Procès du viol du 36 quai des Orfèvres : les policiers condamnés à 7 ans de prison ferme, la défense va faire appel

Publié le 31 janvier 2019 à 21h43, mis à jour le 31 janvier 2019 à 21h53
Procès du viol du 36 quai des Orfèvres : les policiers condamnés à 7 ans de prison ferme, la défense va faire appel
Source : BERTRAND GUAY / AFP

JUSTICE - Le verdict est tombé ce jeudi dans le cadre du procès de Nicolas R., 49 ans, et Antoine Q., 40 ans, anciens de la BRI, jugés pour le viol d'Emily S., touriste canadienne, en avril 2014 dans les locaux du 36 quai des Orfèvres : les deux policiers ont été condamnés à sept années d'emprisonnement par la cour d'assises de Paris et 20.000 euros de dommages et intérêts.

Après deux semaines et demi de procès, après des audiences parfois compliquées, après plus de huit heures de délibéré, le verdict est tombé. Ce jeudi, Nicolas R. et Antoine Q. deux policiers, anciens de la BRI, jugés pour le viol d'Emily S., touriste canadienne, en avril 2014 dans les locaux du 36 quai des Orfèvres ont été condamnés  à sept années d'emprisonnement par la cour d'assises de Paris . "Ils ont été reconnus coupables du viol en réunion d'Emily S.", a déclaré le président Stéphane Duchemin.

Pour "viol en réunion", Antoine Q. et Nicolas R. encouraient jusqu'à 20 ans de réclusion criminelle. L'avocat général Philippe Courroye avait requis mercredi 7 ans d'emprisonnement. La cour a suivi ses réquisitions.  

"Dépositions évolutives, fantaisistes et peu crédibles"

La cour a notamment été "convaincue" par "les déclarations constantes de la jeune femme" et par "les éléments scientifiques et techniques", dont les expertises ADN et les analyses de la téléphonie, a indiqué le président. Elle a également considéré "la particulière gravité des faits" commis à l'encontre d'une jeune femme sous l'influence de l'alcool et le "lieu de commission des faits", le siège de la police judiciaire. 

"Il résulte en effet de l’ensemble de ces éléments que les deux accusés ont eu avec la partie civile des relations sexuelles non pas comme ils l’ont prétendu au fil de leurs dépositions évolutives, fantaisistes et peu crédibles dans son bureau pour l’un et dans une voiture pour l’autre, mais bien au sein de leurs locaux et en réunion ainsi que la partie civile, qui n’y a pas consenti, l’a rapporté", a lu le président. "Les très nombreux éléments soulignés par les accusés dans le cadre de leur défense pour inviter la Cour à considérer que la partie civile mentait ou était trop imprécise sont apparus périphériques et inopérants quant à l’examen des éléments recueillis à leur encontre." 

Outre la peine d'emprisonnement, la cour a ordonné l'inscription des deux ex-policiers de la prestigieuse BRI, (brigade de recherche et d'intervention), au fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (FIJAIS). Les deux policiers devront par ailleurs verser 20.000 euros à la victime de dommages et intérêts.

Menottés, conduits au dépôt et en maison d'arrêt

A l'énoncé du verdict, un "oh" de stupéfaction s'est fait entendre dans la salle où de nombreux collègues des deux policiers s'étaient retrouvés. Les accusés se sont effondrés. Emily S. est, elle, restée immobile.  

Nicolas R. et Antoine Q. ont ensuite été menottés par les gendarmes sous les yeux des policiers. Ils ont été conduits dans le box des accusés. Ils devaient ensuite rejoindre le dépôt, puis êtes emmenés en maison d'arrêt pour y passer leur première nuit en prison. Leurs avocats ignoraient où ils devaient passer la nuit... 

"C'est une décision juste qui a été rendue ce soir. Enfin, en France, on considère qu'une femme qui a été violée n'a pas à se justifier sur sa vie privée. La cour a considéré qu'Emily S. n'avait pas menti, qu'elle n'était pas mythomane et elle a fondé sa décision sur des éléments objectifs de ce dossier qui ne sont pas la parole d'une personne contre la parole des accusés", a réagi Me Obadia, avocate d'Emily S. après l'audience. "Emily S. est très émue et soulagée." 

"La cour a considéré que comme toute parole, pour la prendre en considération, il faut des éléments objectifs", a renchéri Me Stasi, lui aussi conseil d'Emily S. "Tous les éléments objectifs de ce dossier : les expertises ADN, les expertises psychologiques, les écoutes téléphoniques, l'analyse de l'effacement de preuves par les accusés, tous ces éléments objectifs venaient mettre un doute sur la version des accusés mais surtout confirmer celle d'Emily S. C'est à partir de ces éléments objectifs que la cour a condamné ces deux hommes. Il n'y a jamais eu de consentement." 

Les avocats de la défense vont faire appel

"C'est une erreur judiciaire. Nous allons faire appel dès demain et on débattra à nouveau de ce dossier dans un climat beaucoup plus serein, je l'espère, beaucoup plus honnête et on verra ce qu'il se passera par la suite", a fait savoir Me Compoint, avocate d'Antoine Q. "Je ne sais pas ce qui a fait basculer les jurés en revanche je sais ce qu'est une justice partiale. Je ne suis pas fière de la justice qui a été menée pendant ces débats. Je ne suis pas fière de ce qu'a fait l'institution judiciaire." 

"Ces deux innocents n'ont pas leur place en prison et ce soir ils dorment en prison", s'est indigné Me Schapira, avocat de Nicolas R. "Nous ferons tous les trois, Me Anne-Laure Compoint, Me Marion Grégoire et moi-même, appel dès demain matin. Nous ferons une demande de remise en liberté. On se battra et on gagnera parce qu'en France il y a une justice." 

Il y aura donc, dans l'affaire dite du viol du 36, un procès en appel.


Aurélie SARROT

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