Après la polémique consécutive à la diffusion d'images d'une course de karts dans la cour de la prison de Fresnes, le ministre de la Justice a demandé qu'une enquête administrative soit réalisée.Le directeur de la prison a notamment été entendu.Les conclusions ont été rendues ce mardi 23 août.
Après la polémique née à la suite de la diffusion de la vidéo "KohLantess", qui se déroulait dans la prison de Fresnes (Val-de-Marne), l'administration pénitentiaire et le ministère de la Justice tentent de tirer la situation au clair. Après une enquête administrative, les conclusions du rapport rappellent que "la volonté première du directeur de Fresnes, qui reconnaît avoir commis une erreur d'appréciation, était de réaliser une opération caritative basée sur l'effort et les valeurs du sport".
Si l'aval de l'administration et du ministère avait été donné, le rapport regrette néanmoins que le contenu détaillé des épreuves n'ait pas été donné. De ce fait, un meilleur encadrement des activités est demandé. Retour sur les conclusions de l'enquête.
Un projet non financé par l'administration pénitentiaire
Dans un premier point, le rapport explique que le projet a été présenté aux responsables de la prison de Fresnes fin juin 2022 et qu'après accord de tous les participants, dont les gardiens, l'organisation de l'événement a été poursuivie le long du mois de juillet. Le contenu des épreuves, dont la course de karting et le plongeon dans le bassin d'eau, était alors connu. Le coût de l'événement a par ailleurs été "intégralement pris en charge par l'association UNITESS", rappelle le rapport de l'administration pénitentiaire.
"L'administration pénitentiaire n'a pas financé le projet. L'établissement a simplement financé les prix remis aux termes des épreuves consistants en des dons modiques au profit des associations sélectionnées par les équipes", explique encore l'administration dans son enquête. En tout, ce sont 2700 euros qui ont été répartis pour les trois associations que représentaient les différentes équipes qui se sont affrontées lors du jeu, diffusé sur YouTube.
Des détenus dont le profil a été évalué au préalable
Dans le rapport, l'administration pénitentiaire revient sur le profil des détenus. En effet, les organisateurs de "KohLantess" ont exprimé leur souhaite de ne faire participer que des détenus condamnés à des peines légères. A posteriori, il est cependant avéré qu'un des participants était un détenu condamné pour des faits de viol en récidive. Néanmoins, le rapport explique que "son comportement en détention s'étant sensiblement amélioré depuis 18 mois, sa candidature a été validée".
La sélection des détenus ne pose par conséquent pas de problème à l'administration pénitentiaire. Celle-ci juge que l'évaluation par les équipes "correspond à un mode opératoire tout à fait classique s'agissant d'une activité socio-culturelle ou sportive organisée en détention".
Une hiérarchie informée partiellement et tardivement
Le principal problème pointé par l'enquête administrative reste le fait que la hiérarchie n'avait pas été prévenue plus en amont et de manière plus exhaustive. Le rapport explique ainsi que la direction interrégionale des services pénitentiaires de Paris n'était pas au courant "du contenu précis des modalités de l'événement".
Le 25 juillet, soit deux jours avant que la compétition se tienne, le directeur interrégional aurait par ailleurs fait part de sa désapprobation, sans connaître le contenu des épreuves. D'une part, parce qu'il avait été mis au courant trop tardivement, mais aussi parce que le concept du jeu lui semblait "inopportun". L'imminence du jeu a cependant rendu son annulation difficile, d'autant plus que le "niveau central" de l'administration, qui n'était pas non plus au courant des épreuves, ne s'y est pas opposé.
De même du côté de la chancellerie, où les autorisations ont été données, sans "aucun élément sur les détails de la manifestation sportive". Le rapport pointe ici un manque de précisions alors même qu'une "médiatisation nationale" de l'événement devait avoir lieu. "L'ampleur de l'événement a été découverte le jour même", regrette le rapport, qui souligne par ailleurs qu'Eric Dupond-Moretti ne pouvait pas avoir été mis au courant, comme celui-ci l'a affirmé à la suite de la polémique.
Vers un meilleur encadrement des activités socio-culturelles et sportives
La polémique consécutive à l'affaire conduit les auteurs de l'enquête à appeler à revoir "les process de validation de ce type de projet". Une note ou une circulaire est demandée afin "de reposer un cadre général". Ce que le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti a annoncé rapidement dans un tweet, mardi soir. Désormais, selon lui, les projets de réinsertion en prison devront "tous être soumis à une validation expresse de la direction de l'administration pénitentiaire".