PROCÈS - Il est soupçonné d’avoir été l’un des principaux recruteurs de jeunes djihadistes français : Mourad Farès, 35 ans, est jugé à partir de ce lundi 20 janvier à la cour d’assises de Paris. Lui-même parti en Syrie en 2013, il avait fini par quitter le pays moins d’un an après, pour rejoindre la Turquie.
Début 2014, Mourad Farès déclarait depuis la Syrie, dans une interview donnée au site Vice, qu’il n’était "pas près de rentrer en France". "Si je rentre demain, je suis parti pour quinze ou vingt ans de prison avec le dossier qu’ils ont sur moi", ajoutait-il. Pourtant, peu après avoir tenu ces propos, il quitte la Syrie. Presque six ans plus tard, à partir de ce lundi 20 janvier, cet homme considéré comme une ancienne figure du recrutement pour le jihad en Syrie, également accusé d’avoir dirigé là-bas un groupe de jeunes combattants francophones, comparaît devant les assises de Paris pour association de malfaiteurs terroriste criminelle, financement du terrorisme et direction d'un groupe terroriste.
Ces dernières années, le nom de ce Savoyard, originaire de Thonon-les-Bains, est apparu dans plusieurs dossiers de filières d'acheminement vers la Syrie. Entre autres, la filière de Lunel, mais Mourad Farès, 35 ans, est aussi soupçonné d'avoir orchestré le départ en décembre 2013 de dix jeunes du Bas-Rhin, surnommés les "10 de Strasbourg", dont Foued Mohamed-Aggad, l'un des futurs kamikazes du Bataclan.
Mourad Farès, décrit par ses proches comme quelqu’un d’intelligent et cultivé, se serait radicalisé en 2012. "L’élément déclencheur", a-t-il expliqué à Vice, a été la mort subite d’un cousin de 32 ans. Un décès qui l’a fait réfléchir à son passage sur Terre, et à la nécessité de remplir "[ses] obligations religieuses pour le paradis". Mourad Farès se met alors à pratiquer davantage. Très actif sur les réseaux sociaux, il commence aussi à faire la propagande du djihad. Les juges lui imputent l'organisation jusqu'à la mi-2013 de plusieurs réunions évoquant des départs en Syrie, en région parisienne, à Strasbourg ou Lyon.
Lui-même est parti en juillet 2013, traversant l'Europe en voiture avec trois comparses. Il avait reçu préalablement plusieurs virements bancaires, qui auraient pu selon les magistrats servir à financer son voyage. Lui les a justifiés en invoquant des collectes sur internet pour des personnes dans le besoin.
Automne 2013 : il quitte l'Etat islamique pour un autre groupe
A son arrivée en Syrie, Mourad Farès était allé à Alep, au quartier général de l'organisation terroriste Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL, devenue Etat islamique en 2014). Il a admis avoir suivi une formation sur le maniement des armes, mais nie avoir combattu, limitant son rôle à quelques surveillances.
Selon ses déclarations aux enquêteurs, il se serait "désolidarisé" de l'EIIL à l'automne 2013 et aurait quitté les rangs de l'organisation, dont il condamnait certaines méthodes. Avec d'autres Français, principalement originaires de Nice, il a ensuite intégré fin 2013 le groupe du Franco-Sénégalais Oumar Diaby, un important recruteur de djihadistes également connu sous le nom d'Omar Omsen, en train de se constituer dans le pays.
Pendant cette période, Mourad Farès aurait continué à aider de jeunes candidats francophones au djihad à entrer en Syrie, leur fournissant les contacts de passeurs ou en allant directement les chercher à la frontière. Il aurait incité d'autres à quitter l'EIIL pour rejoindre la brigade djihadiste d'Oumar Diaby.
Selon plusieurs témoins, interpellés à leur retour en France, Mourad Farès avait assuré l'intérim à la tête du groupe en l'absence de Diaby, parti au Sénégal. Il a toujours contesté toute fonction de dirigeant. Mourad Farès a déclaré avoir quitté le groupe d'Oumar Diaby - alors composé d'une centaine de djihadistes selon les juges antiterroristes - au retour de ce dernier en Syrie en mars 2014, pour cause de désaccord sur son affiliation à l'organisation djihadiste Front al-Nosra, l'ex-branche syrienne d'Al-Qaïda.
Repenti ?
S'il est acquis que Mourad Farès a quitté la Syrie en juillet 2014 et sollicité l'aide des autorités françaises à son arrivée en Turquie, les investigations n'ont pas permis d'établir avec certitude ses activités et les raisons de son départ.
Incarcéré depuis septembre 2014, Mourad Farès aurait adopté en détention une "posture de repenti" et abandonné toute velléité djihadiste. Dès son premier interrogatoire en France, il a ainsi assuré vouloir "collaborer à 100%".
L'un de ses ex-compagnons de voyage, Ala Eddine Benali, 25 ans, comparaît libre sous contrôle judiciaire devant les assises spéciales pour avoir tenté de rejoindre la Syrie. Il n'avait pu entrer en Turquie pour un problème de passeport. Deux autres hommes, Hachmi Hattabi et Bilel Ben Mimoun, arrivés avec Mourad Farès en Syrie et présumés morts, bien que toujours recherchés, seront jugés par défaut.
Le procès doit durer jusqu'au 24 janvier.
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