Le meurtrier de Shaïna, poignardée et brûlée vive à Creil (Oise) en 2019, a été condamné à 18 ans de réclusion criminelle.En colère, son frère demande au président de la République de protéger les jeunes femmes issues des quartiers populaires.
Un texte poignant. Yasin Hansye, le frère de Shaïna, 15 ans, poignardée et brûlée vive le 25 octobre 2019 à Creil (Oise), dans un cabanon à 500 mètres de chez elle, adresse ce vendredi 23 juin une lettre ouverte au président de la République. Il appelle le chef de l'État à rompre "le silence coupable" face à la situation "des filles de nos quartiers", et exprime sa "colère" après la condamnation de l'ex-petit ami de l'adolescente à 18 ans de réclusion.
"Je suis en colère (...) Une colère profonde, qui ne me quittera jamais", écrit le frère aîné de l'adolescente dans cette lettre, diffusée sur Twitter. "Ce que nous attendons de vous, monsieur le Président, et du Gouvernement, c'est que vous rompiez le silence coupable face à la situation des filles de nos quartiers. Ces soleils que la violence des hommes éclipse", ajoute-t-il.
Parce qu’il est trop tard pour Shaïna mais pas pour les autres filles de nos quartiers, lettre ouverte au Président de la République - @EmmanuelMacron @RomeIsabelle @MarleneSchiappa @E_DupondM pic.twitter.com/2CiQdL6aBq — Yasin Hansye (@moicestyasin) June 23, 2023
"Chaque jour, je me dis que j'aurais dû la venger"
Le ministère public et le prévenu dans cette affaire, l'ex-petit ami de la victime, n'ont pas fait appel de la peine prononcée le 10 juin dernier par la cour d'assises des mineurs de l'Oise, à savoir 18 ans de réclusion criminelle, la rendant définitive. Le jeune homme, âgé de 17 ans au moment des faits, a été condamné pour avoir attiré Shaïna, 15 ans, probablement enceinte de lui, dans un cabanon pour la poignarder puis la brûler vive.
"Il n'a pas avoué. Le verdict a été rendu. Il m'a nargué. Et personne n'a fait appel. Il ressortira de prison avant ses 35 ans au pire, mais sans doute bien avant", s'émeut Yasin Hansye. "Ma colère est intacte, mais plus ma confiance. Chaque jour, je me dis que j'aurais dû la venger, parce que la machine judiciaire était grippée, ce jour-là", poursuit le jeune homme.
Il dénonce également des dysfonctionnements lors de la plainte déposée par Shaïna pour "viol collectif", deux ans avant son assassinat. "À ce moment-là, nous croyions en la République", assure-t-il, mais "les médecins ont trouvé 'qu'elle se déshabillait facilement', la policière (...) a estimé 'qu'elle ne manifestait aucune émotion'". Dans ce premier dossier, quatre jeunes hommes ont été condamnés en appel à de la prison avec sursis pour "agressions sexuelles".
"Il n'est pas trop tard" pour "toutes ces adolescentes (...) de nos quartiers qui n'osent plus aimer, n'osent plus parler, effrayées à l'idée de finir comme ma sœur, parce que leurs agresseurs n'auront plus peur", écrit son frère.
Jeudi, l'avocate de la famille, Negar Haeri, avait déploré dans un communiqué que le parquet n'ait pas fait appel de cette peine très inférieure aux 30 ans de réclusion qu'il avait requis. "Les violences faites aux femmes demeurent une matière subsidiaire", a-t-elle regretté. En France, selon les chiffres officiels, une femme meurt tous les trois jours de la violence de son conjoint ou ex-conjoint.