STRATÉGIE POLITIQUE - Ces dernières semaines, sur YouTube ou encore via TikTok, le chef de l'État multiplie les messages et annonces politiques à destination des jeunes. Si cette stratégie semble avoir fait grimper sa cote de popularité auprès de cette catégorie de la population, rien n'assure qu'elle sera payante dans les urnes en 2022.
Près de 12 millions de vues en trois jours. La participation du président de la République au "concours d’anecdotes" des YouTubeurs McFly et Carlito est la partie la plus visible de sa stratégie de communication à destination des jeunes, accélérée ces dernières semaines, à un an de la prochaine élection présidentielle. Avant ce climax numérique, il avait parlé harcèlement scolaire sur Instagram, répondait à des abonnés sur TikTok ou s'exprimait, en fin d'année dernière, dans un style qui se voulait plus direct via les réseaux du site Brut.
"Il travaille son image, il essaye de paraître sympathique et de gommer son arrogance", décrypte auprès de LCI l'enseignante en communication politique Anne-Claire Ruel. Mission réussie pour le chef de l’État dans cette vidéo 100% sans politique à destination des adolescents, où il révèle avoir tourné dans une sitcom nigériane, passe un coup de fil à la star de l’équipe de France et du PSG Kylian Mbappé, et assiste à un concert de métal dans les jardins de l’Élysée. "Il utilise des canaux pour toucher ses cibles là où elles se trouvent. Aujourd’hui, il faut gagner la bataille de l’attention ; plus personne ne regarde ou n’écoute un discours politique devant la télévision en famille", commente Anne-Claire Ruel.
Attention à la dépolitisation
Mais attention à la "segmentation à outrance", prévient-elle. "A trop raisonner en marketing politique segmenté, on peut en oublier le message commun, le cap, la vision que doit incarner un Président. Il doit parler à l’ensemble de la Nation, pas à des segments bien distincts, qui n’auraient aucun lien entre eux." L'enseignante met également en garde contre la dépolitisation. "Les jeunes sont nés avec des smartphones dans les mains, ils sont tout à fait capables de déceler toutes les ficelles de cette communication. Cette dépolitisation est une injure à leur intelligence", estime l’enseignante, qui y voit également un danger pour la démocratie et le débat public.
Toutefois, Emmanuel Macron a pris soin d’accompagner cette séquence de communication pure avec des annonces plus politiques comme la mise en ligne d’un simulateur d’aides à destination des jeunes fin avril, la création des pass sport et culture et l’ouverture de la vaccination aux plus de 18 ans dès le 31 mai, en même temps que les terrasses, cinémas et musées rouvraient. D’autres annonces devraient suivre d’ici l’été.
Une popularité en forte hausse chez les jeunes
Pour l'instant, le pari est payant. Selon le dernier baromètre de popularité de l'Ifop pour le JDD, au mois de mai 2021, 40% des sondés sont satisfaits de l’action d’Emmanuel Macron, mais 51% des 18-24 ans (+8 points par rapport à avril) et 42% des 25-34 ans (+8 points également). Les annonces de déconfinement sont-elles les seules à expliquer cela ? Selon un autre sondage de l'Ifop pour LCI et Le Figaro publié ce 24 mai, si le premier tour de l’élection présidentielle avait lieu dimanche prochain et que Xavier Bertrand était le candidat de la droite, Emmanuel Macron recueillerait 26% des suffrages chez les 18-24 ans. Sur cette tranche d’âge, Jean-Luc Mélenchon totaliserait 21% des voix, et Marine Le Pen 19%.
En revanche, le leader de La France insoumise et la présidente du Rassemblement national font mieux sur les 25-34 ans - les plus touchés par la crise et les difficultés économiques -, avec respectivement 24% et 31%, contre 19% pour le chef de l’État. Pour rappel, en 2017 au premier tour de l’élection présidentielle, les 18-24 ans avaient plébiscité Jean-Luc Mélenchon (30%, selon une étude Ipsos) et Marine Le Pen (21%). Emmanuel Macron était arrivé en tête chez les 25-34 ans (28% contre 24% pour Mélenchon et Le Pen).
"Mais la popularité se convertira-t-elle en votes ? Ce sont deux choses décorrélées", remarque Anne-Claire Ruel. "Très vite, la réalité économique de la crise va rattraper Emmanuel Macron. Il y a quand même un vent d’hostilité assez fort chez les jeunes et les étudiants. Je ne suis pas sûre que la vidéo de McFly et Carlito les empêche de penser à la réalité de leur condition. Et puis, le premier parti des jeunes, c'est quand même l’abstention", rappelle-t-elle. Au second tour de l'élection présidentielle de 2017, l'abstention a atteint 34% chez les 18-24 ans et 40% chez les 25-34 ans.
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