ENQUÊTE - Des nouveaux cas de mutilation sont signalés chaque semaine en France et à l'étrange. Pour autant, les enquêteurs viennent de faire savoir que très peu de chevaux mutilés, sur la totalité des cas recensés, auraient finalement été victimes d'acte d'origine humaine.
C'est un mystère dans le mystère, la nouvelle à laquelle personne ne s'attendait. Sur les centaines de faits de mutilations de chevaux recensés en 2020, une action humaine a été établie pour 80 d'entre eux seulement. D'après les derniers chiffres communiqués par la gendarmerie, près de 500 faits ont été recensés. Mais parmi eux, 84 cas relevant d'une action humaine, soit 16%.
Une soixantaine de cas font l'objet d'investigations supplémentaires pour lever les doutes et environ 360 faits (72%) s'expliquent par des causes naturelles. Ces chiffres affaiblissent sérieusement l'hypothèse d'un vaste phénomène criminel. "Les actes de cruauté n'ont pas explosé par rapport aux autres années", remarque ainsi Marie-Béatrice Tonanny, coordinatrice nationale à la sous-direction de la police judiciaire dans une interview à l'AFP. "Il y a eu une petite augmentation, peut-être due à la médiatisation et aux copycats (ndlr: imitateurs). Ce qui explose c'est le nombre de signalements, d'appels de personnes nous disant 'mon cheval est blessé'."
De nombreuses pistes étudiées
La vague de mutilations de chevaux, parfois mortelles, en particulier depuis cet été, a en effet déclenché une psychose en France, au point qu'une cellule d'enquêteurs dédiée a été créée mi-septembre, sous l'égide de la police judiciaire de la gendarmerie nationale.
En septembre, avec une accélération des cas dans toute la France, environ 200 enquêtes avaient été ouvertes mais déjà, seulement une trentaine étaient considérés de nature humaine, selon la gendarmerie. Pour accroître la collaboration entre les enquêteurs et le milieu équin, une convention a alors été signée entre la gendarmerie et notamment la fédération nationale des conseils des chevaux.
De son côté, le ministère de l'Agriculture a mis en place une cellule de conseils pour les propriétaires d'équidés, en plein désarroi. Dès le début, ces mutilations ont laissé perplexes les enquêteurs.
Quatre arrestations
Depuis le début des enquêtes, quatre arrestations et le dernier individu a été condamné dans la Meuse à 12 mois d'emprisonnement avec sursis pour "actes de cruauté" notamment (par le tribunal de Bar-le-Duc le 8 décembre, ndlr). Cela faisait suite à un signalement: dans un champ, une des juments avait été retrouvée avec les organes génitaux abimés. Les trois autres arrestations sont en lien avec le phénomène, ils font partie des signalements mais pas des 84 cas répertoriés comme actes de cruauté. Ils sont plutôt liés à des actes déviants, de zoophilie. Un des mis en cause a été condamné le 30 octobre par le tribunal correctionnel de Poitiers pour des faits commis sur une ponette en avril dernier. Les autres affaires sont encore en cours.
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Nécropsie, analyses....
La Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) a été sollicitée par la gendarmerie nationale pour apporter également son concours aux investigations. Chacun des faits donne lieu à une étude approfondie (constatation par un vétérinaire, nécropsie, analyses...) afin de recueillir le maximum d'indices.
Jusqu'à présent, 4 personnes ont été interpellées. Un homme a été condamné dans la Meuse à 12 mois d'emprisonnement avec sursis pour "actes de cruauté" le 8 décembre dernier notamment. Il avait été confondu suite à un signalement: dans un champ, une des juments avait été retrouvée avec les organes génitaux abimés. "Ils sont plutôt liés à des actes déviants, de zoophilie", explique Marie-Béatrice Tonanny. Un des mis en cause a été condamné le 30 octobre par le tribunal correctionnel de Poitiers pour des faits commis sur une ponette en avril dernier. Les autres affaires sont encore en cours.
Un seul propriétaire de refuge a dit s'être retrouvé face à deux agresseurs venus s'en prendre à ses poneys. Un portrait-robot de l'un d'eux a été établi, mais sans résultat. Dans certains cas, l'autopsie a retenu la thèse d'une action animale nécrophage sur la carcasse du cheval, en particulier sur ses parties les plus tendres, dont les yeux ou les oreilles. "Sur les 84 cas, on sait qu'il y a une multiplicité d'auteurs, poursuit Marie-Béatrice Tonanny. Mais pour l'instant il n'y a pas de mobile qui apparaît. On s'est aussi appuyé sur l'expérience d'autres pays européens, et dans chaque pays concerné malheureusement personne n'a pu identifier réellement un mobile. Tout a été exploré, on a fait de la recherche sur d'éventuels challenges sur internet. Ce n'est pas connu dans les milieux du satanisme, ce n'est pas un rituel d'une culture, ce ne sont pas que des juments, on a eu de tout, du cheval de course à l'âne."
Aux États-Unis, en Grande-Bretagne ou en Allemagne où des vagues de mutilations d'équidés ont été constatées par le passé, des enquêtes longues et approfondies ont conclu que la plupart des blessures étaient accidentelles ou causées post-mortem par des charognards (renard, corbeau..).