"Il ne l'a pas enterrée profond" : l'ancien codétenu de Cédric Jubillar maintient ses accusations dans Sept à Huit

Publié le 19 mars 2023 à 19h19, mis à jour le 20 mars 2023 à 11h43
"Il ne l'a pas enterrée profond" : l'ancien codétenu de Cédric Jubillar maintient ses accusations dans Sept à Huit

C’est un témoignage capital, dans l'une des plus grandes énigmes criminelles de ces dernières années.
Marco, ancien co-détenu de Cédric Jubillar, affirme que celui-ci lui aurait avoué le meurtre de sa femme Delphine.
Il a témoigné ce dimanche en exclusivité dans Sept à Huit.

Cédric Jubillar a-t-il tué sa femme, Delphine, dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020 ? Depuis plus de deux ans, ce peintre plaquiste, mis en examen pour homicide volontaire et écroué en juin 2021 à la maison d'arrêt de Seysses, près de Toulouse, dément toute accusation. De leur côté, les enquêteurs continuent de mettre en avant "un faisceau d'indices graves et concordants", en l'absence de preuves irréfutables.

Sans parler du témoignage de Marco, un homme de 35 ans, co-détenu de Cédric Jubillar, et qui a un temps semé le doute durant l'été 2021. Désormais libre, après avoir passé 17 ans en prison pour des faits de violences graves, il dévoile sa version pour la première fois devant les caméras de "Sept à Huit" (visionnable également sur myTF1). 

"Il se prenait pour une star"

"C'était un voisin de cellule. D'un côté, il y avait lui, de l'autre côté, il y en avait un autre. De là, on a fait connaissance, je ne le connaissais pas. On dirait que c'est une star, il se prenait pour une star. Il n'arrêtait pas de taper au mur : 'regarde, je passe à la télé'. Il m'a dit : 'mes autographes vont valoir de l'argent plus tard'. Il criait qu'il voulait sortir parce qu'il n'y a pas de preuves. Pas, 'je suis innocent'. Il disait : 'il n'y a pas de preuves contre moi'", raconte-t-il. 

La disparition de Delphine Jubillar, infirmière de 33 ans et mère de deux enfants, reste une énigme. Elle s'est volatilisée alors qu'elle était à un tournant de sa vie. La jeune femme était tombée amoureuse d'un autre homme, rencontré sur internet, et avait annoncé à son mari qu'elle voulait divorcer. Cédric Jubillar l'aurait difficilement accepté et aurait proféré des menaces de mort à l'égard de son épouse. Après des mois d'enquête, la justice est persuadée qu'il a fini par passer à l'acte dans leur pavillon de Cagnac-les-Mines, près d'Albi. 

Il me dit : 'j'ai pété les plombs et je m'en suis débarrassé'.
Marco, ancien co-détenu de Cédric Jubillar

Marco acquiesce. Un soir, Cédric lui aurait dit : "Je vais me coucher et je vois que je n'ai plus de batterie. Qu'est-ce que je fais ? Je vais chercher mon chargeur. Je lui réponds : 'ouais'. Il me dit : 'tu vois pas qu'elle était en train d'envoyer des messages à son amant'. Et il me dit : 'je lui ai arraché le téléphone et c'est là que j'ai vrillé. J'ai pété les plombs et je m'en suis débarrassé". Puis , il précise : "Il parle d'un couteau, mais il ne m'a pas dit : 'je l'ai planté'. Il ne m'a pas dit : 'je l'ai étouffé'. Il m'a dit : 'je m'en suis débarrassé", insiste-t-il. 

Et d'ajouter : "Il m'a dit : 'on m'a prêté une voiture pour que je puisse m'en débarrasser", précisant que le "on" serait "son frère d'enfance". "C'est comme un frère, même si génétiquement, il n'a pas de frère, mais c'est quelqu'un qui peut compter sur lui", affirme encore Marco. "Il m'a dit aussi qu'il avait mis des sacs plastiques dans les pieds parce qu'il n'est pas assez stupide pour laisser des traces", ajoute-t-il.

Une version de la soirée très différente de celle que Cédric Jubillar a livrée avec constance à la justice. Depuis les premières heures de la disparition de son épouse, il jure qu'il ne sait pas ce qui lui est arrivé. La mère de famille s'est volatilisée, en plein couvre-feu lié à la pandémie de Covid-19, et en laissant derrière elle ses papiers, clés et lunettes. Selon son mari, seuls manquent sa doudoune blanche et son téléphone. D'après lui, il aurait vu sa femme pour la dernière fois vers 22 h 30, lorsqu'elle est venue lui faire un câlin avec son fils. 

