INFO LCI - Paris : les crimes et délits attribués aux bandes ont augmenté de 58% en quatre ans

par William MOLINIE
Publié le 14 mars 2017 à 8h04, mis à jour le 14 mars 2017 à 8h21
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Source : Sujet JT LCI

ENQUÊTE – Les phénomènes de bandes sont en augmentation à Paris intra-muros. Les crimes et délits ont bondi de 58% entre 2012 et 2016. En revanche, les affrontements entre bandes rivales sont restés stables grâce à un suivi ténu de la problématique par les policiers.

Un regard de travers. Parfois une querelle de cœur. Un différend commercial ou simplement une cigarette refusée... L’origine des différends entre bandes parisiennes est souvent futile. Au point que les policiers qui enquêtent là-dessus évoquent une "guerre des boutons du XXIe siècle".  Sauf qu'en la matière, les conséquences sont toujours inquiétantes. 

Dernier fait dramatique en date : la mort d’un lycéen de 17 ans, poignardé fin janvier dans le 20e arrondissement au cours d’une altercation à quelques mètres de l’établissement scolaire. L’avocat du principal suspect, mis en examen pour assassinat, en est désormais convaincu. "Les faits s’inscrivent très clairement dans un phénomène de bandes rivales entre le 12e et le 20e arrondissement", assure Me Adrien Gabeaud auprès de LCI.

Selon nos informations, la cellule de suivi des bandes de la direction de la sécurité de proximité de l’agglomération parisienne (DSPAP) comptabilise actuellement 15 bandes actives à Paris intra-muros et 29 en petite couronne. Un nombre constant depuis la création en 2010 du "Plan anti-bandes" lancé dans chaque département. Si les affrontements entre groupes rivaux sont relativement stables, (51 en 2016), ce sont tous les délits connexes attribués aux phénomènes de bandes (attroupement armé, vols, agressions, incivilités) qui progressent constamment. De 101 faits recensés en 2012, on est passé à 159 en 2016, soit une augmentation de 58%.

Lycéen poignardé devant son lycée à Paris : un syndicat dénonce le manque de sécurité dans les établissementsSource : Sujet JT LCI
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4% des bagarres dans les transports en commun

Les analyses de cette cellule "anti-bandes", qui se réunit tous les deux mois pour mettre à jour ses données, sont ensuite utilisées pour orienter les patrouilles et prévenir les actes délictuels. Car 80% des phénomènes de bande se déroulent sur la voie publique, 9% aux abords des établissements scolaires – en hausse constante depuis quelques années –,  5,6% dans les centres commerciaux. Parmi les affrontements entre bandes, 4% des bagarres ont lieu dans les transports en commun. 

"Il suffit parfois d’envoyer une patrouille à la sortie du lycée pour dégonfler une situation. Et grâce aux caméras sur la voie publique, des vidéos-patrouilleurs peuvent suivre à distance les déplacements des jeunes", explique auprès de LCI le commissaire Bruno Authamayou, chef adjoint à la sous-direction de la police d’investigation territoriale.

Une grande majorité de mineurs

Les policiers le concèdent : le phénomène a sa part d’irrationalité. "Ça peut partir en un rien de temps. Pour quelque chose de très futile. Mais il y a en substance la défense d’un territoire, et le sentiment d’appartenance à un groupe", poursuit-il. Un phénomène difficile à contenir dans la mesure où 73% des auteurs impliqués sont des mineurs. Un chiffre stable depuis 2014, mais qui révèle un fort renouvellement  des membres. Un jeune reste deux ans, trois ans, maximum quatre, dans une bande. Avant de repartir vers une vie plus studieuse et rangée, ou de basculer vers une criminalité plus installée.

"En ce moment, par exemple, on constate l’apparition d’une nouvelle génération qui commet davantage de vols par effraction", détaille le commissaire Authamayou. Autre tendance, 92% des jeunes arrêtés par la police étaient l’année dernière détenteurs d’armes blanches ou par destination. Avec parfois des surprises : "Dans plusieurs dossiers, je me rends compte qu’ils ont des trottinettes en fer et qu’ils s’en servent pour se taper dessus", précise Me Gabeaud, avocat d’une dizaine d’individus impliqués dans des bagarres entre bandes violentes.

"La surenchère" des réseaux sociaux

S’il suffit qu’un membre croise le regard de celui d’une autre, en terrain adverse, pour qu’une bagarre éclate, les réseaux sociaux amplifient souvent l’hyperréactivité des adolescents. "Il va y avoir une surenchère. Une petite provocation sur Facebook va monter en escalade jusqu’à un point de rencontre défini à côté d’un établissement scolaire, à un arrêt de bus, où à la frontière entre deux arrondissements ou quartiers", poursuit l’avocat.

Si ce phénomène peut parfois noircir l’image d’un quartier et augmenter le sentiment d’insécurité, les bandes parisiennes n’ont rien à voir avec les groupes criminels américains . "Il n’y a pas de structure véritablement verticale. Il y a un noyau dur, autour duquel gravitent des éléments, mais il suffit parfois qu’un ou deux leaders partent en prison pour que la bande se mette en sommeil. Ça ne veut pas dire qu’elle ne va pas se réveiller un jour. Voilà pourquoi il faut surveiller de près cette problématique", estime Bruno Autamayou. Chaque année, à Paris et en petite couronne, ces bagarres entre bandes rivales font une centaine de blessés. 


William MOLINIE

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