Procès Mila : "Plus nombreux on sera, plus on sera puissants face à la menace et au harcèlement", déclare la victime

Publié le 3 juin 2021 à 19h56, mis à jour le 4 juin 2021 à 12h28
Procès Mila : "Plus nombreux on sera, plus on sera puissants face à la menace et au harcèlement", déclare la victime

JUSTICE - Le procès de 13 personnes, jugées pour avoir cyberharcelé l'adolescente Mila, s'est ouvert jeudi 3 juin devant le tribunal correctionnel de Paris. Le fond devrait être abordé les 21 et 22 juin, après que de questions prioritaires de constitutionnalité notamment ont été déposées.

Elle est venue un peu avant le début de l'audience, vêtue d'un chemisier rouge vif, d'un pantalon noir, les cheveux blonds rasés sur les côtés, une queue de cheval courte sur la tête et les yeux charbonneux. Escortée par des policiers qui la protègent en permanence, entourée par ses avocats Me Richard Malka et Me Lorraine Gay,  la jeune Mila, 18 ans, a fait face pour la première fois à quelques-unes des centaines de personnes qui lui ont adressé à l'automne 2020 des messages ultraviolents par mail ou via les réseaux sociaux ce, après que la jeune femme a posté une nouvelle vidéo polémique sur l'islam. 

Sur les 13 prévenus hommes et des femmes âgés de 18 à 35 ans qui doivent être jugés dans cette affaire pour "harcèlement en ligne", "menaces de mort" pour certains et menace de crime pour l'un, huit étaient présents à l'audience. En leur rappelant les faits qui leur sont aujourd'hui reprochés, le président Michael Humbert a sobrement lu les messages qui leur valent d'être sur le banc des prévenus. "Va bien te faire fourrer sombre pute. Je me ferai un plaisir de lacérer ton corps avec mon plus beau couteau...", "La Mila elle continuera jusqu'à ce que quelqu'un la trouve et la crève, c'est tout ce qu'elle mérite et tous ceux qui défendent Mila méritent de crever à leur tour Fuck Mila", " Kalash, famas, 9mm Uzi et P38, les armes sont payantes, mais les rafales sont gratuites", "C'est quand que tu vas fermer ta gueule grosse pute, c'est quand que tu te suicides grosse pute. C'est quand qu'un bus percute ta daronne. Je vais te faire une Samuel Paty". L'effroi gagne la salle tandis que les prévenus font profil bas. 

QPC, demande de nullité et audience reportée

Puis sont venues les demandes de renvoi des avocats de la défense, les demandes de d'annulation de gardes à vue notamment et les deux questions prioritaires de constitutionnalité déposées par Me Juan Branco qui défend l'un des 13 prévenus. Ces questions portent sur le délit de harcèlement en ligne, créé par la loi de Marlène Schiappa en 2018, et qui vaut aux 13 jeunes hommes et femmes d'être renvoyés en correctionnelle. 

"Après avoir échangé, j'ai pu constater qu'il n'y avait aucune vérité évidente qui se dégageait.Nous allons mettre en délibéré la décision de transmettre ou pas les QPC soulevées", a indiqué le président après une suspension d'audience. Le tribunal se prononcera donc le 21 juin à 9 heures sur la transmission ou non à la Cour de cassation de ces QPC. S'il ne faisait pas droit à la demande de la défense, le procès se poursuivrait, avec l'examen du fond de l'affaire sur deux jours, les 21 et 22 juin, a précisé  le président Michaël Humbert avant de lever l'audience.

"La peur change de camp"

Mila qui n'a pas pris la parole avant l'audience a dit quelques mots aux journalistes avant de repartir.  "Il n'y a pas d'anonymat. À partir du moment où on commet un crime sur internet, on peut être recherché, on peut être retrouvé et on peut être jugé devant un tribunal", dit-elle. Avant d'ajouter :"C'est pour cela qu'on est là aujourd'hui. Et c'est pour cela qu'il est temps que la peut change de camp. Il est temps de le réaliser, il est temps de le dire : la peur change de camp. Et plus nombreux on sera à l'ouvrir, plus on sera fort, plus on sera puissant face à la menace et au harcèlement qui ne fera qu'empirer si on reste sans rien faire, si on continue à se soumettre".

Puis Mila a quitté le tribunal judiciaire, escortée par les policiers et entourée de ses conseils. Elle n'a pas souhaité décrire ce qu'elle avait ressenti en voyant à quelques mètres d'elle ses harceleurs présumés. 


Aurélie SARROT

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