AUDITION - Son rôle est au centre des interrogations des députés de la Commission d'enquête parlementaire chargée de l'affaire Benalla. Patrick Strzoda, le directeur de cabinet d'Emmanuel Macron, assume avoir décidé de la sanction infligée à Alexandre Benalla, mais reste flou sur de nombreux points, comme les avantages dont bénéficiait ce dernier.
Ses explications étaient attendues, mais Patrick Strzoda n'a pas tout dit. Auditionné par la commission d'enquête parlementaire chargée de l'affaire Benalla, le directeur de cabinet de l'Élysée assume tout : à la fois les décisions qu'il a prises après les manquements du collaborateur de Macron, mais aussi son refus de répondre à certaines questions relatives à la vie interne de l'Élysée, au nom de la "séparation des pouvoirs" entre la présidence et le Parlement.
Strzoda assume seul d'avoir pris cette sanction à l'encontre de Benalla
Le directeur de cabinet de l'Élysée a dit aux députés avoir décidé seul de la sanction infligée à Alexandre Benalla, quand il a eu connaissance de son comportement lors du 1er mai. "Je l'ai prise seul, en mon âme et conscience. Je n'ai jamais parlé de ce sujet avec le chef de l'Etat, qui était à 10.000 km." Alors qu'Emmanuel Macron était effectivement en Australie, Patrick Strzoda a néanmoins contacté son supérieur, le secrétaire général de l'Élysée Alexis Kohler, pour lui soumettre la sanction envisagée : 15 jours de mise à pied sans traitement et une "rétrogradation".
Alexis Kohler en a lui-même parlé avec Emmanuel Macron, mais pas avec Strzoda, selon ce dernier. "Dès que le président en a été informé, j'ai mis en oeuvre cette mesure", a-t-il affirmé. "Je comprends parfaitement qu'on puisse considérer que [cette sanction] n'était pas adaptée, en tout cas, en ce qui me concerne, j'assume ma décision", conclut Strzoda, qui évoque un "comportement individuel fautif".
Strzoda explique pourquoi il n'a pas saisi la justice en vertu de l'article 40
Autre question centrale : l'opportunité ou non de saisir la justice en vertu de l'article 40 du code de procédure pénale, qui oblige en théorie tout fonctionnaire à dénoncer au procureur des faits délictuels. Sur ce point, Patrick Strzoda assume de ne pas avoir saisi la justice : "J'ai considéré qu'à mon niveau je n'avais pas assez d'éléments pour justifier un recours à l'article 40", a-t-il déclaré.
Le directeur de cabinet de la présidence explique sa décision par le fait qu'aucune plainte n'avait été déposée et que les "autorités d'emploi" d'Alexandre Benalla ne l'avaient "jamais évoqué ou suggéré". Autre argument : "Cette scène a été signalée sur la plateforme de l'IGPN (Inspection générale de la police nationale), elle a été analysée par des spécialistes et aucune information de cette analyse ne m'a été adressée allant dans le sens d'un article 40", argue Strzoda.
Sur le port d'arme, Strzoda s'explique mais se défausse sur la préfecture de police
C'est désormais un fait connu : Alexandre Benalla bénéficiait d'un permis de port d'arme accordé par le préfet de police sur demande de l'Élysée. Le "M. Sécurité" d'Emmanuel Macron avait auparavant sollicité à plusieurs reprises le ministère de l’Intérieur (2013, janvier 2017, juin 2017) pour obtenir ce permis, mais avait essuyé autant de refus.
"Avez-vous validé d'une quelconque manière la troisième demande qui a permis à M. Benalla de disposer d'un permis de port d'arme", a demandé à Patrick Strzoda le député David Habib. "Le préfet de police a pris sa décision sur une demande de M. Benalla que j'ai transmise. (...) Dans l'avis que j'ai mentionné sur ma transmission, j'ai mis cette phrase : 'Si cette autorisation peut être accordée dans le strict respect des textes, j'y suis favorable'. Donc j'ai demandé une instruction normale et une décision normale."
Le directeur de cabinet se défend donc d'avoir voulu peser sur la décision finale, mais justifie malgré tout la nécessité pour Alexandre Benalla de disposer de ce permis de port d'arme au regard de "la nature des fonctions" de ce dernier, et des "menaces" pouvant peser sur lui.
Salaire, logement, voiture de fonction : Strzoda reste dans le flou
Logement très spacieux sur le quai Branly, voiture équipée d'une sirène, salaire : Patrick Strzoda n'a pas dissipé le flou autour des avantages accordés à Alexandre Benalla. "Les moyens qui ont été mis à la disposition de M. Benalla ne sont pas des avantages", rétorque le directeur de cabinet. "S'agissant de la voiture, ce n'était pas une voiture de fonction, c'était une voiture de service pour exercer sa mission." Un véhicule qui "était également intégré au cortège présidentiel, ce qui explique qu'il était équipé de certains équipements spéciaux".
Quant au logement de fonction accordé à Alexandre Benalla, le directeur de cabinet le justifie par la "disponibilité" exigée du collaborateur d'Emmanuel Macron. Une disponibilité telle que les autres chargés de mission à l'Élysée ne bénéficient pas d'un tel logement, poursuit Patrick Strzoda.
Ce dernier dément enfin qu'Alexandre Benalla ait touché un salaire de 10.000 euros mensuels, mais a refusé de donner le montant de son traitement, au nom du "principe de séparation des pouvoirs". De quoi provoquer l'ire des députés d'opposition.
Sur l'épisode du bus des Bleus, Strzoda contredit Castaner
Patrick Strzoda est enfin revenu au cours de son audition sur le retour des Bleus et le passage rapide de leur bus le long des Champs-Élysées, alors qu'Alexandre Benalla était à bord. Selon le directeur de cabinet, les joueurs français devaient avoir quitté l'Élysée impérativement avant 20h et Alexandre Benalla était présent dans le bus pour être en contact permanent avec lui afin de savoir si cette contrainte horaire pourrait être tenue. Des propos en totale contradiction avec la version de Christophe Castaner, qui avait affirmé qu'Alexandre Benalla s'occupait des bagages...
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