Les familles d'enfants revenus de Syrie contestent la création d'un fichier les regroupant.Elles dénoncent le risque d'une stigmatisation des enfants, et d'un soupçon permanent.Le fichier avait été autorisé par un décret interministériel en avril dernier.
Des grands-parents d'enfants revenus de Syrie et la Ligue des droits de l'homme (LDH) contestent en justice la création d'un fichier regroupant les données personnelles de ces mineurs, selon une requête déposée mardi devant le Conseil d'État et consultée par l'AFP.
Le risque d'un "soupçon permanent" sur ces enfants ?
Ce "traitement automatisé de données à caractère personnel relatif à la prise en charge des mineurs de retour de zones d'opérations de groupements terroristes" a été autorisé par un décret interministériel publié début avril. Il est supposé permettre une "meilleure coordination des services compétents en matière de prise en charge administrative, judiciaire, médicale et socio-éducative" de ces enfants, "en vue d'assurer leur protection et de prévenir leur engagement dans un processus de délinquance ou de radicalisation".
Mais ce n'est pas ainsi que le perçoivent les familles de ces enfants et la LDH, qui s'inquiètent du soupçon que ce fichier fera peser sur eux dès leur plus jeune âge. Ces données sont "sensibles" et accessibles "à une grande variété d'acteurs", dénonce la requête, qui estime que le fichier affecte de façon "injustifiée et disproportionnée" les droits de ces mineurs. Un tel dispositif "présume que de simples enfants sont de potentiels radicalisés sur lesquels devrait peser un soupçon permanent", a commenté auprès de l'AFP Me Patrice Spinosi, à l'origine du recours demandant l'annulation du décret.
Une nouvelle façon de stigmatiser ces enfants (...), alors qu'ils ne sont que des victimes des choix de leurs parents, et d'un pays qui les abandonne
Marie Dosé, avocate des familles
Le fichier comprendra notamment les noms, prénoms, dates et lieu de naissance, adresses, langues parlées de l'enfant, ainsi que des informations détaillées sur ses parents. Selon le décret, les données seront supprimées une fois l'enfant devenu majeur. Pour Marie Dosé, avocate des grands-parents de quatre enfants âgés de quatre à sept ans, c'est "une nouvelle façon de stigmatiser ces enfants et de refuser de les traiter comme des victimes, alors qu'ils ne sont que des victimes, des choix de leurs parents et d'un pays qui les abandonne".
Après des années de rapatriements au cas par cas, la France a procédé entre juillet 2022 et janvier dernier à trois retours d'ampleur de femmes et d'enfants, proches de djihadistes de Daech, et détenus dans des camps de prisonniers syriens. Quelque 300 enfants français sont déjà rentrés en France, dont 77 par rapatriement, avait indiqué début octobre le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti.
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