Une paire de lunettes brisée et une voiture mal garée

Pendant plusieurs semaines, des fouilles et des battues sont organisées pour tenter de retrouver la jeune femme. En vain. Les pistes d'un suicide, d'un accident ou d'une mauvaise rencontre écartées une à une. La justice penche plutôt pour une dispute entre Cédric et sa femme, notamment après le témoignage d'une mère et de sa fille, proches voisines du couple. Elles auraient entendu des cris de peur. L'enquête s'appuie aussi sur un élément délicat : les déclarations de l'ainé des deux enfants, Louis, 6 ans au moment des faits, qui a révélé qu'une bagarre avait éclaté entre ses parents le soir de la disparition de sa mère. 

Pour corroborer ces témoignages par des preuves matérielles, plusieurs perquisitions ont été menées au domicile des Jubillar. Aucune trace de sang n'a été découverte, mais la paire de lunettes de la mère de famille, retrouvée dans la maison, avait les branches et la monture brisées. Pour autant, les avocats de Cédric Jubillar dénoncent des constatations bancales et reprochent aux gendarmes de n'avoir pas placé la maison sous scellés. Autre élément : deux voisins affirment qu'au petit matin la voiture des Jubillar n'était pas garée dans le même sens que la veille. Cédric l'aurait-il utilisé pour déplacer le corps pendant la nuit ? Mais dans ce cas, où s'en serait-il débarrassé ?

Cédric me dit : ‘tu iras voir Séverine, ma femme, elle sait où j’ai enterré le corps. Tu lui diras où ça a brûlé. Elle sait, je l’ai emmenée par amour’.
Marco, ancien co-détenu de Cédric Jubillar

C'est l'autre révélation que Cédric aurait faite à Marco, son ancien voisin de cellule. L’homme affirme qu’après lui avoir avoué le meurtre, Cédric s’était montré inquiet que le corps de son épouse soit prochainement découvert. "Au début, il me demandait – parce que le temps était pourri – il me dit : ‘Marco, je peux te poser une question ? Par rapport au temps comme ça, s’il pleut beaucoup, les animaux, ils mangent les corps ? Ça peut remonter ?’ Parce qu’il ne l’a pas enterrée profond. C’était pas profond, donc il a peur que ça remonte, que ça ressurgisse", assure-t-il.

Cédric Jubillar aurait également expliqué à Marco qu’une autre personne était au courant de la localisation du corps, sa nouvelle compagne Séverine, rencontrée quelques semaines après la disparition de Delphine. Une femme de 44 ans, mère de deux garçons, qui a partagé le quotidien de Cédric et de ses enfants pendant deux mois. C’est vers elle que Cédric Jubillar aurait orienté Marco. "Cédric me dit : ‘tu iras voir Séverine, ma femme, elle sait où j’ai enterré le corps. Tu lui diras où ça a brûlé. Elle sait, je l’ai emmenée par amour’. J’ai dit : ‘ok’. C’était un peu chelou, mais je lui ai donné la suggestion de la déterrer, de déplacer le corps et de l’enterrer proche de son amant. Et là, il a tilté, il a dit : ‘ouah, c’est ça. En plus Séverine, elle t’expliquera bien les chemins par où passer'". 

Un plan rocambolesque, et des confidences que Marco va rapporter en détail à la justice le 29 septembre 2021. Pendant des semaines, la zone entourant une ferme détruite dans un incendie et située à quelques mètres du domicile des Jubillar va être fouillée, mais ces recherches n'ont donné aucun résultat. Durant ce temps, les avocats de Cédric Jubillar accusent Marco d'avoir mêlé à ses provocations de pures affabulations. 

Au printemps dernier, une confrontation a donc été organisée entre les deux anciens voisins de cellule. "Les avocats me disent : 'oui, vous parlez d'un couteau, pourtant on n'a pas trouvé de sang' (...). Les questions, c'est à lui qu'il faut les poser. Quel intérêt j'ai de me mettre au milieu de tout ça ?", s'agace Marco. Avant de préciser : "J'ai pas aidé la justice. Comme elle, elle ne m'a pas fait de cadeaux non plus, j'en veux pas de leur part. Moi, mon seul but, c'était aider les enfants d'une mère qui a disparu, basta", conclut-il.


Virginie FAUROUX

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