IMMERSION - Il y a 50 ans, éclataient les événements de mai 1968. Boris, Fabienne et Bernard avaient alors entre 18 et 23 ans. Ils nous racontent ce vent de rébellion qui a profondément marqué leurs vies. De la place de la République au théâtre de l'Odéon en passant par Nanterre, les Beaux-Arts et l'usine de Flins, nous sommes retournés avec eux sur les lieux les plus emblématiques de mai 68 pour une immersion à 360° entre passé et présent.

Quand on pense à mai 68, certains lieux nous viennent tout de suite à l'esprit. L'université de Nanterre bien sûr, première université occupée, la Sorbonne et le quartier latin mais aussi l'atelier des Beaux-Arts ou encore l'usine Renault de Flins, l'une des dernières usines à avoir "rouvert" ses portes, bien après les accords de Grenelle. Nous vous proposons de visiter ces lieux et de plonger dans ce qui a été le plus grand mouvement social que la France ait connu, à l'aide de photographies de l'époque. 

Boris Petroff nous emmène place de la République

1968 : étudiant en droit à l’université Paris Assas // 2018 : retraité

"Ce qui m'a marqué, c'est la manifestation du 13 mai. Ce n'était pas ma première manif mais c'est la plus exceptionnelle que j'ai connue. On a du se réunir vers 11 h du matin et à 5 h de l'après-midi j'étais toujours au même endroit, devant la bourse du travail. Pendant 5 heures on n'a pas bougé tellement il y avait du monde. Cinq heures à discuter, cinq heures à trouver que c'était génial, qu'on avait gagné, qu'il y avait tellement de monde que forcément De Gaulle allait donner le pouvoir et que forcément on allait le prendre et refaire le monde. 

C'est ce souvenir que j'ai de la République et pour moi, tout ce qui s'est passé après, toutes les commémorations qu'on a fait à République après le Bataclan, etc, ça me donne chaud au cœur parce que ce n'est pas un lieu comme les autres, c'est vraiment pour moi le lieu des manifestations."

Ecole des Beaux Arts - Bernard Landau

1968 : comédien et étudiant au Conservatoire d'art dramatique de Paris // 2018 : retraité

"Entre la Sorbonne et les Beaux Arts il y a 10 minutes à pied donc quand vous étiez étudiant comme moi, vous étiez curieux de voir ce qu'il se passait ailleurs. Il y avait des débats tout le temps partout, dans l'amphi de la Sorbonne où on retrouvait tous les intellos engagés dans le mouvement - il y avait une ambiance extraordinaire - le soir à l'Odéon, ou à l'école aussi où un comité de grève s'est mis en place.

Et évidemment avec les peintres et les sérigraphistes s'est créé l'atelier des affiches. C'était vraiment un moment de création collective : tous les soirs, le dessinateur présentait les affiches au public et les présents votaient pour savoir quelles affiches seraient sérigraphiées et collées dans les rues de Paris ou de la banlieue."

Usine Renault de Flins - Fabienne Lauret

1968 : lycéenne à Paris // 2018 : retraitée

Auteure de "Une féministe révolutionnaire à l'atelier, L'envers de Flins"

"Il y avait des manifestations tous les jours, il y avait une libération de la parole incroyable (...) on remettait tout en cause.

Ensuite, il y eu l'idée que mai 68 n'avait été qu'une répétition générale mais que ce qu'il manquait c'était un parti révolutionnaire implanté chez les salariés dans toutes la société et donc on s'est dit qu'on allait pas attendre 100.000 ans, on voulait militer, on s'est dit 'allez on va à l'usine". On va à 4 à Flins. D'autres sont allés dans d'autres boites du coin et dans toutes les sphères de la société. On s'était établi entre Mantes et les Mureaux."

Théâtre de l'Odéon - Bernard Charnacé

1968 : étudiant à l'école des Beaux-Arts de Paris // 2018 : retraité

"Moi en tant que comédien, j'ai trouvé que c'était formidable d'occuper un théâtre parce que c'est un lieu de rencontres où tout le monde, toutes les classes d'âge se rencontrent et où le délire est possible et mai 68 était aussi un immense délire. (...) Tout était suspendu, la vie habituelle était suspendue, il s'agissait d'autre chose, c'était comme une aventure extraordinaire. 

Dans ce lieu magnifique, les gens dormaient, mangeaient, s'exprimaient, c'était un meeting permanent. C'est touchant de se retrouver dans ce lieu après toutes ces années. Peut être qu'il sera un jour de nouveau occupé."

Université de Nanterre - Christelle Dormoy-Rajramanan

Docteure en sciences politiques à l'université de Nanterre

Auteure de "Mai 68 par celles et ceux qui l'ont vécu"

"Toute la génération née entre les années 40 et 60 ont eu des enfants et ont fait passé certaines valeurs acquises au cours de 68. On voit aujourd'hui à Nanterre cette référence à 68 est mobilisée dans l'idée qu'il ne suffit pas de commémorer verbalement ces moments mais il faut les reproduire aujourd'hui pour obtenir de nouveaux droits et lutter contre la sélection à l'université.

Mai 68 constitue un ensemble de références, en partie fantasmées et mythiques mais en partie bien réelles qui alimentent les luttes aujourd'hui - qui sont à réactualiser mais qui peuvent s'inspirer de toutes les initiatives pratiques et les réflexions théoriques qui ont eu cours pendant ces trois semaines de grève générale."

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Claire CAMBIER

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