Procès Junca : le chasseur de Cabidos nie avoir démembré le corps de l'enfant

Publié le 8 juin 2016 à 20h29
Procès Junca : le chasseur de Cabidos nie avoir démembré le corps de l'enfant

COMPTE-RENDU - Cinq ans après la mort d'Alexandre Junca, 13 ans, dont le corps démembré a été retrouvé dans le Gave, trois hommes et une femme sont jugés devant la cour d'assises de Pau. Au deuxième jour du procès, Claude Ducos a été interrogé par la cour durant de longues heures. Bousculé et mis face à ses contradictions, le chasseur de Cabidos n'a rien lâché, niant en bloc.

Il passe la parole à l’avocat général, s’enfonce dans le siège sur lequel il se tenait droit, et se frotte les yeux. Le président Francis Bobille est fatigué. Après de longues heures d’un interrogatoire serré, Claude Ducos a épuisé ses contradicteurs mercredi matin. Le chasseur de Cabidos, soupçonné d’avoir découpé le corps d’Alexandre Junca, tient bon.

Quand il se raconte, l’homme de 76 ans à la chemisette jaune et aux fines lunettes vissées sur un grand nez roule les "r" en avalant quelques mots. De son enfance rurale dans une fratrie de huit, il dit du "bien". Comme de la guerre d’Algérie. "J’étais au régiment d’artillerie", explique-t-il dès la reprise du procès. "Vous êtes le premier homme qui garde un bon souvenir de l’Algérie", commente le président. Claude Ducos, ceinture remontée au-dessus du nombril, marmonne. Certes, il a "participé à des embuscades". "Vous êtes allé au feu et vous n’avez même pas vu de cadavre ? C’est aussi la première fois que j’entends ça", poursuit le président, qui feint la surprise. On sent l’ancien électricien des voies ferrées un peu gêné. Mais pas vraiment déstabilisé.

"Il me faisait plaisir, je lui donnais la pièce"

"Vous avez des vrais amis à qui vous dites tout ?" l’interroge-t-on. "Ma sexualité, je ne l’ai jamais dévoilée", anticipe l’accusé. "A la campagne, ce n’était pas simple de vivre ça. Le regard des gens…", déroule-t-il. Alors, c’est à l’abri de ceux qui auraient pu le juger qu’il a vécu cette homosexualité refoulée. Et a commencé à fréquenter le milieu marginal palois. De Mickaël Baehrel à qui "il donnait la pièce" contre des fellations, il dit : "On n’a jamais fait de sexualité, il m’a juste fait des fellations (sic)". Chahuté par le président, Claude Ducos finit par admettre qu’ils étaient proches. "Peut-on retenir que vous étiez amoureux ?" - "Je n’appelle pas ça amoureux, c’était une amitié profonde".

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A l’écouter et à le regarder, on se demande ce que Claude Ducos fait là, assis à côté des trois autres accusés un peu paumés. L’enquêteur de la police judiciaire vient nous le rappeler. L’étude de sa téléphonie a révélé que Baehrel, accusé d’avoir asséné les coups mortels à l’enfant de 13 ans le soir du 4 juin 2011, avait essayé de le joindre à plusieurs reprises la nuit du 5. "Je n’ai pas écouté ces messages", avait pourtant juré l’intéressé dans la matinée. Le retraité a consulté son répondeur vers "6 heures du matin durant 55 secondes", affirme l’enquêteur dans l’après-midi. Ducos bredouille.

Le policier certifie aussi que Baehrel et Ducos se sont retrouvés quelques heures plus tard près d’une cuvette au nord du Gave. "Ce lieu est au cœur de l’enquête", rappelle l’enquêteur. C’est là où le corps démembré d’Alexandre a été découvert. "C’est totalement faux, je ne suis pas allé dans cette cuvette", commente l’intéressé. "La téléphonie, c’est technique, ce n’est pas de l’interprétation",  réplique le policier. 

Chasse et éviscération

Au sujet des véhicules qu’il a vendus ou fait détruire, et qui, selon Baehrel, auraient servi au transport du corps, Claude Ducos, le dur d’oreille, a maintenant des trous de mémoires. La courroie de distribution aurait cassé, une autre ne marchait plus… A défaut d’explications techniques convaincantes, le président glisse habilement sur la grande passion de l’accusé, la chasse. "Vous savez pourquoi on enlève les viscères sur un animal chassé ?" finit-il par questionner, laissant présager la rudesse des futurs débats. "Non", répond le chasseur. "Pour ne pas laisser pourrir la viande, pour ne pas qu’il dégage une odeur pestilentielle" - "Vous ne le saviez pas ?" - "Non", répète l’accusé qui s’enferme dans le déni. "Indépendamment de la découpe de l’enfant, ce qui est étonnant, c’est qu’on n’a pas trouvé ses viscères, il manque 20% du corps", poursuit le président. Le public a le coupe soufflé.

"Toute personne qui pratique la chasse sait qu’il faut éviscérer le gibier", renchérit l’enquêteur pour qui seul un homme "réfléchi" comme Ducos peut se débarrasser d’un corps. Et l’ancien amant, Baehrel, de l'accabler : "Je pense qu’il a honte de ce qu’il a fait et qu’il ne veut pas le reconnaître". Découper un enfant, "c’est pas pensable, c’est affreux, ça me choque ! (…) Je n’ai jamais vu cet enfant, ni vivant, ni mort", jure le chasseur de Cabidos. Un "menteur !" s’échappe du public. Un nouvel enquêteur appelé à la barre décrit également l’accusé comme "un gros menteur". Il est 20h30, la salle surchargée de monde suffoque. L’interrogatoire se poursuit. Claude Ducos, qui encourt trois ans de prison, continue de s’embourber, mais ne chute toujours pas.

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La rédaction de TF1info

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