A LA LOUPE - Le collectif "Désarmons-les" a dénoncé l'arrivée d'une nouvelle arme sur le territoire national. De type LBD, elle serait "testée" en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie. Une information démentie par le Service Central des Armes et le fabricant, qui soulignent par ailleurs qu'elle est inscrite en catégorie B, contrairement au LBD.
A l'occasion du Milipol Paris 2019, un salon professionnel international consacré à la sécurité intérieure des États, l'entreprise Securengy a annoncé la mise sur le marché d'un nouveau "système d'armes de force intermédiaire" : "un lanceur de balles de défense 44 mm CRUSH" et une série de munitions dont leur produit phare : "le Projectile Expansif à force contrôlée PEFCO 44".
Pour le collectif "Désarmons-les", qui se présente comme un "collectif contre les violences d'Etat", cette nouvelle arme "ressemble à s’y méprendre au dernier modèle du bon vieux Flash Ball Super-Pro de Verney Carron." Son but serait donc de remplacer les lanceurs de balles de défense.
Au-delà de la dangerosité, il dénonce également son utilisation dans un périmètre géographique réduit : la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie Française et accuse "l’Etat français d’envisager de tester une nouvelle arme en terrain colonisé".
Un arrêté applicable en métropole et dans les DOM
Cette accusation s'appuie sur un arrêté en date du 9 avril 2019 visant à classer "la munition à projectile non métallique commercialisée par la société Securengy sous l'appellation 'PEFCO 44' de calibre 44/83 SP, composée d'un étui en aluminium et d'un projectile unique en élastomère mou" en catégorie B3°. "Le présent arrêté est applicable en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie", lit-on dans le 2ème article.
Interrogé par LCI, le Service Central des Armes (SCA), rattaché au ministère de l'Intérieur, nous explique qu'il s'agit "d'une erreur d'interprétation". En réalité, l'arrêté en question "est applicable de plein droit en métropole, dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin". Concernant la Polynésie et la Nouvelle-Calédonie, leur mention expresse est nécessaire pour que la réglementation soit applicable. Cela découle tout simplement d'une "spécialité législative". En clair, les munitions PEFCO 44 pourraient être utilisées sur tout le territoire français à l'exception de Wallis-et-Futuna : "la partie réglementaire du code de la sécurité intérieure n'y étant pas applicable", ajoute le SCA.
Un système d'armes, pas encore commercialisé
Si nous utilisons le conditionnel, c'est tout simplement parce que ni ces munitions, ni le lanceur Crush n'ont encore été commercialisés. Il n'y "pas encore de ventes", ni même d'appel d'offres en cours, souligne le porte-parole de Securengy. Le lanceur Crush et toute une gamme de munitions de même calibre n'ont même pas encore été classés par le SCA.
Le ministère de l'Intérieur teste son nouveau flashball Crush 44 (sic) en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française. De l'usage des colonies comme stand de tir pour l'industrie sécuritaire française. v/ @ianb_desarmons . https://t.co/FYQVJo5sSM — Olivier Cyran (@OlivierCyran) November 24, 2019
Le remplaçant du LBD ?
Le Crush est-il toutefois le prochain sur la liste des "armes phares" des opérations de maintien de l'ordre ? Compte-il prendre la place du LBD, comme le LBD a remplacé le Flashball ? Au vu de son communiqué de presse, l'entreprise en a l'ambition : "Le tir tendu au moyen de lanceur de balle de défense de 38,40 ou 44 mm visant directement l’objectif est, à l’heure actuelle, le moyen de neutralisation le plus efficace mais sa mise en œuvre est complexe et potentiellement dangereuse si les conditions d’utilisation ne sont pas respectées, notamment à courte distance. Fruit de nombreuses années de mise au point, le projectile expansif à force contrôlée PEFCO 44 offre une solution innovante, qui réduit les risques de blessures graves tout en assurant une efficacité optimale entre 1 et 25 mètres."
"Nous avons travaillé sur une arme de force intermédiaire, qui permette de réaliser un coup d'arrêt sans réaliser de blessures", ajoute le porte-parole de la société, soulignant les dégâts que peuvent causer les LBD quand "ils arrivent mal en cible". Pour autant, le Service de Contrôle des Armes estime pour le moment qu'"il ne s'agit pas d'armes destinées au maintien de l'ordre", et le réserve plutôt à l'usage de policiers municipaux.
L'arme "peut être utilisée en maintien de l'ordre", nuance le porte-parole de Securengy, mais il faudrait "un changement de doctrine, une volonté politique". Il souligne par ailleurs que le LBD est une arme de catégorie A (matériel de guerre), contrairement au PEFCO 44 (catégorie B - arme de défense). En toute logique, le lanceur devrait être classé dans la même catégorie que la munition. La nuance sur le terrain peut être ténue, le Flashball était lui aussi une arme de catégorie B.
Dans un premier temps donc, ce système d'armes devrait être utilisé pour les interpellations. Le fabricant l'estimant complémentaire à l'usage du taser.
LBD vs Crush
Concrètement, quelle différence avec le LBD ? Le projectile, rempli de mousse, "s’autodétruit à l’impact par absorption de l’énergie", comme le montre les images ci-dessous. Conséquence : "les effets lésionnels qui dépendent du ratio 'force appliquée sur surface d’impact' sont diminués, éloignant considérablement les risques de blessures graves ou létales entre 1 et 25 mètres", mais la "douleur ressentie est augmentée". Le lanceur et ses munitions restent bel et bien une arme à feu.
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