Le 14 décembre 2017, six enfants étaient tués dans la collision de leur car scolaire avec un train à Millas (Pyrénées-Orientales).Le procès débutera lundi à Marseille.Océane Quinet, collégienne à l'époque et blessée dans l'accident, se confie face aux caméras de TF1.
Il était un peu plus de 16 heures, ce jeudi 14 décembre 2017, quand le car scolaire qui ramenait chez eux des élèves du collège de Millas (Pyrénées-Orientales) s'est engagé sur la voie ferrée. Le choc avec le TER, qui effectuait la liaison entre Villefranche-Vernet-les-Bains et Perpignan, a été d'une violence inouïe. Le car a été littéralement coupé en deux, six adolescents ont perdu la vie, treize ont été gravement blessés, ainsi que la conductrice.
Présente dans le véhicule ce jour-là, Océane Quinet, alors élève de cinquième, écoutait de la musique au casque lors de l'impact. Blessée, elle dit pourtant ne s'être préoccupée que de la perte de son ami Allan, tué dans l'accident. Dans la vidéo en tête de cet article, elle raconte le drame et ses suites à une équipe de TF1, un témoignage que nous retranscrivons ici plus en longueur.
J’ai regardé à droite vers la voie ferrée, puis c'est le noir
Océane
Océane n'a rien remarqué qui sorte vraiment de l'ordinaire ce jour-là. Tout juste s'était-elle fait la réflexion que la conductrice du bus avait attendu les élèves debout à l'entrée du véhicule, au lieu d'être assise derrière son volant comme d'habitude. "Dans le bus, il y avait de la musique", raconte-t-elle. C'est celle d'une enceinte apportée par les élèves, une pratique que la chauffeuse tolérait, même si le son était "à fond". Océane écoutait la sienne au casque. Au moment de l'arrêt au stop, juste avant un dernier virage pour atteindre le passage à niveau, elle a cherché du regard son meilleur ami, Allan. "Je me souviens qu'il était debout". Ensuite la jeune fille a tourné le regard "à droite, vers la voie ferrée, puis c'est le noir".
J’ai cru que j’étais dans un cauchemar
Océane
Quand Océane s'est réveillée, elle était allongée dehors. "Je me suis assise, j’ai regardé autour de moi, j’ai cru que j’étais dans un cauchemar sombre". Quelqu'un qu'elle n'identifie pas criait de douleur à côté d'elle. "Je me suis levée pour chercher mes lunettes, et essayer de trouver Allan", se souvient-elle. Elle se croit toujours dans un rêve, et finit par se rasseoir. Son père arrive très vite sur place, et la prend en charge ainsi que d'autres adolescents blessés. 80 pompiers et 50 gendarmes sont déployés, un poste médical avancé est installé, et cinq hélicoptères assurent les évacuations vers les hôpitaux de Perpignan.
Là-bas, elle est soignée pour une fracture crânienne assez profonde, et apprend qu'elle a en fait été éjectée du bus, sous la violence de l'impact. Au côté de sa fille pendant l'interview, sa mère raconte qu'elle a donné à Océane les noms de tous les adolescents qui avaient été tués dans l'accident. Sauf celui d'Allan, qu'elle ne parvenait pas à prononcer. Elle-même avait été sa nourrice, et sa fille a quasiment grandi avec lui depuis l'âge d'un an. "J'ai compris à son regard", explique la jeune fille. Allan, comme Océane, n'avait que 12 ans lors de l'accident.
On était en classe ensemble, toujours inséparables, c’était comme un frère de cœur
Océane
"On était en classe ensemble, toujours inséparables, c’était comme un frère de cœur", raconte-t-elle. Au point qu'Océane ne se préoccupe pas de ses propres blessures, qu'elle juge secondaires par rapport à la perte d'Allan. Les larmes sont venues plus tard, à la rentrée de janvier, dans la cour de récréation. Ses parents se souviennent de six premiers mois assez durs. Océane refusait de monter à nouveau dans un bus, et seuls ses parents pouvaient la conduire en voiture. Des problèmes de concentration sont apparus, que la jeune fille dit désormais mieux contrôler.
Du procès, qui s'ouvre le 19 septembre, elle n'attend pas grand-chose. Il se tiendra à Marseille, loin de Perpignan, et la famille ne devrait assister qu'au début et à la fin des trois semaines prévues. Tout juste espère-t-elle "que la conductrice s’excuse auprès de nous, elle ne l’a jamais fait en cinq ans, ni la compagnie de bus". Elle aura toutefois l'occasion de témoigner, et de parler pour son meilleur ami disparu.
Un an et demi après la tragédie, un rapport du Bureau d'enquêtes sur les accidents de transport terrestre avait conclu qu'il n'y avait pas eu de défaillance technique du matériel de la SNCF, laissant de fait la conductrice du bus seule face à la justice. Si celle-ci prenait à l'époque un traitement incompatible avec la conduite, le rapport d'enquête note cependant la possibilité qu'elle n'ait effectivement pas vu le signal du passage à niveau, ni la barrière baissée, à cause d'un angle mort.