Trois mois après les attentats, que sont devenus les cadavres des terroristes ?

par William MOLINIE
Publié le 12 février 2016 à 15h53
Trois mois après les attentats, que sont devenus les cadavres des terroristes ?

ENQUÊTE - Le sac de nœuds des enterrements des terroristes n’est toujours pas démêlé. Un deuxième terroriste, Omar Ismaïl Mostefaï, a été enterré ce vendredi matin à Thiais. La justice dit avoir délivré six permis d’inhumer sur les dix corps à "gérer". Mais seuls deux enterrements ont eu lieu, trois mois après les attentats. Quid des quatre autres ? Eléments de réponses.

Un deuxième terroriste enterré... trois mois après les attentats. Omar Ismaïl Mostefaï, tué pendant l’assaut de la BRI au Bataclan, a été inhumé dans une tombe anonyme ce vendredi matin en toute discrétion dans le carré musulman de Thiais (Val-de-Marne), précise à metronews une source proche, confirmant une information de l'AFP. "L'autorisation de la Ville de Paris a été délivrée hier soir. L'enterrement a eu lieu tôt ce matin en présence de la famille."

Quatre autres corps à disposition des familles

Sur les dix corps que les autorités françaises doivent "gérer", huit ont encore un avenir incertain. Les lieux de dépouilles ne sont toujours pas fixés pour quatre d'entre eux alors que les permis d'inhumer ont été accordés par les autorités judiciaires. Ces autorisations, qui ouvrent aux familles le droit à récupérer les corps des défunts, concernent Brahim Abdeslam, qui s’est fait exploser au Comptoir Voltaire, Bilal Hadfi, un des kamikazes du Stade de France, Abdelhamid Abaaoud, tué pendant l’assaut du Raid à Saint-Denis ainsi que sa cousine, Hasna Aït Boulhacen, décédée elle aussi dans l’appartement.

Selon nos informations, ces quatre corps pourront être incinérés puisque aucune interdiction de crémation n'a été formulée. Une disposition qui peut être prise par la justice dans des affaires criminelles. Cela permet au juge, en cas de découverte ou de rebondissement majeur même des dizaines d’années après, de pouvoir exhumer les corps pour faire de nouvelles expertises. Car en cas d’incinération, le feu fait à jamais disparaître toute chance de prélever de l’ADN ou d’examiner les corps. Mais les magistrats antiterroristes en charge de l’enquête sur les attentats du 13 novembre n'en ont pas fait la demande, considérant que tous les prélèvements et expertises possibles avaient été réalisés sur ces six dépouilles.

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Seul Amimour a été enterré

Pour les quatre autres, la justice préfère, pour le moment, les laisser à disposition des médecins légistes. Les deux kamikazes du Stade de France aux faux passeports syriens, enregistrés parmi les migrants passés par la Grèce sous les noms d’Ahmad Al-Mohammad et de Mohammad Al-Mahmod, n’ont pas encore été formellement identifiés. Ce qui explique que la justice n’ait pas délivré de permis d’inhumer. Quant aux dépouilles de Foued Mohamed-Aggad, un des trois assaillants du bataclan, et de Chakib Akrouh, mort lors de l’assaut de Saint-Denis et suspecté d’être le troisième homme du commando des terrasses, elles resteront sous le contrôle des juges "le temps que l’enquête l’exige, des expertises ADN étant toujours en cours", précise une source judiciaire contactée par metronews.

Outre Omar Ismaïl Mostefaï, seul Samy Amimour a quitté les frigos de l'institut médico-légal (IML) de Paris pour rejoindre un caveau. Il a été enterré le 24 décembre dans le carré musulman du cimetière intercommunal situé à La Courneuve. Parmi les quatre autres corps désormais à la disposition des familles, celui d’Hasna Aït Boulahcen, considérée comme une des terroristes par les autorités mais victime par son avocat, fait l’objet de difficultés avec les autorités marocaines. "Les démarches sont longues. Le Maroc doit prendre ses responsabilités", commente auprès de metronews, l’avocat de sa famille, Fabien Ndoumou. Selon RTL , la famille de Bilal Hadfi aurait elle aussi entamé des démarches auprès des autorités marocaines pour l’enterrer dans le royaume. "Nous n’avons eu aucune demande officielle, ni le moindre début de procédure de la part des familles de terroristes", indique pourtant catégoriquement auprès de metronews une source au Consulat général du Royaume du Maroc à Villemonble, territorialement compétent pour "gérer" les terroristes morts à Saint-Denis dont les familles voudraient rapatrier les corps au Maroc. Côté Belgique aussi, des difficultés sont rencontrées. Certaines villes d'où étaient originaires les terroristes belges traînent des pieds pour accueillir les dépouilles, selon plusieurs médias outre-quiévrains .

Six jours pour réclamer les corps

L’enterrement des terroristes est à chaque fois un véritable serpent de mer. La règle, définie par l’article L2223-3 du code général des collectivités territoriales , est que les familles peuvent enterrer leurs défunts dans la commune où il résidait ou celle du décès. Les proches peuvent aussi se rendre dans une ville où ils disposent d’un caveau familial. Si les villes refusent, c’est au préfet de trancher. Une fois que les permis d’inhumation ont été accordés par la justice, les familles ou les pompes funèbres ont théoriquement six jours pour réclamer les dépouilles à l’IML de Paris. "Mais il peut y avoir des dérogations. On fait toujours au cas par cas et on ne se débarrasse pas des corps tant qu’il n’y a pas eu de décision soit du préfet, soit du procureur de la République", nous indique une source médico-légale.

Les délais peuvent dépasser, notamment quand les familles sont dans l’attente d’autorisations de transfert de corps à l’étranger ou que le maire de la ville concernée refuse. Si aucune famille ne réclamait les dépouilles, comme cela risque de se produire pour les deux kamikazes du Stade de France présentés comme des Irakiens de l’Etat islamique, leurs restes seraient sans doute enterrés sur la commune de leur décès. Sollicitées par metronews, la mairie de Saint-Denis a assuré qu’elle n’avait reçu aucune demande d’inhumation dans ses cimetières.

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William MOLINIE

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