Nouvelle requête pour Omar Raddad : cinq questions sur l'affaire

MM
Publié le 22 juin 2021 à 18h30

Source : Sujet TF1 Info

ÉNIGME JUDICIAIRE - Le jardinier marocain est toujours considéré par la justice française comme le meurtrier de Ghislaine Marchal. Retour sur plusieurs des mystères qui entourent ce dossier vieux de 30 ans.

Saura-t-on un jour qui a tué Ghislaine Marchal ? La justice acceptera-t-elle de rejuger Omar Raddad ? 30 ans après l'assassinat de la première, le second est toujours considéré par la justice comme son meurtrier. Alors, sa défense poursuit la riposte et déposera, jeudi 24 juin, une nouvelle requête en révision de son procès.

La justice, elle, tente de nouveau de faire la lumière sur ce dossier. Elle a ainsi repris les investigations en 2015. Mais plusieurs zones d'ombres demeurent, et pas des moindres.

À qui appartiennent les traces ADN ?

Elles sont au cœur de la requête que déposera, jeudi, l'avocate d'Omar Raddad, Me Sylvie Noachovitch : des traces ADN ont été découvertes en novembre 2015 sur deux portes et un chevron qui se trouvaient sur la scène du crime. C'est sur ces deux portes qu'avait été écrit "Omar m'a tuer" (sic) et "Omar m'a t". Ces quatre empreintes génétiques correspondant à quatre hommes non identifiés. Deux sont parfaitement exploitables et deux autres le sont partiellement.

Par ailleurs, d'après un rapport de l'expert Laurent Breniaux datant de 2019, mais rendu public par Le Monde ce lundi 21 juin, une trentaine de traces d'un ADN complet masculin n'appartenant pas au jardinier ont été trouvées dans l'une des inscriptions faites avec le sang de la victime.

Qui a écrit "Omar m'a tuer" ?

Pour la justice, les deux inscriptions accusant le jardinier avaient été écrites par Ghislaine Marchal le 23 juin 1991, jour de son meurtre. C'est d'ailleurs sur ce point spécifique que l'avocat de la partie civile, Me Henri Leclerc, avait construit son argumentaire. C'est aussi ce qu'avaient conclu des expertises, en août 1991.

Mais en octobre 2000, un nouveau rapport graphologique avait ôté toute certitude sur l'identité de l'auteur de l'inscription. En décembre de la même année, l'expertise avait révélé que la trace de main comportait du sang de Ghislaine Marchal, mais aussi du sang masculin. Puis en février 2001, l'expertise avait conclu que l'ADN masculin retrouvé n'était pas celui d'Omar Raddad.

Pourquoi Omar Raddad est-il libre s'il est toujours considéré comme coupable ?

Incarcéré dès sa mise en examen, le 27 juin 1991, Omar Raddad n'est jugé que trois ans plus tard. Le 2 février 1994, il est finalement condamné à 18 ans de réclusion criminelle pour homicide volontaire par la Cour d'assises des Alpes-Maritimes, à la suite d'un procès où même l'avocat des parties civiles, conclura à "une vérité que rien ne rend impossible".

Le 10 mai 1996, le président Jacques Chirac accorde, à la demande du roi du Maroc Hassan II, une grâce partielle au prévenu qui bénéficie donc, le 4 septembre 1998, d'une libération conditionnelle. À sa sortie de prison, il y a donc déjà passé plus de sept ans. Néanmoins, cette grâce ne vaut pas annulation de la condamnation et ne l'innocente pas. C'est d'ailleurs l'enjeu pour sa défense et sa famille : qu'Omar Raddad ne soit plus seulement libre, mais également innocent.

Qui croit toujours à la culpabilité d'Omar Raddad ?

Le Monde, qui a révélé, lundi 22 juin, le contenu du rapport d'un expert sur des traces ADN, s'est longuement penché sur l'affaire. Le quotidien donne la parole à plusieurs soutiens d'Omar Raddad, dont son fils Karim, persuadé de l'innocence de son père. Mais le journal rapporte aussi les propos de Me Henri Leclerc. Ce dernier estime, encore aujourd'hui, que les inscriptions attribuées à Ghislaine Marchal attestent de la culpabilité d'Omar Raddad. 

"Elle a le courage de l’accuser avant de mourir, comment aurait-elle pu se tromper ? C’est un peu comme un roman d’Agatha Christie, cette histoire, et les gens refusent que la clé de l’énigme soit aussi simple !" explique l'avocat. 

Sabine du Granrut, la nièce de Ghislaine Marchal est, elle aussi, avocate. Comme son confrère, elle reste persuadée que celui qui fut le jardinier de sa tante en est bien le meurtrier. "Omar lui a réclamé de l’argent pour payer le mouton de l’Aïd. Elle a refusé, elle a dû l’humilier, il l’a frappée sans vouloir la tuer, mais cela a dégénéré", dit-elle au Monde. Et de poursuivre : "Il ne peut pas accepter ce qu’il a fait parce qu’il ne l’a pas franchement voulu".

Quelles sont les autres hypothèses avancées ?

De la plus plausible à la plus folle, les hypothèses ont fleuri autour de l'affaire Omar Raddad. L'une des plus connues, révélée par Libération en 1994, concerne l'existence d'un "second Omar" qu'aurait connu Ghislaine Marchal. Après vérification des gendarmes, l'information n'est pas jugée pertinente.

L'année suivante, le quotidien marocain L'Opinion assure avoir recueilli le témoignage d'un ancien détenu de la prison de Clairvaux. Ce dernier affirme avoir partagé une cellule avec un homme se présentant comme le "véritable assassin de Mme Marchal". Selon ses dires, il aurait tenté de cambrioler la propriété de Ghislaine Marchal, l'ancienne employeuse de sa compagne, mais aurait été surpris durant son larcin. Il aurait alors tenté d'agencer la scène de crime pour attribuer son meurtre au jardinier, Omar Raddad.

Une autre théorie encore, celle du détective privé Marc Moreau, qui a travaillé sur l'affaire Raddad, repose sur un "crime commandité". Marc Moreau, qui a été condamné en diffamation à ce sujet, estimait que la femme de ménage de Ghislaine Marchal et son amant avaient pu planifier le meurtre.


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