Portiques de sécurité dans les gares : une idée compliquée à appliquer

Publié le 17 novembre 2015 à 20h22
Portiques de sécurité dans les gares : une idée compliquée à appliquer

SÉCURITÉ FERROVIAIRE - Il faut installer des portiques de sécurité dans les gares pour contrôler l'accès à "toutes les lignes internationales et tous les TGV", a plaidé mardi Ségolène Royal, quatre jours après les attentats qui ont ensanglanté Paris. Mais cette idée est pour l'heure loin d'être sur les rails.

La question s'était déjà posée après l'attaque avortée du Thalys, le tireur armé jusqu'aux dents ayant alors pu sans aucun problème monter à bord du train reliant Amsterdam à Paris. Elle revient sur le devant de la scène après les terribles attentats de vendredi. Va-t-on bientôt inspecter nos bagages aux rayons X et nous faire passer par des portiques de sécurité lorsque l'on prendra le train ? C'est ce qu'a réclamé mardi matin Ségolène Royal, ministre de tutelle des Transports, comme elle l'avait déjà fait fin août. Des contrôles similaires à ceux des aéroports, "cela se fait pour les trains internationaux (en réalité uniquement aujourd'hui pour les Eurostar entre la France et la Grande-Bretagne, ndlr) et je pense que cela doit se faire aussi pour les trains en France", a-t-elle déclaré sur iTÉLÉ. Mais comme à l'époque, l'idée apparaît compliquée.

Ségolène Royal ne parle pas de l'ensemble du réseau ferroviaire. "Toutes les lignes internationales doivent être couvertes, et tous les TGV", a-t-elle en effet précisé. Car, même si elle n'exclut pas que la mesure soit à terme étendue "vers d'autres trains, très fréquentés, aux heures de pointe", la ministre sait bien qu'une généralisation des portiques à tous les trains de banlieue et TER serait difficilement concevable. Le patron de la SNCF, Guillaume Pépy, l'avait lui-même dit après l'attaque du Thalys en soulignant que "la question d'étendre le système des aéroports aux gares" n'était pas à ses yeux "réaliste", le nombre de voyageurs qui circulent depuis les 3;000 gares françaises étant vingt fois supérieur à celui des aéroports. Chaque jour dans l'Hexagone en effet, 5 millions de personnes empruntent environ 15.000 trains. Parmi ceux-ci, le nombre de TGV en circulation n'est que de 800.

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"La guerre sera finie avec Daech qu'on n'aura pas mis en place le système"

Mais même en se limitant aux TGV et aux trains internationaux, la mise en place des portiques de sécurité serait compliquée. "Elle n'est pas impossible, puisqu'on le fait pour les Eurostar et que l'Espagne a mis en place un tel système après les attentats à la gare madrilène d'Atocha en 2004. Mais cela coûterait très cher et prendrait beaucoup de temps", estime auprès de metronews l'économiste spécialiste des transports Marc Ivaldi. Déjà, pointe-t-il, "pour les trains internationaux, cela suppose une coopération avec les autres pays : si les gares restent ouvertes en Belgique ou aux Pays-Bas, cela ne sert par exemple à rien d'installer en France des portiques pour les Thalys". De la même manière, une sécurisation de l'ensemble des TGV implique nécessairement une installation de portiques dans toutes les gares de France où il s'arrête.

Un dispositif technique qui aurait un coût certain, tout comme le personnel qu'il faudrait y dédier. Mais Marc Ivaldi souligne surtout "les coûts indirects" qu'il engendrerait : "Ce sont des équipements fixes, donc cela veut dire que les rames de TGV doivent tout le temps arriver au même endroit. Si vous avez plusieurs TGV qui arrivent en même temps, il vous faut deux, trois quais uniquement dédiés à cela. Cela prendrait donc de la place dans les gares et cela rendrait la gestion du trafic extrêmement compliquée, avec un coût que personne ne peut chiffrer aujourd'hui".

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La SNCF, à qui Ségolène Royal avait demandé il y deux mois d'étudier la faisabilité de tels dispositifs, devrait bientôt pouvoir le faire : le groupe doit remettre ses conclusions à la ministre la semaine prochaine, et un porte-parole a annoncé mardi qu'une expérimentation serait lancée en 2016 dans une grande gare parisienne. "Avec cette expérimentation, la SNCF botte en touche, estime Marc Ivaldi : la guerre sera finie avec Daech qu'on n'aura pas mis en place le système. "S'il juge qu'il est "bien de commencer à réfléchir aux portiques", le chercheur à l'Institut d'économie industrielle de Toulouse souligne que "c'est maintenant qu'on a besoin de sécurité", et pose la question de celle des passagers des trains de banlieues et RER ("2. 800.000 voyageurs par jour en Île-de-France, contre seulement 700.000 pour tous les TGV"). Il préfère donc des mesures immédiates : "plus de vidéo-surveillance", "des contrôles aléatoires dans le gares", "donner la possibilité aux agents de sécurité de la SNCF de contrôler les cartes d'identité"...


Gilles DANIEL

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