus sont en détention provisoire. Tout l’enjeu des investigations qui se poursuivent est de déterminer si certains d’entre eux étaient au courant du projet terroriste du tueur. A défaut d’éléments, la justice devra se rendre à l’évidence : les relâcher ou les poursuivre sous une qualification criminelle et non terroriste.


William MOLINIE

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