Justice – À partir du lundi 14 janvier et jusqu'au 1er février, deux gradés de la Brigade de recherches et d'Intervention comparaissent devant les assises de Paris pour le viol d'une touriste canadienne, dans la nuit du 22 au 23 avril 2014. Ils encourent pour ces faits 20 ans de réclusion criminelle.
C'est un pub bien connu du quartier, entre la fontaine Saint-Michel (5e) et l'île de la Cité (4e) à Paris. C'est dans cet établissement où, comme les autres du genre, l'alcool coule souvent à flot, que la soirée a débuté ce 22 avril 2014, selon les protagonistes, dans une ambiance "bon enfant". Il a suffi pourtant de franchir quelques mètres pour que tout dégénère. De la porte du Galway à celle du 36, quai des Orfèvres, il y a en effet moins de 300 mètres...
A partir de ce lundi et pendant trois semaines, deux policiers de la Brigade de recherches et d'intervention, Antoine Q., 40 ans et Nicolas R, 49 ans, sont jugés pour le viol d'une touriste canadienne. Les deux fonctionnaires de l'unité d'élite sont soupçonnés d'avoir commis les faits dans des bureaux des locaux de la police judiciaire, à quelques mètres de l'endroit même où il comparaîtront pendant trois semaines, la cour d'assises de Paris sise, île de la Cité.
Shot de whisky et verres de bières
Et l'ambiance dans la salle risque d'être moins chaleureuse dans la salle d'audience que dans ce pub, il y a quatre ans, au printemps.
La partie civile, Emily. S. de nationalité canadienne, née le 13 janvier 1980, et en instance de divorce, était arrivée à Paris dans la capitale 18 avril 2014. Le 22 avril, vers 21h, la trentenaire s'était rendue seule dans le bar, qu'elle avait pris l'habitude de fréquenter depuis son arrivée. Ce soir-là, selon elle, elle s'est "liée d'amitié avec des policiers car elle se sentait en sécurité avec eux". Une dizaine de fonctionnaires sont là à ses côtés. On trinque au whisky et à la bière, sans modération, on s'amuse, on "flirte"…
Puis, selon Emily, un des policiers lui aurait plus tard proposé de visiter les locaux du mythique "36", ce qu'elle accepte volontiers. Comme ses talons lui font mal aux pieds, elle s'y rend, malgré la courte distance, en voiture avec Antoine Q., alors que Nicolas R. préfère marcher. "J'avais beaucoup bu, je me voyais mal rentrer à l'hôtel dans cet état et je pensais qu'en allant dans un commissariat, je me sentirais plus en sécurité", a expliqué aux enquêteurs Emily S., mettant en avant que son père était lui-même policier au Canada.
1h22 dans les bureaux du 36
Quand elle pénètre dans les locaux du 36 à 0h40 au bras de Nicolas R. qui l'a récupérée de l'autre côté de la Seine, Emily S. est d'après le planton "guillerette, pimpante et joyeuse". Elle passera près d'1h30 au 4e étage, dans le bureau 460, puis le 461. Avant d'en redescendre à 2h02, en pleurs, chaussures à la main, ne portant ni ses chaussures ni ses collants, l'air "paniquée". "Ils ont voulu du sexe avec moi que je voulais pas", répète-t-elle à plusieurs personnes dans la soirée.
"Quatre policiers m'ont violée avec condoms ", a-t-elle raconté, dans ses premières déclarations aux enquêteurs, le 23 avril au matin. Elle a décrit fellations et pénétrations vaginales forcées. Elle parlera ensuite d'au moins trois violeurs.
"Une touseuse, dépêche"
Les accusés, Nicolas R., 49 ans, et Antoine Q., 40 ans, nient farouchement l'avoir violée. Le premier parle d'une fellation consentie, sans éjaculation. Après avoir démenti tout rapport, le second a reconnu, tardivement, des caresses sexuelles dans la voiture, avec une pénétration digitale.
L'examen médico-judiciaire a révélé notamment une lésion gynécologique traumatique sur le sexe d'Emily S. Les empreintes génétiques des deux accusés ont été retrouvées sur son string. Un troisième ADN se trouvait sur le sous-vêtement. Malgré une opération de prélèvement sur 138 fonctionnaires de la police judiciaire, cet ADN n'a pu être identifié. Deux caleçons d'Antoine Q. portent l'ADN d'Emily S. mélangé à son sperme.
Dans l'iPhone d'un policier présent au Galway, les enquêteurs de l’IGPN retrouverontla trace d’une vidéo tournée à 1h16 le 23 avril 2014, vidéo efface par la suite et jamais récupérée. Dans ce même mobile, ils tomberont sur ce message envoyé par Nicolas R. à 1h04: "Ça est une touseuse, dépêche."
Une autre vidéo et une photo prises cette nuit-là par Antoine Q. ont également disparu de son iPhone…
Pas de huis-clos
Les experts sont partagés sur la personnalité de la victime. Certains ont posé "une forte réserve" sur la possibilité de s'appuyer sur son seul témoignage. L'expertise toxicologique a révélé qu'Emily S. avait pris antidépresseurs et opiacés et consommé du cannabis. Pendant l'enquête, elle a été présentée comme "extravertie", "joviale", "libérée".
En 2016, les juges d'instruction avaient prononcé un non-lieu pour les deux policiers. "Les mensonges des mis en cause s'expliquent plus simplement que les incohérences dans le discours de Madame Emily S.", jugeaient les magistrats. La trentenaire avait entre autres parlé trois hommes parfois, puis quatre d'autres fois.
Mais après un appel du parquet et de la partie civile, les policiers ont finalement été renvoyés aux assises. Les deux parties s'accusent mutuellement d'avoir multiplié les versions et de mentir. La justice a également pointé du doigt les bureaux qui auraient été nettoyés ou les indices disparus (collants, verres…) puis réapparus (pour les contenants d'alcool).
Sophie Obadia, l'avocate d'Emily S., avait envisagé de demander un huis-clos, peut-être partiel. "C'est une épreuve pour elle, cinq ans après les faits. Les confrontations (en 2015) ont amplifié son traumatisme", explique-t-elle. Une hypothèse qui ne devrait "vraisemblablement pas" prendre corps, a annoncé peu avant le procès Me Stasi à LCI.
Dans un témoignage à nos confrères de France 3, Emily S. dit ne pas supporter que les fonctionnaires la "traitent de menteuse". Photographe dans une agence de communication, elle a dû arrêter de travailler après les faits et est retournée vivre chez ses parents. Elle est également suivie par un psychologue.
"Mon client est combattif et impatient que son innocence soit reconnue", a déclaré l'avocat de Nicolas R., Sébastien Schapira à l'AFP.
Les deux accusés ont été suspendus de la BRI en 2014, et réintégrés dans un autre service de la police judiciaire deux ans plus tard. Ils comparaîtront libres sous contrôle judiciaire, encourent 20 ans de réclusion criminelle.
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