Décès d'Yvan Colonna : retour sur le parcours du "Berger de Cargèse"

Publié le 21 mars 2022 à 23h28, mis à jour le 22 mars 2022 à 0h15

Militant nationaliste corse, Yvan Colonna est décédé ce lundi 21 mars.
TF1 Info revient sur le parcours du militant nationaliste.

Indépendantiste corse convaincu, Yvan Colonna, mort lundi à 61 ans des suites d'une agression en prison, avait été condamné pour l'assassinat du préfet de Corse Claude Erignac. Mais ce berger, devenu une figure sur son île, a toujours nié son implication.

TF1 Info revient sur son parcours. 

"Militant nationaliste de première heure"

Né à Ajaccio en 1960, deuxième d'une fratrie de trois, Yvan Colonna s'installe adolescent à Nice avec sa famille. Il passe un bac B et suit un temps des études pour devenir professeur d'éducation physique et sportive, comme son père. 

Mais en 1981, le jeune homme déserte la faculté pour rentrer en Corse, dans son village familial de Cargèse (Corse-du-Sud). Cette année-là, son père, Jean-Hugues, est élu député socialiste des Alpes-Maritimes, avant d'entrer au ministère de l'Intérieur comme conseiller.

"Yvan s'est converti aux thèses nationalistes en faculté où il fréquentait des étudiants corses, l'enseignement ne l'intéressait plus. Il était nostalgique du village", selon une de ses proches parentes citée par l'AFP. À Cargèse, le jeune homme alterne les petits boulots, surveillant ou maître-nageur, avant de s'installer comme chevrier. Des personnes l'ayant connu le décrivent comme un "militant nationaliste de la première heure", un "idéaliste" plutôt tendance "pure et dure".

Entendu comme témoin dans trois affaires

Dès 1982, il s'engage dans le Syndicat des enseignants corses (nationaliste) avant de rejoindre les comités nationalistes, pour lesquels il est candidat aux municipales en 1983 à Cargèse. Puis il devient membre d'A Cuncolta naziunalista, l'organisation publique du Front de libération nationale de la Corse (FLNC), le groupe clandestin hégémonique à l'époque.

Les policiers le soupçonnent durant des années d'être un "soldat" du FLNC de la région de Cargèse et Sagone, au nord d'Ajaccio. Mais il n'est jamais poursuivi, faute d'éléments matériels et de témoignages. Alors que son casier judiciaire est vierge, il est entendu comme témoin dans trois affaires : en 1983, dans l'enquête sur l'assassinat du directeur des services du conseil général de Haute-Corse ; après la découverte d'une cache d'armes près de la maison familiale ; puis au sujet d'une tentative d'assassinat en 1994 contre Pierre Poggioli, fondateur d'une organisation nationaliste rivale.

Aux lendemains de l'éclatement de la famille nationaliste en 1990, le berger a choisi les rangs du FLNC-Canal historique avant de se détacher d'A Cuncolta, sa vitrine légale, après l'assassinat en 1993 d'un nationaliste par d'autres militants devenus frères ennemis.

De 1995 jusqu'à sa mise en cause dans l'assassinat du préfet Claude Erignac en 1998, il ne fait pas parler de lui. Aux yeux des villageois comme des policiers, il a "raccroché", s'est "rangé", entre son travail de berger et l'équipe de football de Cargèse qu'il entraîne. Proche de Jean-Baptiste Acquaviva, militant du FLNC de Balagne (Haute-Corse) tué en 1987 lors d'une opération commando du FLNC contre la ferme d'un rapatrié d'Afrique du Nord, il a donné à son premier fils, né en 1990, le prénom de son ami.

Il a toujours clamé son innocence

Huit ans plus tard, le 6 février 1998, Claude Erignac est abattu dans une rue d'Ajaccio, alors qu'il se rendait à pied au théâtre. Son assassinat a provoqué une onde de choc. Les jours suivants, des dizaines de milliers de Corses ont exprimé leur effroi et leur tristesse lors des plus grandes manifestations jamais organisées à Ajaccio et Bastia. 

Un groupe anonyme a revendiqué l'assassinat trois jours après les faits. Deux militants nationalistes avaient alors été interpellés et passeront de longs mois de prison, avant d'être relâchés.

Le 21 mai 1999, quatre hommes sont interpellés et passent aux aveux. Un mandat d'arrêt est lancé contre un cinquième, Yvan Colonna, qui devient l'homme le plus recherché de France après avoir été accusé durant les gardes à vue d'être le tireur. Huit nationalistes comparaissent en juin et juillet 2003 devant la cour d'assises spéciale de Paris. Quatre d'entre eux mettent Yvan Colonna hors de cause. Il est toutefois arrêté le 4 juillet 2003 dans une bergerie près du village d'Olmeto (Corse-du-Sud) après plus de quatre ans de cavale. 

Condamné en première instance puis en appel, Yvan Colonna a été définitivement en juillet 2012 à la réclusion criminelle à perpétuité pour l'assassinat en 1998 du préfet de Corse, Claude Erignac. Il a toujours clamé son innocence. 

En 2011, Yvan Colonna a eu un second enfant avec une nouvelle compagne, Stéphanie, connu notamment pour avoir interpellé Emmanuel Macron le 6 février 2018 dans les rues d'Ajaccio.


Aurélie SARROT

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