JUSTICE - Le lieutenant-colonel Paul N., ancien médecin-chef du 41e régiment de transmission à Douai, est suspecté d’avoir commis des violences sexuelles lors de ses consultations. Ses victimes ? Toutes des femmes militaires, la plupart "sans grade et fragiles psychologiquement". Seules trois d’entre elles, sur une douzaine, vont se constituer partie civile au procès qui s’ouvre ce mercredi 27 janvier à Lille. Une affaire qui illustre le silence entourant le harcèlement sexuel dans l’armée.
MISE A JOUR, le 27 janvier 2016 à 18h
A l'issue de l'audience, le parquet a requis 36 mois d'emprisonnement avec sursis à l'encontre du médecin-militaire. Le ministère public souhaite par ailleurs qu'il soit contraint d'indemniser les victimes et qu'il ne puisse plus jamais exercer la médecine. Le jugement sera rendu le 24 février prochain.
"Je me souviens que ce jour-là, il m’a caressé le visage. […] Il m’a dit que mon poids n’allait pas." Au cœur de l’été 2012, Aurélie sort "gênée" de la salle de consultation du médecin-militaire. Venue passer sa visite annuelle obligatoire, la brigadier-chef confie à ses proches être "perturbée par la situation". Entreprenant, le lieutenant-colonel Paul N. lui impose au fil des rendez-vous médicaux une relation "ambiguë", la serrant dans ses bras, jusqu’à lui faire sentir son "sexe en érection". Comme elle, une douzaine de femmes militaires, souvent jeunes, ont dit avoir subi des attouchements de la part de ce médecin-chef du 41e régiment de transmission à Douai (Nord). Mais seules trois d’entre elles sont allées jusqu’au bout de la procédure judiciaire et vont se constituer partie civile ce mercredi à l’ouverture du procès devant le tribunal correctionnel de Lille. Les victimes du militaire dénoncent pour certaines des "atteintes sexuelles avec violence" lors des consultations : mains aux fesses, aux seins, des caresses sur le visage, des baisers forcés voire des frottements.
Un homme, plusieurs affaires
Et le médecin-chef serait un spécialiste de la main baladeuse. Après avoir quitté l’armée à la suite de l’information judiciaire ouverte le 5 décembre 2013, il a réussi, alors qu’il était sous contrôle judiciaire, à se faire embaucher comme médecin du travail à l’hôpital d’Arras. Lundi 25 janvier, il a été placé en garde à vue pour des faits du même type, deux agents hospitaliers ayant porté plainte contre lui. Il est convoqué en juin prochain pour être jugé pour ces nouveaux faits datant de début 2015. Déjà en 2008, lors d’une précédente affectation, Paul N. avait été dénoncé par des femmes soldats qui se plaignaient de faits de ce type au cours des auscultations. Mais à l’époque, sa hiérarchie avait considéré ces accusations comme infondées. Plutôt que de le mettre à l’écart, son ancien chef de corps avait imposé une présence féminine pendant ses consultations pour faire taire ces "rumeurs".
EN SAVOIR + >> En 2015, la cellule Thémis a ouvert 75 dossiers de violences sexuelles dans ses rangs
L’enquête lilloise, portant sur les faits de 2012 à 2013 lorsqu’il était en poste à Douai, met en lumière un comportement pour le moins inadapté. Entendues par les gendarmes, les patientes se sont plaintes de "gestes surprenants et de mains baladeuses". "A la fin du rendez-vous, […] il m’a de nouveau prise dans ses bras. Il me serrait tellement fort contre lui que j’ai pu constater qu’il était en érection. Ce jour-là, il m’a également touché les fesses. Il a profité que je passe devant lui pour faire ce geste", a raconté aux gendarmes l’une d’entre elles. La plupart des victimes, "souvent sans grade et fragiles psychologiquement" selon le rapport d'enquête, n’ont pas souhaité déposer plainte ou aller jusqu’à la fin du processus judiciaire. Sans doute par crainte d’une carrière brisée puisque leur avancement était conditionné par la validation de cette visite médicale. "Si la parole s’est libérée depuis quelques années et que les victimes parlent plus facilement, il reste une importante chape de plomb sur ces problèmes dans l’armée", regrette auprès de metronews Elodie Maumont, avocate de l’une des victimes du médecin-militaire. Sa cliente, qui depuis les faits s’est vue reconnaître un état dépressif handicapant, réclame aujourd’hui 25.000 euros auprès du lieutenant-colonel.
Le médecin reconnaît un "comportement mal adapté"
De son côté, le médecin-chef âgé de 62 ans concède être un "dragueur invétéré". Il a reconnu au cours de sa garde à vue en 2013 avoir eu un "comportement mal adapté". Mais se défend d’avoir voulu "agresser" ces jeunes femmes qu’il accuse de "complot". Selon lui, ses gestes, qui étaient justifiés par "l’examen médical", auraient été mal interprétés. L’expert psychiatre décrit quant à lui un personnage "autocentré susceptible d’entretenir l’ambiguïté" dans "un jeu de séduction narcissique". Contacté par metronews, son avocat n’a pas donné suite à nos sollicitations.
"Si la hiérarchie avait à l’époque, dès les premiers signalements, fait remonter les informations le concernant, il y aurait moins de victime. Il y a 15% de femmes dans l’armée. Il faut une éthique irréprochable pour qu’elles continuent à s’engager", assure de son côté le colonel Jacques Bessy, président de l’Adefdromil-Aide aux victimes , une association de défense des droits des militaires. "Dans ce type d’affaire, on se heurte aux supérieurs qui ne veulent pas faire remonter les alertes, de peur d’être pointés du doigt pour ne pas avoir su déceler les problèmes", regrette Jacques Bessy pour qui le lieutenant-colonel a été "protégé par la hiérarchie". En avril 2014, le ministère de la Défense a mis en place la cellule Thémis qui permet de prendre en charge et d’accompagner les victimes de violences sexuelles dans l’armée. Chaque mois, cinq nouveaux cas sont enregistrés. Les femmes sont victimes dans 90% des affaires.
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