En procès, "l'empoisonneuse de Chambéry" risque la prison à perpétuité

par Romain CHEYRON
Publié le 9 mai 2017 à 9h55
En procès, "l'empoisonneuse de Chambéry" risque la prison à perpétuité

JUSTICE - Aujourd'hui s'ouvre le procès de Ludivine Chambet, appelée aussi "l'empoisonneuse de Chambéry". Elle comparaît devant les assises de Savoie pour avoir empoisonné, avec des mélanges de médicaments, treize pensionnaires d'une maison de retraite, dont dix sont morts.

Ludivine Chambet, une aide-soignante d'une maison de retraite près de Chambéry, comparaît à partir de mardi devant les assises de Savoie pour avoir empoisonné, avec des mélanges de médicaments, treize pensionnaires, dont dix mortellement. Elle dit avoir voulu les "soulager". Détenue depuis sa mise en examen fin 2013, elle aura 34 ans au lendemain de l'ouverture de son procès, prévu pour durer douze jours. 

Elle comparaît pour crime d'empoisonnement sur personnes particulièrement vulnérables. Elle risque la réclusion criminelle à perpétuité alors que la question de l'euthanasie sera forcément également évoquée au cours des débats.

Les victimes, huit femmes et cinq hommes de 76 à 96 ans, étaient accueillies dans l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) Le Césalet, à Jacob-Bellecombette (Savoie), relevant du Centre hospitalier de Chambéry. "Il y a une certaine impatience pour comprendre comment cette mécanique infernale a pu se mettre en place", explique Me Daniel Cataldi, avocat de huit familles. Des familles "traumatisées qui se posent bon nombre de questions, notamment le délai qui a été nécessaire pour se rendre compte de ce qui se passait".

Quelque chose s'est échappé dans ma tête...
Ludivine Chambet

"Mon but, c'était de les soulager. Je voulais apaiser leurs angoisses sans leur donner la mort. Quelque chose s'est échappé dans ma tête...", a confié Ludivine Chambet lors de l'instruction. Les faits remontent à l'automne 2012 - peu après la prise de fonction de l'aide-soignante - et auraient duré jusqu'à l'automne 2013. "S'il n'y avait pas eu la vigilance de ce médecin des urgences et ces analyses toxicologiques en novembre 2013, l'ardoise serait plus lourde encore", assure l'avocat.

L'affaire débute le 27 novembre 2013, avec le coma soudain d'Élise Maréchal, 83 ans. Hospitalisée, elle meurt le jour-même. Des analyses toxicologiques révèlent la présence de quatre psychotropes qui ne faisaient pas partie de son traitement. Son décès faisant suite à d'autres cas rapprochés de morts inexpliquées parmi les pensionnaires, des cadres de l'Ehpad examinent alors les plannings des personnels soignants. "Le nom de Ludivine Chambet est revenu à plusieurs reprises", indique l'ordonnance de mise en accusation.

Le décès de sa mère, le déclencheur ?

La direction décide alors d'écarter la jeune femme de son poste, la médecine du travail la déclare inapte le jour même et la justice est prévenue. Interpellée le 10 décembre, Mme Chambet est placée en garde à vue. Au cours de divers interrogatoires, elle admet avoir administré plusieurs produits à onze patients, tout en se défendant d'avoir voulu les tuer.

Décrite comme compétente et investie dans son travail, cette fille unique, célibataire et sans enfant, a raconté durant la procédure s'être beaucoup occupée de sa mère atteinte d'une leucémie aiguë, diagnostiquée en mai 2012 et qui l'a emportéee en juin 2013. La mort de sa mère, avec qui elle entretenait une "relation fusionnelle", l'avait plongée dans une "grande souffrance et une grande solitude", selon des membres de sa famille. Elle avait exprimé qu'elle "ne supportait plus de voir d'autres personnes souffrir".

"L'éclairage psychiatrique sera important, de même que l'absence de verrou de sécurité. Cet aboutissement infernal aurait-il pu être évité ?", demande Me Cataldi. Les parties civiles viendront avec "beaucoup de colère et de tristesse", prévient l'avocat en rappelant les "terribles" exhumations des défunts pour analyses.


Romain CHEYRON

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