Pour la première fois de son histoire, la prestigieuse École Polytechnique a choisi une femme pour directrice.Laura Chaubard entend féminiser cet environnement militaire et pluridisciplinaire.Dans le podcast "Expertes à la une", elle évoque son parcours et se réjouit de la quête de sens qui anime ses étudiants.
Des sciences dures, des langues, du sport, de l'architecture, du cinéma, etc. À l’École Polytechnique, les étudiants se préparent aux plus importants postes de l’État. Sous statut militaire, 400 étudiants prétendent chaque année à un diplôme d’ingénieur et s’engagent à travailler pour l’intérêt général. À leur sortie, les corps d’État et entreprises se les arrachent.
Depuis octobre 2022, Laura Chaubard dirige ce mastodonte âgé de plus de deux siècles. Mathématicienne, informaticienne, elle est recrutée par la direction générale de l’armement pour utiliser des données accumulées. Elle plonge dans les rouages de l’intelligence artificielle et en devient une experte : "L'expertise, c'est l'ensemble des bagages que l’on accumule au cours de son chemin : bagage académique, scientifique, mais aussi toutes les expériences, les mises en situation, les rencontres qui font que dans un domaine, on va posséder davantage que de la connaissance" confie-t-elle à Christelle Chiroux dans un nouvel épisode du podcast "Expertes à la Une" à écouter ci-dessous.
Parler des sciences
Partout autour de nous, les sciences structurent notre environnement. Les sujets d’actualité font intervenir les mathématiques, la physique, la biologie, l’histoire, etc. Laura Chaubard mesure le défi de la défiance scientifique qui s’exprime sur les réseaux sociaux et parfois jusque dans les écoles : "Cette défiance vis-à-vis de la démarche scientifique, de la notion de vérité ou de démonstration est particulièrement préoccupante. Le rôle d'une école comme Polytechnique reste de former des ingénieurs au service des défis qui nous attendent." La nouvelle directrice se réjouit de voir des étudiants qui cherchent du sens à ce qu’ils font : "Ils ne réfléchissent plus en plan de carrière. Ils se demandent où est-ce qu’ils vont apprendre, se rendre utile et prendre du plaisir ? Le travail n'a pas vocation à être une souffrance."
Les défis, Polytechnique en compte plusieurs d’importance : demeurer gratuite et ouverte à toutes et à tous. "Elle doit rester un lieu d’émancipation. Il faut accroître la diversité des profils que l'on va chercher. Elle doit toujours continuer à former les meilleurs", s’enthousiasme la scientifique.
L’égalité homme-femme pour vocation
En 1972, l’école accueillait la première étudiante de son histoire. Anne Chopinet réussissait le concours en devenant major de sa promotion. À la sortie, les journalistes n’y sont pas allés avec la petite cuillère pour l’interroger : "J'ai à chaque fois un pincement au cœur quand je revois cette séquence en vidéo", regrette Laura Chaubard. Le journaliste lui demande si elle fait les boutiques, si elle est frivole et si elle se regarde dans la glace ? Depuis, le temps a institutionnalisé les femmes dans l’école, même si elles ne forment que 20 % des étudiants. "On peut y voir le verre à moitié plein. C'est deux fois plus que quand j'étais élève il y a 20 ans. Donc ça avance doucement, mais ça avance", commente la directrice générale. Elle constate que la proportion de femmes candidates au concours continue de progresser. "Notre document stratégique nous impose d'atteindre 30 % de femmes à l'horizon 2026. Une étape vers la parité au sein de cette école publique", espère Laura Chaubard.
La scientifique s’attend cependant à des années de recrutement difficile. Elle met le doigt sur de récentes législations : "La réforme du bac a aggravé ces choix d'orientation. Nous manquons d’élèves qui font des mathématiques." Elle juge les compétences des lycéennes équilibrées : "Elles sont douées en math, mais pas seulement. Au lycée, les garçons s’orientent déjà vers une matière et réussissent souvent mieux dans cette matière. Si nous avions trouvé les raisons objectives de ce phénomène assez massif de désorientation des femmes vis-à-vis des mathématiques, je pense que des mesures auraient été prises."
Laura Chaubard adresse un message de confiance aux filles qui aimeraient se lancer dans une carrière scientifique : "Dans notre société actuelle, les études scientifiques apportent des opportunités fabuleuses. Nous avons un tel besoin de compétences scientifiques que l'on ne peut pas se passer du talent des femmes." Elle rassure enfin : "Nous prenons du plaisir à faire des mathématiques. Ce côté austère qui colle parfois à la peau des mathématiques, il faut absolument le battre en brèche. C’est aussi satisfaisant d'arriver à comprendre le monde et à le modéliser grâce aux mathématiques."
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