Le préfet des Alpes-Maritimes, muté en Seine-Saint-Denis, paye-t-il les conséquences de l'affaire Legay ?

Anaïs Condomines
Publié le 12 avril 2019 à 19h47
Le préfet des Alpes-Maritimes, muté en Seine-Saint-Denis, paye-t-il les conséquences de l'affaire Legay ?
Source : AFP // VALERY HACHE

A LA LOUPE - Le 10 avril dernier, le préfet des Alpes-Maritimes Georges-François Leclerc a été muté en Seine-Saint-Denis, par décret ministériel. Un départ au bout de deux ans et demi qui n'a rien d'anormal, mais dont le contexte interroge. Pour l'avocat de Geneviève Legay, la militante d'Attac septuagénaire blessée en marge d'un rassemblement des Gilets jaunes, "il y a des coïncidences qui ne trompent pas".

L'annonce est plus ou moins passée inaperçue. Relayée uniquement par la presse locale, la toute récente mutation du préfet des Alpes-Maritimes Georges-François Leclerc a été officialisée par décret le 10 avril dernier et publiée au Journal officiel le lendemain. Ce dernier est donc nommé préfet hors-classe de la Seine-Saint-Denis et quitte actuellement ses fonctions à la préfecture de Nice. 

Arrivé en novembre 2016 dans la cité des Anges, Georges-François Leclerc sera donc resté deux ans et demi en poste. Une durée à peu près conforme à la moyenne : en effet, la mission d'un préfet s'étale généralement sur une période de trois à cinq ans sur un même territoire, bien que ces fonctionnaires soient nommés sur un temps indéterminé. Reste que le contexte de ce départ n'est pas anodin.  Le 23 mars dernier, en marge de "l'acte 19" des Gilets jaunes à Nice, une militante d'Attac, âgée de 73 ans, était sévèrement blessée. L'affaire Geneviève Legay, dans laquelle le procureur a tardivement reconnu l'implication d'un policier, a pris un autre tournant lorsque Mediapart a révélé que l'enquêtrice chargée de faire la lumière sur les faits n'était autre... que la compagne du commissaire en charge du maintien de l'ordre ce jour-là.  

Un départ dans l'ordre des choses, selon la Préfecture

Dès lors, le timing de ce départ préfectoral interroge. Pourtant, du côté de la préfecture des Alpes-Maritimes, on nous l'assure : l'affaire Legay n'entre "pas du tout" en ligne de compte. "La question est légitime venant de journalistes", nous dit-on, "mais nous vous assurons qu'il n'y a aucun lien entre cette affaire et le départ du préfet. Cette mutation est la voie normale pour les préfets. Il est resté deux ans et demi en poste, il a été nommé par décret ailleurs, il a rempli sa mission dans les Alpes-Maritimes".

Sur Twitter, le député LR et conseiller départemental des Alpes-Maritimes Eric Ciotti, a salué et remercié le travail effectué par le préfet "au service des Azuréens". 

"Le grand nettoyage" ?

Dans le département, une source policière indique également à LCI que ce départ était prévu et aucunement lié à l'affaire Legay. Mais l'avocat de la septuagénaire blessée n'est pas de cet avis. Contacté par LCI, maître Arié Alimi souligne : "Il y a des coïncidences qui ne trompent pas". Et d'ajouter : "Cela ne l'enlève rien au fait qu'il puisse s'agir d'une promotion, mais je note que cette décision tombe le 10 avril, juste après la plainte déposée par ma cliente contre la police et le préfet. Selon moi, il y a une conséquence directe entre cette mutation et l'affaire Legay. C'est le grand nettoyage."

L'avocat rappelle par ailleurs qu'une enquête préliminaire a été ouverte sur d'éventuelles infractions de la police aux frontières à Menton, au détriment de mineurs migrants isolés. Des infractions qui pourraient donc impliquer directement les services du désormais ex-Préfet des Alpes-Maritimes.

Quant à l'affaire Legay, celle-ci pourrait finalement être dépaysée dans une autre juridiction, après ces soupçons de conflits d'intérêts au sein de l'enquête. C'est en tout cas ce qu'a demandé le procureur général d'Aix-en-Provence auprès de la Cour de cassation, qui doit encore se prononcer.


Anaïs Condomines

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