JUSTICE - Le procureur de Paris Rémy Heitz a annoncé l'ouverture d'une enquête préliminaire sur la gestion de la crise du Covid-19 en France visant notamment les chefs d'"homicides involontaires" ou "mise en danger de la vie d'autrui". Le parquet de Paris a été destinataire de 62 plaintes ou signalements depuis fin mars.
Y-a-t-il eu ou non une mauvaise gestion de la crise sanitaire ? C'est à cette vaste question que devra répondre la justice. Ce mardi 9 juin, plusieurs mois après l'apparition du Covid-19 sur la planète, le parquet de Paris a fait savoir qu'il avait ouvert une enquête préliminaire le 8 juin suite à de nombreuses plaintes et signalements.
Que vise cette enquête?
L'enquête préliminaire ouverte vise principalement les délits de "mise en danger de la vie d’autrui", "non-assistance à personne en péril, "abstention volontaire de combattre un sinistre dangereux, et "homicides et blessures involontaires. "Cette enquête n'est pas là pour définir des responsabilités politiques ou administratives mais pour mettre au jour d'éventuelles infractions pénales" de décideurs nationaux" a indiqué le procureur de la République de Paris, Rémy Heitz, à l'Agence France Presse.
62 plaintes ou signalements
"Le parquet de Paris a été, à ce jour et depuis le 24 mars dernier, destinataire de 62 plaintes ou signalements liés à l’épidémie de Coronavirus, précise le parquet dans un communiqué ce jour. Ces plaintes, établies le plus souvent contre des personnes non dénommées (plaintes contre X), émanent de particuliers ou de collectifs professionnels (syndicats ou associations). Elles mettent en cause, pour la plupart, différentes instances, structures ou départements ministériels ainsi que des responsables administratifs, décideurs publics".
Cette enquête est une première réponse judiciaire à des plaintes, plus ou moins circonstanciées reçues par le parquet de Paris pendant le confinement. Elles ont été déposées par des proches de victimes, des organisations professionnelles ou encore, dans une "démarche pétitionnaire", via des plaintes-types publiées sur le site internet plaintecovid.fr.
Ces plaintes contre X ciblent parfois nommément des responsables de l'administration, notamment le directeur général de la Santé Jérôme Salomon, en première ligne médiatique lors de l'épidémie en France, ou encore Santé Publique France. Sont également visés, entre autres, l'administration pénitentiaire et le ministère du Travail.
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"Eventuelles infractions pénales commises"
Ces plaintes sont regroupées dans une "enquête-chapeau", agglomération de 13 procédures consacrées aux plaintes d'associations ou organisations syndicales, et une quatorzième englobant 33 plaintes, en grande majorité de particuliers, issues des plaintes-types du site internet plaintecovid.fr. "Le terme d'enquête-chapeau n'est pas procédural mais rend bien compte de la manière dont les choses vont être menées. Il veut signifier qu'il y a un tronc commun à toutes les procédures, notamment dans la documentation qui va être transmise", précise une source judiciaire à LCI".
Toutes ces plaintes ont été analysées par le pôle de santé publique du parquet de Paris.
Etablissements pour personnes âgés
"Trois plaintes visant nommément des établissements accueillant des personnes âgées ont déjà été adressées pour enquêtes à des services de police, précise le parquet. Sur la base des autres plaintes, le parquet de Paris a saisi le 8 juin 2020 l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (OCLAESP) d’une enquête préliminaire".
Le 20 mai dernier en effet, le parquet de Paris avait ouvert deux enquêtes du chef de "mise en danger de la vie d'autrui" consécutives à des plaintes mettant en cause la gestion de la crise sanitaire dans une résidence pour personnes âgées du 12e arrondissement et dans un Ehpad du 9e arrondissement de Paris. Elles ont été respectivement confiées au Service d'accueil et de l'investigation de proximité du 12e arrondissement (SAIP 12) et à la Brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP) . L'une des deux enquêtes se penche sur la gestion de la crise par l'Ehpad privé Les Parentèles, situé dans le 9e arrondissement parisien. Une troisième plainte a été déposé depuis et une nouvelle enquête ouverte.
Enquête territoriale à portée nationale
Cette enquête judiciaire, qui sera très probablement longue et difficile "aura pour objet d’établir les processus décisionnels mis en œuvre à l’occasion de la crise sanitaire afin de mettre au jour les éventuelles infractions pénales susceptibles d’avoir été commises" ajoute le parquet.
Indépendamment de cette enquête territoriale mais à portée nationale notamment du fait des personnes ciblées et des sièges des administrations, d'autres enquêtes locales ont par ailleurs été lancées à l'encontre de plusieurs Ehpad notamment deux à Paris, mais également à Nanterre ou Grasse (Alpes-Maritimes).