Des "vols, du racisme et de la maltraitance" au tribunal de Paris dénoncés par un brigadier-chef, une enquête ouverte

Publié le 28 juillet 2020 à 23h38
Des "vols, du racisme et de la maltraitance" au tribunal de Paris dénoncés par un brigadier-chef, une enquête ouverte
Source : AFP/Illustration

JUSTICE - Amar Benmohamed, officier de police judiciaire, accuse les policiers travaillant au dépôt, dans les geôles du tribunal judiciaire de Paris, de proférer des insultes mais aussi de maltraiter les personnes déférées. Le parquet de Paris a ouvert ce mardi une enquête.

"Ferme ta gueule, sale bougnoule", "négro", "sale race",  "sale trans",  "sale pédé", des mots courants entendus, selon un officier de police judiciaire qui les rapporte, au dépôt, dans les geôles du tribunal judiciaire de Paris. Selon ce brigadier-chef, ces expressions seraient ainsi lancées de façon récurrente et parfois même au haut-parleur à l'encontre des détenus qui passent par les cellules du nouveau bâtiment de la porte de Clichy. Mais elles auraient été aussi communément utilisées dans les sous-sols du palais, sur l'île de la Cité. 

Amar Benmohamed, l'homme qui accuse les policiers d'avoir proféré toutes ces insultes à l'encontre de ceux qu'ils appellent communément les "bâtards", désignant ainsi les personnes déférées, va plus loin . Il affirme en effet, dans Streetpress qui a fait éclater cette affaire au grand jour mardi, qu'au-delà des brimades et mots grossiers et racistes, les fonctionnaires auraient également maltraité des détenus, en les privant notamment de repas, en crachant dans leur barquette alimentaire et ou en leur volant même parfois leurs liquidités ou matériels informatiques.

La hiérarchie informée

L'officier de police judiciaire assure que tout cela dure depuis au moins deux ans. Il a d'ailleurs informé sa hiérarchie de ces dysfonctionnements en février 2019. L’Inspection générale de la police nationale a été alors saisie.

"En février 2020, l’IGPN a conclu à la saisine du conseil de discipline pour un fonctionnaire et des sanctions administratives pour cinq autres policiers. Le préfet de police a suivi les conclusions de l’IGPN puisqu’un conseil de discipline se tiendra pour un fonctionnaire en septembre 2020 et des blâmes et avertissements sont en cours de notification pour cinq autres", précise une source policière à LCI.

"Le préfet de police a agi avec détermination pour que les faits révélés soient sanctionnés", assure la préfecture de police à notre rédaction.

"Ma carrière est foutue"

Pour Amar Benmohamed, il est essentiel aujourd'hui que la justice se saisisse des faits. Son avocat Arié Alimi a interpellé ce mardi matin sur France Inter les ministres de la Justice et de l'Intérieur, Eric Dupond-Moretti et Gérald Darmanin, pour qu'ils interviennent. "Monsieur Dupond-Moretti connaît le fonctionnement du palais de justice de Paris. Il l'a récemment visité d'ailleurs. Monsieur Darmanin est responsable directement du fonctionnement du dépôt. Il est impératif qu'une parole ferme et solennelle soit dite très rapidement"

Sur France info, l'officier de police judiciaire a témoigné :"Je ne vous le cache pas, ma carrière est foutue. On me le dit clairement, 't'es grillé, t'es carbonisé, t'es mort, ils t'auront tôt ou tard'".

Ouverture d'une enquête par le parquet de Paris

Contacté par LCI dans la matinée, le parquet de Paris a fait savoir qu'il  "procède ce jour à l'ouverture d'une enquête des chefs de violences volontaires par personnes dépositaires de l'autorité publique, injures publiques en raison de l'origine, l'ethnie, la nation, la race ou la religion et injures publiques à raison du sexe ou de l'orientation sexuelle". Le parquet précise que "les investigations sont confiées à la branche judiciaire de l'inspection générale de la police nationale".

La Défenseure des droits Claire Hédon ouvre également une enquête ce jour. "Au titre de l’article 5 de la loi organique du 29 mars 2011, la Défenseure des droits a décidé d’ouvrir une enquête relative aux faits qu’auraient commis plusieurs fonctionnaires de police à l’égard d’un certain nombre de personnes détenues dans les cellules du tribunal de grande instance de Paris. Le Défenseur des droits mène ses investigations de manière indépendante et analyse tout manquement à l’aune des obligations déontologiques qui s‘imposent, en tout temps, à l’ensemble des agents des forces de sécurité, publiques comme privées", indique la défenseur dans un communiqué.


La rédaction de TF1info

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