Au procès du 13-Novembre : "C'était juste prendre la revanche parce qu'ils avaient tué des enfants"

Publié le 25 janvier 2022 à 21h48
Au procès du 13-Novembre : "C'était juste prendre la revanche parce qu'ils avaient tué des enfants"

L'interrogatoire de l'accusé pakistanais Muhammad Usman a eu lieu ce mardi.
Il est soupçonné d'avoir voulu participer aux attaques en France.
Il encourt 20 ans de réclusion criminelle pour "participation à une association de malfaiteurs terroristes".

Crâne rasé, masque FFP2, polaire zippée noire, le Pakistanais Muhammad Usman a été interrogé ce mardi à la reprise du procès des attentats du 13-Novembre, après une suspension de 10 jours suite au test positif de l'un de ses voisins de box, Ali El Haddad Asufi.

Muhammad Usman est jugé pour "participation à une association de malfaiteurs terroriste criminelle", infraction pour laquelle il encourt 20 ans de réclusion criminelle. Selon les enquêteurs, il aurait dû faire partie du commando des attaques du 13 novembre 2015 mais son arrestation en Grèce en octobre 2015 a modifié ses plans. 

"J'étais musulman normal"

Comment ce Pakistanais qui vivait avec sa mère et ses quatre frères et sœur s'est-il retrouvé sur zone puis missionné pour un attentat suicide en France ? "Après mes études coranique dans une madrasa, j'ai commencé à chercher du travail. J'ai rencontré une personne sur internet. Elle m'a dit que c'est comme ça qu'on pratique l'islam", explique l'accusé tantôt avec l'aide d'une traductrice, tantôt en français. Selon lui, cet Internaute qu'il surnomme Abou Obeida lui a donné des codes et qu'il a pu ainsi "accéder à des livres sur le djihad" notamment.  Il maintient qu'il n'a avant cela "jamais" passé une dizaine d'années au sein d'un groupe djihadiste pakistanais proche d'Al-Qaida, comme l'ont assuré les services de renseignement de son pays. "C'est faux ", insiste-t-il.

Le président lui demande pourquoi il a écouté cet Abou Obeida qu'il ne connaissait pas. "J'étais un musulman normal et lui il avait le don de faire tourner les gens. Il m'a dit :'T'es un musulman du coup tu dois faire ça, aller au sham'". Usman obéit. 

Il se retrouve alors en Irak et en Syrie. Là-bas il prétend n'avoir fait qu'aller à la mosquée et lire le Coran. Il concède aussi "deux jours d'entraînement au tir à la Kalachnikov".  Le président lui rappelle ce qu'il avait déclaré au cours d'un interrogatoire au sujet des règles de l'Etat islamique :"Ce que j'ai pu voir là-bas, c'est l'Islam qui fonctionnait, le bon Islam. Pour un adultère, la sanction est la lapidation. Les homosexuels, on les monte au sixième étage et on les jette dans le vide. On coupe la main des voleurs. J'ai retrouvé là-bas toute la pureté de l'Islam originel". Il prétend ce jour n'avoir pas vu cela "de ses propres yeux" mais "dans des vidéos". 

"C'était juste prendre la revanche"

Sur zone, Muhammad Usman rencontre aussi Abou Ahmad (Oussama Atar, commanditaire des attentats) et par son biais, les deux Irakiens Mohammad Al-Mahmod et Ahmad Al-Mohammad, futur kamikaze du Stade de France, et Adel Haddadi, autre accusé dans le box. Les quatre se voient confier une mission pour une mission pour une "action violente en Europe". 

Pourquoi a-t-il accepté ? "J'ai regardé quelques vidéos. On voyait les avions français qui bombardaient, les enfants en train de brûler (…) Tout le monde avait peur dans ces vidéos, tout le monde était horrifié (…) Je me suis dit si eux faisaient ça pourquoi nous ne pouvions pas le faire, prendre la revanche."

"L'action violente, c'était quoi ?" questionne le président. "Je savais qu'il y aurait un attentat. C'était juste prendre la revanche parce qu'ils avaient tué les enfants. Mais je ne savais pas comment. Quand j'ai vu tout ça (les bombardements sur les enfants innocents) j'ai accepté", répond l'accusé

"J'ai abandonné la mission"

Adel Haddadi, Muhammad Usman et les deux Irakiens prennent la route vers la France munis de faux-papiers. Les deux premiers seront arrêtés sur l'île de Kos début octobre 2015 et placés en détention. Les deux autres se feront exploser le 13 novembre pendant le match France-Allemagne. 

À leur sortie de détention Adel Haddadi et Muhammad Usman poursuivront leur route jusqu'en Autriche, où ils seront arrêtés à Salzbourg le 10 décembre 2015, un mois après les attentats dans sur le sol français.  Muhammad Usman soutient que quand il a su ce qu'il s'était passé le 13 novembre, il a "renoncé" à son action violente et a souhaité rentrer au Pakistan. Il n'explique pas vraiment pourquoi il ne l'a pas fait.  "Si j'avais su pour cet attentat je ne serais jamais venu.  Je savais qu'il y allait y avoir un attentat, mais je ne savais pas que ce serait de cette ampleur. J'ai été surpris par ce grand attentat, j'ai abandonné la mission", assure-t-il. "C'est quoi un grand attentat par rapport à un petit ? Le nombre de morts, de cibles, de blessés ?" demande le président.  "Oui", répond Muhammad Usman. "J'ose à peine cette question... Jusqu'à quel nombre de morts auriez-vous accepté cette mission?", poursuit le président. L'accusé élude et répète encore : "Je savais pas comment ça allait se passer, comment j'allais attaquer, je savais rien..."

Et quand Me Laura Costes, avocate de partie civile lui demande s'il condamne les attentats survenus en France, il répond : "C'est vraiment triste ces attentats, c'est une catastrophe". 


Aurélie SARROT

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