Viol après un rendez-vous sur Internet : les "date rape" sont-ils une réalité en France ?

par William MOLINIE
Publié le 9 février 2016 à 12h26
Viol après un rendez-vous sur Internet : les "date rape" sont-ils une réalité en France ?

ENQUÊTE - Les viols et agressions sexuelles liés à une rencontre virtuelle augmentent considérablement en Grande-Bretagne. Qu'en est-il en France, alors que les sites de rencontre en ligne suscitent ici aussi l'engouement ?

Outre-Manche, le phénomène explose. En cinq ans, les viols issus d'un premier contact ayant eu lieu en ligne ont augmenté de 450%, a rapporté lundi 8 février  The Independant . En Grande-Bretagne, sept fois plus de crimes liés aux applications Tinder et Grindr ont ainsi été enregistrés en deux ans. En France, les sites et applications de rencontres en ligne ont eux aussi la cote. Selon un récent sondage BVA, 22% des Français ont déjà consulté un site ou utilisé une application de rencontre. Alors, doit-on s’inquiéter dans l’Hexagone d’une augmentation des "date rape" (littéralement "rencard pour violer") qui inquiètent largement les autorités Outre-manche ? 

Violée après une annonce postée sur "leboncoin"

"Cette notion de ‘date rape’ renvoie à une donnée qui a été théorisée dans la littérature criminologique anglo-saxonne ", introduit auprès de metronews une source à l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) . A l'origine, les "date rape" concernaient les viols commis au cours de rendez-vous amoureux. L'apparition d'Internet a fait évoluer la notion. Aujourd'hui, on parle communément de "date rape" pour définir des viols dont l'entrevue a été fixée sur Internet. Une définition très large puisque les types de plateformes utilisées sont vastes. Cela peut concerner des sites de rencontres dédiés (comme Tinder, Grindr, Happn, Once, Meetic et adopteunmec), mais aussi des réseaux sociaux (Facebook, Twitter, Snapchat).

Voire même des sites de vente entre particuliers… Comme quand, en cette veille de Noël 2013, Annie* repère sur le bon coin une annonce de colocation. "Une chambre pour 600 euros ou un canapé pour 400 euros", mentionne la publication. Exactement ce que recherche cette étudiante de 21 ans. Après avoir fixé son rendez-vous avec le locataire, elle se rend à l’adresse pour visiter l’appartement. Tout se déroule normalement. Sauf qu’au moment de partir, le locataire, Wilfried A. 46 ans, la coince contre un mur, la caresse à travers ses vêtements, lui baisse le pantalon avant de la pénétrer avec son doigt. L’enquête a pu déterminer que l’auteur, connu des services de police pour deux agressions sexuelles, avait déjà, deux ans auparavant, commis le même crime sur une autre jeune femme qui avait répondu, elle aussi, à une annonce immobilière.

Metronews s'est procuré un rapport de police relatant un viol sur une mineure. L'agresseur a pris contact avec elle sur Facebook:

Les "date rape" représentent 6,6 % des viols à Paris

Contrairement au Royaume-Uni, où les "date rape" sont suivis de près, en France, la réalité du phénomène est relativement méconnue en raison de l'absence de statistiques précises. Le seul chiffre existant a été publié début janvier  dans une enquête sur l’étude du viol à Paris  en 2013 et 2014. Au cours de ces deux années, 39 victimes majeures ont déclaré aux policiers parisiens avoir été violées après avoir donné rendez-vous à leur agresseur depuis Internet. Rapporté aux 595 déclarations de viols, cela correspond à un taux de 6,6%. Il faudra attendre plusieurs mois, et une nouvelle étude de l’ONDRP, avant de savoir si le phénomène prend de l’ampleur.

Le patron d’un service de police judiciaire parisien, contacté par metronews, ne nie pas l’existence de ce type de faits. "Nous avons eu quelques cas. Mais c’est vraiment une très faible partie des viols. Il faut savoir que la majorité des plaintes pour viols correspondent à des filles en état d’ivresse ou qui ont été droguées, qui ne se rappellent pas de leur soirée et qui déposent plainte le lendemain", explique-t-il.

Dans les faits, les policiers n’ont pas constaté de corrélation entre l’engouement pour les sites de rencontres et le nombre de viols, dont le nombre de plaintes a augmenté de 26% entre 2010 et 2015, selon les chiffres de l'ONDRP , passant de 10.751 faits rapportés à 13.596. Sollicité par metronews, Tinder assure prévenir ses utilisateurs des risques d’agressions sexuelles . "Il est préférable de se donner rendez-vous dans un lieu public et d’avertir un ami afin qu’il sache où vous êtes", indique-t-on au sein du site de rencontres. Depuis la loi du 17 mai 2011, le fait de commettre un viol après avoir pris contact avec la victime via internet constitue une circonstance aggravante.

*Le prénom a été changé.

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William MOLINIE

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