BARON DE LA DROGUE - Alors que son procès se tient ces mercredi et jeudi à Bordeaux, "Sept à Huit" retrace l’itinéraire de Moufide Bouchibi, dit "Mouf", arrêté en mars dernier à Dubaï. Il était devenu l'un des plus gros importateurs de cannabis en France et en Europe.
En 20 ans, il était devenu l’insaisissable "roi du shit". Le parcours de Moufide Mouchibi, baron de la drogue français arrêté en mars dernier à Dubaï, dont "Sept à Huit" retrace l'itinéraire dans la vidéo en tête de cet article, commence dans un quartier pavillonnaire de l'Essonne au début des années 1980. Son père est maçon, sa mère femme au foyer. Leurs voisins décrivent des gens paisibles et intégrés. "Il s’arrêtait devant chez lui et disait bonjour à tout le monde", se souvient Noria, voisine et amie des parents "Jamais je n’aurais pensé que Moufide aurait pris cette déviation", ajoute-t-elle.
Bouchibi est fiché pour la première fois à 17 ans pour le vol d’un chéquier lors d’un cambriolage. Le préjudice est de 16.000 francs. La même année, il vend ses premières barrettes de cannabis. En 2002, Yannick, gendarme, est prévenu de la présence d’un nouveau dealer qui semble voir les choses en grand. Ses premières filatures le conduisent au parking d’une résidence tranquille. Il place alors une caméra devant le box de Bouchibi. "On le voit arriver à bord d’un véhicule déposer des paquets de 30 kilos. En tout, il ramènera 240 kilos", témoigne Yannick face aux caméras de "Sept à Huit".
Bouchibi sera interpellé alors qu'il revient à son box, dans lequel seront découverts des armes, une compteuse à billets et 48.000 euros. Lors de sa garde à vue, le futur roi du shit se sent moins délinquant que businessman. "Il est unique. Il m’a dit : 'Je ne vais pas bosser toute ma vie, je vais bosser pendant dix ans. Après je me retire tranquille et je profite le reste de ma vie'", témoigne l’un des gendarmes qui l’a interrogé.
Bouchibi est alors incarcéré. En 2003, alors qu’il se rend à l’hôpital à bord d’un fourgon de police, ce dernier est attaqué par des hommes avec des armes automatiques. Les policiers pensent qu’il s’agissait d’un commando souhaitant l’aider à s’évader. De son côté, Bouchibi affirme qu’on aurait voulu l’assassiner. Le 2 septembre 2004, il est condamné à huit ans de prison pour l’affaire des 240 kilos.
Prêt à tout pour assouvir son ambition, il s’associe à un autre baron de la drogue, Sofiane Hambli, à sa sortie de prison. Mais il n’hésitera pas à le trahir lorsque Hambli sera à son tour incarcéré. "Mouf" s’installe alors à Casablanca. En octobre 2009, il est enlevé par les hommes de main d’Hambli qui lui réclament une dette de 600.000 euros. Après avoir payé cash 300.000 euros, Bouchibi est relâché.
Des images inédites diffusées par "Sept à Huit"
La vengeance attendra. Il poursuit son trafic vers la France. Sa méthode pour remonter la drogue : les go fast, des convois de grosses berlines chargées de plusieurs centaines de kilos de cannabis. Bouchibi laisse ce travail à ses hommes de main, il ne prend jamais place dans les voitures.
En 2011, les gendarmes apprennent qu’un convoi va traverser la France. Les images filmées par un hélicoptère que diffuse "Sept à Huit" n’avaient jusqu'ici jamais été diffusées. On y voit les trafiquants prendre l’autoroute à contre-sens avant de heurter le barrage du GIGN et de s’enfuir à pied malgré le choc. Ils seront arrêtés quelques minutes plus tard.
Partout en France, les saisies de drogue associées à Bouchibi se multiplient : 1 tonne dans la Drôme, 428 kilos à Mulhouse, 789 dans l’Eure, 1,2 tonne en Isère. Le réseau est désormais une multinationale du trafic de cannabis. En 2013, âgé de 33 ans, Bouchibi possède plusieurs dizaines de millions d’euros avec des appartements de luxe, des villas et des biens immobiliers au Maroc. Il continue d’échapper aux policiers.
Mais quatre ans après son enlèvement, il s’en prend aux hommes de mains d’Hambli. L’opération tourne mal, un homme est tué, puis un autre blessé par balle dans une fusillade. Les autorités marocaines réagissent enfin.
De son côté, Hambli devient informateur auprès des policiers et leur permet d’infiltrer l’organisation Bouchibi. Mais sept tonnes de cannabis seront retrouvées devant sa maison, Hambli ayant profité d'une forme de protection en tant qu'informateur pour mener son propre trafic. Le scandale est national et entraîne la chute de François Thierry, le patron de l'Office des stup. La mission d’infiltration est subitement interrompue. Bouchibi poursuit le trafic et passe à la vitesse supérieure. Après le cannabis, il vend de la cocaïne car le trafic est plus rentable.
Lors d’un voyage en Malaisie, Bouchibi est victime d’un accident de deux roues, ce qui va en quelque sorte le faire tomber, les enquêteurs ayant eu vent du fait qu'il en gardait des séquelles. À Dubaï, l’homme est filmé en train de boiter. La police l’interpelle le 21 mars 2021 puis le renvoie en France deux mois plus tard afin qu’il y soit jugé. Bouchibi, déjà condamné en son absence en 2015 à 20 ans de prison et 1 million d'euros d'amende, sera rejugé ces mercredi 1er et jeudi 2 septembre à Bordeaux.
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