PRÉVENU - Auditionné pour la première fois dans ce procès, Nicolas Sarkozy a nié fermement son implication dans la gestion des dépenses excessives de sa campagne de 2012. Et adressé quelques piques à ses anciens adversaires politiques, à commencer par François Hollande.
Nicolas Sarkozy était attendu de pied ferme ce mardi 15 juin au tribunal correctionnel de Paris. Et pour cause, l’ancien président s’est rendu au procès Bygmalion pour la première fois en quatre semaines afin d’y être auditionné. Toute l’après-midi, ce dernier s’est défendu de toute implication dans la gestion des dépenses excessives de la campagne présidentielle de 2012 –qu’il a perdue face à François Hollande- et a laissé transparaitre sa colère à plusieurs reprises.
"Je n'ai jamais entendu parler de Bygmalion"
Jugé pour "financement illégal de campagne", Nicolas Sarkozy a dû répondre à des questions précises de la part de la présidente du tribunal et des parties civiles. "Qui, quand, quoi, comment ?", a d’ailleurs débuté la présidente Caroline Viguier. "Je vais vous dire les choses clairement. Je n’ai jamais entendu parler de Bygmalion", a affirmé le prévenu, se montrant offensif et répétant à l’envie son statut de l’époque. "Soit je suis à l’Elysée à faire mon travail de président, soit je suis sur les routes", a poursuivi Nicolas Sarkozy, jouant sur l’image d’un président aux manettes et non à la tête de son parti et de l’organisation de sa campagne via la société Bygmalion. "Je ne vérifie pas les factures. Parce que si j’en vérifie une, je les vérifie toutes. (…) Je n’ai pas la mémoire de tous les meetings, j’en ai fait une quantité. Ma campagne de 2012, je n’en ai pas fait plus qu’en 2007 (sa première campagne présidentielle, ndlr). Si j’ai fait autant de meetings qu’en 2007, il n’y a pas de raison que cela coûte le double !"
Nicolas Sarkozy a d’ailleurs rejeté l’idée que ses meetings étaient plus grandiloquents que ceux de ses anciens adversaires, comme celui de Villepinte jugé "grandiose" par la présidente, y voyant là "une fable pour justifier des fausses factures". "Comment se fait-il qu’il n’y ait pas un article avant 2014 sur le coût de ma campagne ou sur le côté pharaonique de mes meetings ?", s’est-il insurgé. L’ancien président a ensuite nié avoir été "imprudent ou négligeant" et contesté "que les fausses factures aient servi à financer (sa) campagne" : "Je ne vois pas où peut être le doublement des sommes, personne ne peut le justifier. Je ne conteste pas les fausses factures. Je conteste que cet argent ait servi à abonder ma campagne." Pour rappel, la campagne électorale de l’ancien candidat UMP a coûté 42,8 millions d’euros, soit quasiment le double du plafond de dépenses autorisées par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP).
Des tacles à Hollande et Copé
S’exprimant avec agitation, ce qui lui vaudra d’être recadré plusieurs fois par la présidente, Nicolas Sarkozy s’en est pris directement à d’anciens adversaires politiques par quelques phrases bien senties. En expliquant que sa priorité fut, à un moment, de "rentrer en campagne", ce dernier a par exemple déclaré : "Tout le monde se doute que le président sortant va être candidat. Tout le monde n’est pas M. Hollande". Une référence à la décision de François Hollande de ne pas se présenter à sa réélection en 2017 pour cause d’impopularité. S’emportant un peu plus tard, Nicolas Sarkozy a également convoqué le souvenir de Jacques Chirac ou d’Edouard Balladur, comme un argument d’autorité : "J’ai jamais vu Chirac viser une facture ! J’ai jamais vu Balladur viser une facture ! Vous imaginez M. Hollande à l’Elysée en train de viser une facture avec M. Sapin !"
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Profitant de cette audition pour régler quelques comptes, l’ancien président a aussi adressé un tacle à Jean-François Copé, président de l’UMP en 2012 et avec lequel il n'entretient pas de bons rapports : "J'ai lu que Jean-François Copé ne prenait pas le micro pour ne pas me faire de l'ombre. Je ne suis pas sûr que j’aurais été gêné par ses discours…" Dans ce procès qui doit durer jusqu’au 22 juin, Nicolas Sarkozy encourt un an d’emprisonnement et 3750 euros d’amende.