Dans les Vosges, les jacuzzis de plusieurs particuliers ont été percés ou éventrés.Un acte revendiqué par des petits mots laissés aux propriétaires, les accusant de gaspiller l'eau.La ville affronte depuis plusieurs semaines une sécheresse sévère, qui impose des restrictions aux habitants.
Un trou de deux centimètres de diamètre taillé dans la paroi du jacuzzi, des copeaux de plastique tombés au sol et une vidéo prise par la caméra de surveillance... Voilà les signes apparents du sabotage survenu le 4 août dernier dans l'un des chalets cossus de Gérardmer, nichés dans le massif des Vosges. "On voit que c'est un individu relativement jeune, qui a agi seul, en mode commando", décrit Olivier Robert, le propriétaire, dans le reportage du 13H de TF1 en tête d'article, en montrant les images de la vidéo. Elles dévoilent un jeune homme masqué d'un foulard bleu, en simple T-shirt et portant un sac à dos, traversant le jardin du chalet.
Quelques autres habitations ont également été visés dans son voisinage, des pavillons hauts de gamme dans cette station de moyenne montagne, surtout destinés à la location en été. Quelques jours plus tôt, dans la nuit du 28 au 29 juillet, les jacuzzis de cinq chalets avaient déjà été éventrés, comme le révélait Libération. Chez Olivier Robert, le spa était pourtant vide, mais la cuve étant percée, il ne pourra a priori pas être récupéré. "On n'est pas loin des 14 ou 15.000 euros par pièce. Lorsque vous sabotez sept ou huit jacuzzis, le préjudice est tout de suite élevé", déplore-t-il.
"On s'attaque aux biens, bientôt on s'attaquera aux personnes aussi ?"
Ces sabotages surviennent à l'heure où la ville affronte une sécheresse inédite, obligeant la municipalité à se rabattre sur le pompage de l'eau du lac lui-même pour éviter des pénuries d'eau aux robinets, à cause du tarissement des nappes phréatiques. Les habitants de la ville ont aussi reçu l'interdiction de remplir leur piscine et les bains à remous. Si l'identité du saboteur n'est pas connue, ses motivations restent claires : dans chaque bassin vidé, un message identique a été laissé sur un morceau de papier : "L'eau, c'est fait pour boire ! Vous massacrez les Vosges... Plus sérieusement, la planète va mal, réveillez-vous !".
Un voisin d'Olivier Robert, également visé par des dégradations sur son jacuzzi, qui était rempli, affirme pourtant avoir mis en eau le bain avant que les restrictions ne soient décrétées. "Ils ont déversé l'eau et le chlore qui remplissaient le bassin dans la nature, donc c'est complètement aberrant", raille Alain Richard, pour qui le geste relève davantage d'une volonté de "vengeance" que d'un motif "écolo". "Je pense aussi à la jalousie : il y a des constructions, alors cela ne leur plaît plus, ils ont l'impression de ne plus être chez eux", estime-t-il. "L'image du méchant touriste qui vient voler l'eau ou envahir la population, c'est un peu cliché", abonde Olivier Robert. "On s'attaque aux biens, bientôt, on s'attaquera aux personnes aussi ?"
L'afflux massif de touristes sur les rives du lac crée des crispations dans la ville depuis plusieurs années : Gérardmer passe de 8000 habitants à l'année à 25.000 personnes en juillet-août. "C’est le fait de personnes qui, à mon avis, ne supportent pas ce mixage à Gérardmer entre touristes et locaux", a déploré Stessy Speissmann (DVG), maire de la ville, dans les colonnes du Parisien. "On est en plein, avec la problématique de l’eau, dans le conflit d’usage. Certaines personnes localement estiment que si cette ressource-là vient à manquer, il faut la prioriser pour les habitants", a-t-il ajouté auprès du quotidien.
Gérardmer n'est pas la seule ville en proie aux tensions liées à la consommation d'eau, alors que la France connaît une sécheresse historique. Début août, deux réservoirs d'eau agricoles en Vendée ont été vandalisés : leurs bâches ont été déchirées. En Ardèche, quelque 400 mètres cubes d'eau destinés à lutter contre les incendies ont été volés d'un bassin de rétention le mois dernier.